Notre inavouable nostalgie du sacré

Publié le 27 décembre 2024
Des films et des séries à gros budget ont récemment mis en scène et dramatisé des institutions qui, dans un passé encore proche, étaient entourées d'un sacre absolu, comme la papauté ou la monarchie anglaise. Ils masquent mal notre nostalgie collective.

Après la série Young Pope, et les films Two Popes ou Habemus Papam, nos écrans viennent de nous livrer Conclave, un film de l'Allemand Edward Berger sur la cérémonie du même nom. Impensables il n'y a pas vingt ans, par simple manque d'intérêt, ces œuvres filmées nous invitent à visiter le Vatican en coulisse. Servis par des acteurs de grande renommée − Jude Law, Anthony Hopkins, Michel Piccoli ou Ralph Fiennes − ces séries et ces films ont en commun de ne pas nous servir des actes d'accusation en règle contre la plus vieille institution de l'histoire. Pas un n'a la prétention d'être un réquisitoire, ni contre le Vatican, ni contre l'Eglise catholique, ni même contre la foi. Chacun explore, souvent avec un humour décalé et une authentique érudition, une facette ou l'autre de ces hommes et de ces rites d'un autre âge. Et c'est peut-être là que se trouve la clé de compréhension de toutes ces œuvres: elles n'ont même pas besoin d'être critiques. Manifestement, le mal est fait. Progrès scientifiques et scandales de pédophilie organisée aidant, l'église catholique est passée en moins d'un demi-siècle de force structurante de la société en hobby dominical pour une frange d'originaux − moins de 7% de la population de la France, autrefois fille aînée de l'Eglise.
Il en va de même pour une autre vénérable institution, la monarchie anglaise. La série à succès The Crown, les films The Queen ou The King's Speech explorent tous en détail les dessous de la cour de St James. Comme le Vatican, Buckingham est exploré avec des budgets titanesques, des acteurs célèbres et parvient à drainer des audiences record. Et comme dans le cas des papes, les monarques anglais sont dépeints comme des humains au destin extraordinaire mais sans acrimonie ou esprit de revanche. Il est certain que le sout...

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