Postfinance veut notre argent

Publié le 18 avril 2025

Dans sa publicité, Postfinance se moque du «blabla bancaire». Pourtant, elle est elle-même passée maître dans l’art du «blabla». – © Postfinance sur youtube.com

Le dernier communiqué de presse de l’organisme financier de la Poste Suisse est rempli d’absurdités incompréhensibles, histoire de cacher le véritable message. C’est souvent pour leur faculté à noyer le poisson dans l’eau que les grandes entreprises emploient de nombreux porte-paroles.

Marco Diener, article publié sur Infosperber le 2 avril 2025, traduit et adapté par Bon pour la tête 


Récemment, Postfinance a publié un communiqué de presse dans lequel l’organisme financier de la Poste suisse écrit que, avec la stratégie 2025-2028, il se concentre désormais davantage sur les besoins financiers et la satisfaction de ses clients. Et d’ajouter: «Les segments de clientèle des particuliers et des entreprises ainsi que la création d’expériences client optimales sont au premier plan.»

Des «expériences client optimales»

Certes, ça sonne bien. Sauf que les clients de Postfinance aimeraient sans doute bien savoir ce qu’est une «expérience client optimale». Et là, impossible de trouver une explication.

Continuons quand même la lecture du communiqué de Postfinance: «Avec deux unités de distribution distinctes – les clients privés et les entreprises – et une unité axée sur l’expérience client – Customer Experience –, Postfinance envoie un signal clair: elle veut continuer à renforcer la qualité de ses conseils et de ses services. Postfinance accompagne ses clients privés avec des offres adaptées à leurs besoins tout au long de leur vie et lors de chaque événement. Postfinance soutient les entreprises dans leur quotidien opérationnel et dans la numérisation et la simplification de leurs processus de paiement.»

Toujours rien compris? Normal, c’est le but. Poursuivons donc: «Avec la mise en place du service Segment & Sales Steering, l’entreprise financière assure un pilotage des segments de clientèle et des canaux de distribution basé sur les données. Postfinance mise sur la continuité dans les unités ayant des fonctions transversales telles que Finance, Risk, Compliance & Legal ainsi que IT & Operations.»

Traduction: Postfinance annonce qu’elle va presser ses clients

Là, on en vient carrément à se demander si l’auteur lui-même comprend ce qu’il écrit… «Les unités restent largement inchangées et continuent à assurer la sécurité et la stabilité. L’unité Corporate Development assure le développement continu et durable ainsi que l’orientation flexible de Postfinance sur le marché.»

Bravo à vous, cher lecteur, chère lectrice, d’avoir tenu jusque-là! Cela en valait la peine. Car ce que Postfinance veut vraiment dire n’apparaît qu’à l’avant-dernier paragraphe du communiqué de presse: «Avec cette nouvelle structure organisationnelle, Postfinance réagit également aux changements du marché et à la volatilité des taux d’intérêt. Pour Postfinance, dont les revenus dépendent fortement des opérations d’intérêt, la baisse des taux d’intérêt rend plus difficile la perspective d’une reprise des marges. En se concentrant davantage sur les activités non liées aux taux d’intérêt et en réorientant son organisation, Postfinance peut contrer positivement cette évolution des taux d’intérêt.»

En d’autres termes: les affaires ne tournent plus rond. Il faut presser les clients pour obtenir plus d’argent!

Les chiffres parlent

L’expérience client et l’accompagnement des clients «avec des offres adaptées à leurs besoins tout au long de leur vie et en fonction des événements» sont plutôt négligés.

Les chiffres de Postfinance témoignent d’ailleurs que les affaires ne tournent plus rond. L’année dernière, elle a réalisé un bénéfice de 120 millions de francs suisses contre 223 millions trois ans auparavant, soit près de deux fois moins. Cela s’explique par le fait que le résultat des opérations d’intérêts a diminué de plus de 100 milliards de francs au cours de cette période. Et Postfinance veut en tirer davantage. Elle aurait pu le dire tout de suite.


Lire l’article original 

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

À lire aussi

Politique

La guerre entre esbroufe et tragédie

Une photo est parue cette semaine qui en dit long sur l’orchestration des propagandes. Zelensky et Macron, sourire aux lèvres devant un parterre de militaires, un contrat soi-disant historique en main: une intention d’achat de cent Rafale qui n’engage personne. Alors que le pouvoir ukrainien est secoué par les révélations (...)

Jacques Pilet
Politique

Etats-Unis: le retour des anciennes doctrines impériales

Les déclarations tonitruantes suivies de reculades de Donald Trump ne sont pas des caprices, mais la stratégique, calculée, de la nouvelle politique étrangère américaine: pression sur les alliés, sanctions économiques, mise au pas des récalcitrants sud-américains.

Guy Mettan
Politique

Bonnes vacances à Malmö!

Les choix stratégiques des Chemins de fer fédéraux interrogent, entre une coûteuse liaison Zurich–Malmö, un désintérêt persistant pour la Suisse romande et des liaisons avec la France au point mort. Sans parler de la commande de nouvelles rames à l’étranger plutôt qu’en Suisse!

Jacques Pilet
Politique

Ukraine: un scénario à la géorgienne pour sauver ce qui reste?

