«Je me sentais comme un Ouïghour dans un camp de rééducation»

Publié le 17 juillet 2020

La PME suisse Schaer Proton, qui produisait ce type de machine pour un traitement de pointe du cancer, s’est vue pillée par ses prétendus partenaires chinois. De quoi servir de leçon… – © Schaer-Proton CH

La NZZ am Sonntag a relaté la mésaventure révélatrice d’une PME suisse, pillée par les Chinois. La firme Schaer Proton, spécialisée dans une technologie anti-cancer de pointe, a vu tous ses secrets s’envoler. Elle est en faillite.

Cette entreprise était toute sa vie: Hugo Schär, 72 ans, l’a fondée en 1979. Elle devint une référence internationale dans le domaine de la protonthérapie des tumeurs. Ces dernières années, elle nécessitait des investissements. Pas énorme: au moins un demi-million… Les banques se défilèrent. En 2017, le fondateur se tourne alors vers des investisseurs chinois. L’entreprise d’Etat China National Nuclear Corporation (CNNC) lui propose un partenariat. Tout paraît prometteur: des fonds, des débouchés en Asie. Avec un apport promis — par une poignée de mains — de 8 millions pour obtenir la majorité des actions. Le versement n’arrivera jamais. Un premier contrat, pour un hôpital de Tianjin, est signé. Trente nouveaux collaborateurs sont engagés. Mais aussitôt surgissent toutes sortes de tracasseries. Les représentants chinois au conseil d’administration en réfèrent pour tout à Pékin. Ils changent souvent. Hugo Schär est débordé. Les conflits se multiplient avec menaces juridiques à la clé. «Je me sentais comme un Ouïghour dans un camp de rééducation», confie aujourd’hui le septuagénaire argovien.

Un jour, le patron suisse découvre une communication de l’entreprise chinoise lors d’un symposium en Afrique du sud: toutes les technologies de Schaer Proton sont présentées sans mention de leur origine. Il comprend mieux pourquoi les Chinois s’intéressaient surtout à ce savoir-faire, à la liste des sous-traitants et des clients. Il constate aussi, un peu tard, que dans le registre du commerce chinois, la mention du «partenaire» helvétique n’apparaît nulle part.

La faillite est au bout de ce chemin semé d’épines.


L’article complet est paru dans la NZZ am Sonntag du 5 juillet 2020.

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