Le capitalisme woke a-t-il un avenir?

Publié le 14 avril 2023
Un voyage aux Etats-Unis est toujours instructif pour un Européen car il permet de découvrir les dernières tendances qui ne manqueront pas d’affecter notre continent. C’est parfait quand nous prenons le meilleur. C’est nettement plus problématique quand, par servilité mal placée, nous adoptons ce qu'ils produisent de pire. Le capitalisme woke par exemple, qui commence à faire des ravages chez nous.

Le sujet est en train de devenir un thème de la campagne présidentielle de 2024 aux Etats-Unis, tant l’engagement des grandes corporations pour les causes sociales, environnementales, climatiques, raciales, féministes, LGBTQUIA+ et en faveur de la «bonne gouvernance» parait désormais suspect. La faillite retentissante, début mars, de la Silicon Valley Bank, qui s’était dotée d’un «chief diversity officer» chargé d’organiser des «semaines trans» et des actions spéciales en faveur des minorités de genre et de race alors que la banque n’avait pas jugé utile d’avoir un «chief risk officer», n’a pas contribué à la cause, c’est le moins qu’on puisse dire.
Rappelons que le terme a été inventé en 2018, à la faveur des mouvements #BlackLivesMatter et #Metoo, et est apparu dans un article du New York Times publié par l’essayiste Ross Dhoutat pour désigner la propension des grandes corporations américaines à mettre en avant leur «conscience» sociale et environnementale pour mieux masquer leur opposition aux droits des travailleurs et à l’augmentation des salaires.
Comme la «finance durable», autre oxymore très en vogue dans les milieux progressistes libéraux, le capitalisme woke a connu un moment de grâce en 2019-2020 quand il a fait mine de vouloir appliquer les normes ESG (environnementales, sociales et de bonne gouvernance) définies par les objectifs du millénaire des Nations Unies. Aujourd’hui, la réaction s’organise et il est attaqué aussi bien par la gauche radicale que la droite conservatrice républicaine.
Les premiers se reconnaissent dans le livre de Carl Rhodes (Woke Capitalism. How Corporate Morality Is sabotaging Democracy) paru en novembre dernier et qui dénonce la privatisation de la morale publique par les corporations privées, notamment par le biais de la philanthr...

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