L’hebdomadaire basque «Gaur8» publiait récemment une interview du sociologue ukrainien Volodymyr Ishchenko. Un témoignage qui rachète l’ensemble de la propagande — qui souvent trouble plus qu’elle n’éclaire — déversée dans l’espace public depuis le début du conflit ukrainien. Entre fractures politiques, influence des oligarchies et dérives nationalistes, il revient sur (...)

Jean-Christophe Emmenegger
Politique

Pologne-Russie: une rivalité séculaire toujours intacte

La Pologne s’impose désormais comme l’un des nouveaux poids lourds européens, portée par son dynamisme économique et militaire. Mais cette ascension reste entravée par un paradoxe fondateur: une méfiance atavique envers Moscou, qui continue de guider ses choix stratégiques. Entre ambition et vulnérabilité, la Pologne avance vers la puissance… sous (...)

Hicheme Lehmici
Politique

Les BRICS futures victimes du syndrome de Babel?

Portés par le recul de l’hégémonie occidentale, les BRICS — Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud — s’imposent comme un pôle incontournable du nouvel ordre mondial. Leur montée en puissance attire un nombre croissant de candidats, portés par la dédollarisation. Mais derrière l’élan géopolitique, l’hétérogénéité du groupe révèle des (...)

Florian Demandols
Culture

La France et ses jeunes: je t’aime… moi non plus

Le désir d’expatriation des jeunes Français atteint un niveau record, révélant un malaise profond. Entre désenchantement politique, difficultés économiques et quête de sens, cette génération se détourne d’un modèle national qui ne la représente plus. Chronique d’un désamour générationnel qui sent le camembert rassis et la révolution en stories.

Sarah Martin
Sciences & TechnologiesAccès libre

Les réseaux technologiques autoritaires

Une équipe de chercheurs met en lumière l’émergence d’un réseau technologique autoritaire dominé par des entreprises américaines comme Palantir. À travers une carte interactive, ils dévoilent les liens économiques et politiques qui menacent la souveraineté numérique de l’Europe.

Markus Reuter
Economie

Notre liberté rend la monnaie, pas les CFF

Coffee and snacks «are watching you»! Depuis le 6 octobre et jusqu’au 13 décembre, les restaurants des CFF, sur la ligne Bienne – Bâle, n’acceptent plus les espèces, mais uniquement les cartes ou les paiements mobiles. Le motif? Optimiser les procédures, réduire les files, améliorer l’hygiène et renforcer la sécurité. S’agit-il d’un (...)

Lena Rey
Politique

Un nouveau mur divise l’Allemagne, celui de la discorde

Quand ce pays, le plus peuplé d’Europe, est en crise (trois ans de récession), cela concerne tout son voisinage. Lorsque ses dirigeants envisagent d’entrer en guerre, il y a de quoi s’inquiéter. Et voilà qu’en plus, le président allemand parle de la démocratie de telle façon qu’il déchaîne un fiévreux (...)

Jacques Pilet
Economie

Où mène la concentration folle de la richesse?

On peut être atterré ou amusé par les débats enflammés du Parlement français autour du budget. Il tarde à empoigner le chapitre des économies si nécessaires mais multiplie les taxes de toutes sortes. Faire payer les riches! Le choc des idéologies. Et si l’on considérait froidement, avec recul, les effets (...)

Jacques Pilet
Culture

Stands de spritz et pasta instagrammable: l’Italie menacée de «foodification»

L’explosion du tourisme gourmand dans la Péninsule finira-t-elle par la transformer en un vaste «pastaland», dispensateur d’une «cucina» de pacotille? La question fait la une du «New York Times». Le débat le plus vif porte sur l’envahissement des trottoirs et des places par les terrasses de bistrots. Mais il n’y (...)

Anna Lietti
Politique

Les penchants suicidaires de l’Europe

Si l’escalade des sanctions contre la Russie affaiblit moins celle-ci que prévu, elle impacte les Européens. Des dégâts rarement évoqués. Quant à la course aux armements, elle est non seulement improductive – sauf pour les lobbies du secteur – mais elle se fait au détriment des citoyens. Dans d’autres domaines (...)

Jacques Pilet
Politique

«Cette Amérique qui nous déteste»

Tel est le titre du livre de Richard Werly qui vient de paraître. Les Suisses n’en reviennent pas des coups de boutoir que Trump leur a réservés. Eux qui se sentent si proches, à tant d’égards, de ces Etats-Unis chéris, dressés face à une Union européenne honnie. Pour comprendre l’ampleur (...)

Jacques Pilet
Politique

Israël-Iran: prélude d’une guerre sans retour?

Du bluff diplomatique à la guerre totale, Israël a franchi un seuil historique en attaquant l’Iran. En douze jours d’affrontements d’une intensité inédite, où la maîtrise technologique iranienne a pris de court les observateurs, le Moyen-Orient a basculé dans une ère nouvelle: celle des guerres hybrides, électroniques et globales. Ce (...)

Hicheme Lehmici
Politique

La fin de l’idéologie occidentale du développement

Le démantèlement de l’USAID par Donald Trump marque plus qu’un tournant administratif: il révèle l’épuisement d’une idée. Celle d’un développement conçu par et pour l’Occident. Après des décennies d’aides infructueuses et de dépendance, le Sud s’émancipe, tandis que la Chine impose son modèle: pragmatique, souverain et efficace.

Guy Mettan