Trains suisses: «la pire détérioration de l’horaire de tous les temps»

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Les projets de l’Office fédéral des transports et des CFF commencent à sortir discrètement. Dans un charabia nébuleux. Côté rail, l’avenir va coûter cher aussi. 19 milliards prévus, peut-être réduits à 15. Pour aboutir à quoi? A une dégradation du trafic dès 2035! On croit rêver. Pas seulement pour les Romands. Les Alémaniques auront droit aussi à de nouveaux tracas. Ainsi il est prévu que les TGV de Paris n’iront plus jusqu’à Zurich mais seulement jusqu’à Bâle. Les trains rapides allemands, les ICE, idem, alors qu’aujourd’hui ils arrivent sur la Limmat, à Lucerne et quelques fois même jusqu’à Interlaken. Le trajet de Zurich à Vienne est déjà long, huit heures, il durera encore 40 minutes de plus à la suite d’une modification de tracé: il ne passera plus par St-Gall et St-Margrethen mais par Sargans. Quant au train EC de Munich, l’un des pontes des CFF propose qu’il finisse sa course à St-Gall, tant pis pour les Zurichois. Et là aussi il faudra compter une demi-heure de plus. En fait, les seules vraies améliorations planifiées sont celles entre Berne et Zurich et sur la ligne du Gotthard, à partir de Zurich.
Les Lucernois font aussi la grimace. Plus de trains directs vers la Suisse romande. Plus non plus entre Bâle, Lucerne et le Tessin. Le trafic transalpin vers le sud se fera principalement à partir de Zurich. Un train par heure vers Bâle au lieu de deux aujourd’hui. La modernisation en cours de la gare n’amènera guère d’amélioration.
Tous ces problèmes, dit-on, parce que le réseau ferroviaire suisse a mal vieilli et aussi en raison d’une mauvaise surprise. Les trains dits Dosto qui s’inclinent dans les virages – comme une moto! –, applaudis lorsqu’ils ont été commandés il y a une vingtaine d’années, aujourd’hui en service notamment entre le bassin lémanique et la Limmat, ces tortillards rapides ont déçu les attentes, de l’aveu même du directeur général des CFF. Ils sont inconfortables, mal adaptés au réseau actuel. Ils doivent donc ralentir. Tous les horaires s’en ressentent. Des améliorations techniques, fort coûteuses, sont envisagées, quelques corrections des voies aussi. Mais il semble bien que l’on aille vers l’abandon de cette technologie.
Les cantons commencent, timidement, à dire leur colère devant ces plans d’avenir foireux. La CITraP, communauté d’intérêts des transports publics, dénonce «la pire détérioration de l’horaire de tous les temps». Ajoutant en toute logique: «les 19 milliards de francs accordés par le Parlement jusqu’en 2035 pour l’extension du réseau ferroviaire doivent conduire à des améliorations pour les clients, et non à des détériorations ».
Ces plans à long terme n’ont pas encore été révélés officiellement. Il faut être un brin curieux pour les découvrir. Manifestement ce n’est pas ce qu’ont fait les parlementaires, déjà pris par la somnolence estivale. Ou obsédés par leurs manœuvres préélectorales. Se réveilleront-ils? Songeront-ils au bien public et pas seulement à leur carrière? Suivront-ils la suggestion du conseiller aux Etats Olivier Français, bien seul dans ce domaine, qui les voudraient plus «vindicatifs» selon ses termes à la radio?
Les trains helvétiques sont déjà les plus chers d’Europe. Les plus lents aussi, faute de lignes à grande vitesse. La perspective d’une nouvelle détérioration fait mal si l’on se souvient du génie ferroviaire d’autrefois. Quand à la fin du XIXème siècle, le rail se répandait partout, même jusqu’à tant de sommets. Vous souvenez-vous du l’Orient-Express qui reliait Paris à Istanbul avec un arrêt… à Territet? Les pionniers d’alors, pressés et audacieux, voulaient aller partout, plus vite et plus loin. On pense avec eux avec une singulière nostalgie.
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