Merci à toi, Francis, et à ton talent fou

Le gamin de Vevey, de milieu modeste, était déjà d’une vivacité exceptionnelle, ce qui lui valut une scolarité houleuse. Mais foin de diplômes! Son sens des images et des mots a fait de lui un cameraman, puis un metteur en scène de la trempe d’un Godard (qui l’a d’ailleurs salué tout récemment). On n’oubliera pas son «Grand Soir» (Palme d’Or à Locarno en 1976), ni son «Derborence» (1985), ni «La Guerre dans le Haut-Pays» (1999), ni «La Terre promise» (2014), ni les autres. Et son dernier film, «La Séparation des traces» (2018), qu’on l’ait apprécié ou pas sur le moment, nous restera en mémoire comme le parcours d’une vie rebelle qui donne aux autres l’envie d’oser.
Son oeuvre est un pied-de-nez à cette ribambelle d’apprentis cinéastes formés – ou formatés? – dans les écoles ad-hoc. Leurs films qui marquent? La main a trop de doigts pour les compter. Un talent à la Reusser, cela ne mûrit pas en bûchant sur un master.
L’homme bouillonnait comme dans son travail. Chaleureux – il aimait embrasser ses amis corps contre corps – ou alors boudeur, un brin fâché parfois, rigolard ou d’une gravité abyssale. D’une ténacité inouïe. Depuis deux ou trois ans, en dépit d’une première maladie qu’il surmonta, il mijotait un film sur Hodler qui nous manque. Un deuxième mal l’a frappé, a fini par l’handicaper dans ses mouvements. Mais à chaque visite, il se redressait et se lançait dans ses tirades propres à secouer les plus mous. Merci à ses amis qui l’ont entouré, à Jean-Louis qui l’a emmené, comme il le souhaitait près de la fin, faire un dernier tour en Alfa. Il a voulu mourir chez lui. Loin des porteurs de masques. Auprès de sa compagne, Manu, de son fils Jean. A tous deux, nous adressons ici une pensée amicale, reconnaissante, émue.
En 2018 pour Bon Pour La Tête, Amèle Debey et Diana-Alice Ramsauer avaient réalisé avec lui cette interview-vidéo autour de mai 68.
Souvenirs…
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