Allez comprendre! (suite)

Publié le 9 septembre 2022
L’autre jour nous nous interrogions sur une logique de guerre qui s’apparente plutôt à la déraison. Les annonces qui nous sont faites pour cet hiver nous laissent aussi perplexes. Comment diable les fournisseurs d’électricité peuvent-ils déjà fixer les prix de l’an prochain avec des hausses hallucinantes?

Les lois du marché, disent-ils. D’accord puisque ce domaine vital est largement privatisé. Mais les marchés, par leur nature même, montent et descendent au jour le jour. Il n’est pas impensable qu’au fil des mois la situation de crise se détende. Comme on l’a vu avec le prix du pétrole. Alors quoi? Les factures enfiévrées resteront au plus haut? Et pourquoi est-ce de la folie ici et plus raisonnable là? A croire que chaque pré carré commercial n’est pas connecté avec le proche voisin. Et comment expliquer que tel gros opérateur se trouve dans la panade et reçoive un crédit gigantesque de la Confédération (4 milliards!) alors que d’autres, importants aussi, s’en sortent bien? Energie Romande annonce même avec une belle sérénité que les prix baisseront… en 2024. 

Il faut dire que l’expert qui y voit clair dans cet embrouillamini n’est pas encore né. Même le spécialiste du domaine énergétique au Conseil national, Roger Nordmann, avoue que ce méli-mélo privé et public des dizaines de pourvoyeurs d’électricité est insupportable et qu’il y faudra mettre un peu d’ordre. Que n’a-t-il pas empoigné le problème plus tôt, dans les nombreuses années où il a siégé à Berne.

Le dossier de ce commerce international est certes compliqué. La Suisse exporte et importe à la fois du courant, selon les jours et les heures, pour répondre à ses besoins et à ceux des voisins. Nous sommes au centre d’un vaste réseau européen. Il y a quelques mois encore, les pontes du domaine se plaignaient abondamment que le sabordage de l’accord-cadre ait entraîné celui d’un autre accord, pourtant déjà convenu, celui sur l’électricité précisément. Car l’UE prévoit d’une part une solidarité sans faille et d’autre part que pour les trois quarts au moins, dans un avenir proche, la priorité sera donnée aux membres et aux associés. Bernique pour la Suisse. Si la France regimbe à nous fournir, au vu de ses propres difficultés, elle ne manquera pas d’invoquer cet argument. 

Bizarrement personne ne parle de ce pataquès. Pas même l’europhile Nordmann. Allez comprendre!

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