Quand le Journal de Gustave Roud ouvre l’accès à toute l’Œuvre

Publié le 16 décembre 2022
Monument de l’édition romande actuelle, les Œuvres complètes de Gustave Roud constituent un merveilleux labyrinthe harmonique dont le troisième des quatre tomes – Journal de plus de 1'200 pages – est peut-être à parcourir en premier. Noël de lecture: cadeau!

L’amour est plus fort que la mort, pourrait-on se répéter une fois de plus à la lecture du Journal de ce tout jeune homme qu’était Gustave Roud en 1916, même pas vingt ans et tout était déjà là de l’enfance et de la séparation, de la conscience douloureuse et non moins source de joie, de l’absence ressentie aux larmes et de cette omniprésente évidence d’une lumière au beau milieu de la clairière de l’être; en novembre 1916 c’était la guerre une fois de plus et mondiale, et dans la troupe des jeunes hommes ce garçon se confrontait à une passion secrète n’osant dire son nom et se livrait en même temps à un afflux de tendresse ouverte à tout le vivant, s’affirmant comme une force vive en sa faiblesse même…
Oui, tout est tension dès les premières pages du journal de ce jeune poète qui d’emblée est plus qu’un «cher confident» à la manière confinée du cher Amiel, tout est déjà porté vers la poésie réellement agie autant que désirée, la moindre note est déjà comme un esquisse de poème et tout de la présence du monde, du village au paysage et de la solitude à la multitude – tout va vers le don et l’abandon avec une prodigieuse attention.
Amiel se morfond et se regarde en train de se regarder, et son journal se fera sur son sempiternel aveu d’impuissance, il commettra quelques poèmes – dont le trop fameux Roulez tambours! – sans se douter que sa vraie poésie est précisément dans son journal fluvial, tandis que celui de Gustave Roud n’est, en partie au moins, qu’une esquisse de l’œuvre, même si celle-ci se travaille ici aussi dans la foison de notes quotidiennes souvent merveilleuses, sur de multiples supports et avec d’incessantes reprises, comme un patchwork à paperolles.
La poésie, mais qu’est-ce donc pendant que Blaise Cendrars saigne au front? La poésie pour le jeune Gustave...

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