Printemps des syndicats, hiver des partis

Publié le 17 février 2023
Depuis des décennies, les syndicats français ne cessaient d’essuyer des pertes régulières d’effectifs. Mais depuis la polémique sur la réforme des retraites, ils enregistrent d’impressionnantes vagues d’adhésions. Dans cette lutte, ils ont pris nettement le pas sur les partis de gauche qui jouent à contre-temps. Les syndicats y sont devenus les seuls patrons crédibles de l’opposition.

Le syndicalisme français a égaré en cinquante ans la moitié de ses effectifs. Pertes régulières de substances et d’influence. En 2019, avant le Covid, seuls 10,3% des salariés déclaraient adhérer à une organisation syndicale, selon le ministère du Travail. Lorsqu’il s’agissait de revendiquer, nombre de travailleurs les contournaient pour constituer des «coordinations» qui ne vivaient que le temps de la lutte, souvent perdue.
Pendant la longue suite d’émeutes des Gilets Jaunes, les syndicats ont été priés par les protestataires de rester sur la touche, malgré les efforts déployés, notamment par la CGT, pour s’y introduire. L’utilité des syndicalistes semblait se limiter à la participation aux organismes paritaires d’où leur image d’apparatchiki ringards.
Hausse spectaculaire des adhésions
Et puis, voilà qu’ils reprennent vie depuis qu'Emmanuel Macron a voulu imposer sa réforme des retraites à un pays qui, manifestement (c’est l’adverbe qui convient!), n’en veut pas. Toutes les grandes centrales affichent des augmentations parfois spectaculaires de leurs effectifs depuis le début l’année.
Alors, certes, il faut prendre les annonces des dirigeants syndicaux pour ce qu’elles sont: des annonces non-vérifiées et difficilement vérifiables. Néanmoins, elles traduisent une tendance qui va dans le sens d’un accroissement significatif. La CFDT1 – premier syndicat de France et tête du mouvement de protestation contre la réforme des retraites – a engrangé 10'000 nouvelles adhésions depuis le début de cette année, soit une augmentation de 40%. La CGT annonce 7'215 nouveaux adhérents et FO, 5'000. 
Pourquoi ce regain après un demi-siècle de constante érosion? Les raisons, comme d’habitude, pullulent.
Emmanuel Macron à rebrousse-poil
Les conjoncturelles tout d’abord. Réformer les retra...

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