Pourquoi la voiture électrique est une absurdité écologique

Le premier élément à prendre en compte quand on s’intéresse au bilan et à l’impact de la voiture électrique, c’est le besoin en métaux. Comme l’expliquent très bien des spécialistes de la production minière, des métaux et de la mobilité tels que Philippe Bihouix, Aurore Stéphant ou Laurent Castagniède, la voiture électrique est une grande consommatrice de métaux, notamment de métaux rares, pour sa batterie. Or, l’appellation «métaux rares» ne vient pas de nulle part. Elle ne signifie pas que ces métaux ne se trouvent que dans quelques endroits sur la planète. On en trouve partout ou presque (voir le livre La guerre des métaux rares de Guillaume Pitron, Les Liens qui Libèrent, 2018). Mais cela signifie qu’ils sont en si petites quantités dans la croûte terrestre qu’il faut déployer des quantités monstrueuses d’énergie, d’eau et de solvants pour pouvoir les exploiter et les extraire du sol. A titre de comparaison, il faut plusieurs kilos de lithium, de cobalt, de manganèse ou de nickel pour fabriquer une voiture électrique de petite taille, alors qu’il n’en faut que quelques grammes pour un téléphone ou ordinateur portable1. Déjà que la production minière de ce type de métaux est un vrai problème humain et environnemental dans certaines régions du monde, imaginez l’effet rebond titanesque si toute l’humanité ne roulait plus qu’à l’électrique!
Les voitures traditionnelles consomment-elles également des métaux? Oui, bien entendu et de plus en plus avec l’ajout de fonctions numériques, mais forcément moins que les véhicules électriques, précisément à cause de la batterie.
Autre problème, la répartition de ces métaux (cobalt, lithium, manganèse, nickel) est encore plus réduite que celle du pétrole. Les meilleurs gisements, les plus rentables et facilement exploitables, ne se trouvent qu’à quelques endroits de la planète. Imaginez les conséquences géopolitiques, diplomatiques et stratégiques si une majorité de l’humanité devenait dépendante d’une ressource encore plus critique que le pétrole… Cependant, le principal problème écologique des voitures électriques se situe dans les processus de transformations.
En effet, pour construire les batteries et les différents éléments de ces voitures, il faut créer de nouvelles usines, qui utilisent beaucoup d’électricité, souvent carbonée (la Chine par exemple est encore principalement alimentée en électricité par des centrales à charbon). Idem pour l’Allemagne dont l’industrie automobile fonctionne en très grande partie grâce au gaz naturel. En voulant substituer le parc de voitures traditionnelles par de l’électrique, on crée de nouveaux besoins énergivores dans une situation de plus en plus tendue en raison de l’inflation, des effets de la pandémie, de la guerre en Ukraine, etc.
Au moment de son arrivée sur le marché, la voiture électrique est donc beaucoup plus polluante que la voiture traditionnelle2. Certes, mais se rattrape-t-elle à l’usage? Et bien pas forcément. En effet, pour recharger une voiture électrique, il faut la brancher au réseau. Or pour cela, il faut non seulement créer du courant supplémentaire sur le réseau, mais également mettre en place l’infrastructure nécessaire, comme les bornes de recharge, des câbles, des transformateurs, etc. Tout cela demande des ressources et des métaux, comme le cuivre par exemple, déjà dans un état particulièrement critique sur notre planète. Et au vu de la situation et des risques actuels sur le réseau électrique en Europe, sérieusement menacé par les coupures cet hiver, augmenter la demande via la démocratisation des véhicules électriques ne paraît pas être la meilleure des idées.
Enfin, la voiture électrique pose également des problèmes au niveau des libertés individuelles. Imaginez qu’en période de crise énergétique et de pénuries, un «pass énergétique», un rationnement si vous préférez, soit mis en place sur l’électricité. Il est alors possible que vous ne puissiez plus recharger votre véhicule à certains moments de la journée, qu’importe le prix du Kwh. Et avec tout le numérique à l’intérieur des nouveaux véhicules, il est aussi possible d’imaginer que votre nombre de kilomètres autorisés soit plafonné et que votre véhicule s’arrête tout simplement au bout d’un certain temps, qu’importe l’état de charge de la batterie. Ces scénarios sont tout à fait plausibles et vont directement à l’encontre de la liberté de mouvement.
Mais pourquoi donc ce mode de transport a-t-il été tant promu et défendu ces dernières années, notamment en Suisse via le documentaire «A contresens» de Marc Muller et Jonas Schneiter? Sans rentrer dans la polémique, il faut simplement observer que l’Occident a voulu s’acheter une conscience «écologique» pour maintenir son mode de vie (surconsommation, mobilité individuelle, etc.). Il a fallu pour cela externaliser en Chine ou en Afrique les conséquences désastreuses de celui-ci (travail des enfants, pollution des eaux, de l’air…) Marketing et lobbyisme ont été mobilisés pour faire passer l’idée que la transition énergétique est «verte», efficace, et passe par le renouvellement du parc automobile.
Pour conclure, il est vrai que la surconsommation de dérivés du pétrole, ressource qui n’est pas produite en Suisse, est un problème, à la fois écologique, économique (balance commerciale) et stratégique. L’indépendance énergétique de la Suisse ne se fera pas sans une sortie progressive de la dépendance au pétrole, notamment dans la motorisation. Cependant, la voiture électrique, en plus de ne pas être une solution durable et satisfaisante, crée d’autres problèmes, parfois plus difficiles à surmonter que ceux des hydrocarbures.
Pourtant, des alternatives existent et pourraient être beaucoup plus soutenues et financées par les constructeurs et les politiques. Premièrement, la sobriété et la rationalité dans les déplacements, afin de ne pas gâcher l’énergie, ressource de plus en plus rare de nos jours, en grande partie à cause de l’imprévoyance de nos dirigeants. Ensuite, la possibilité de créer d’autres types de carburants pour la motorisation, comme le pétrole bleu (fabriqué à partir d’algues qui captent le CO2 et sont raffinées) ou les véhicules à hydrogène. Ce ne sont pas les solutions qui manquent, mais la volonté politique et économique permettant de les diffuser au sein de la société. Espérons que la crise énergétique actuelle et à venir servira de leçon à l’Occident dans ce domaine.
1Voir l’interview d’Aurore Stéphant sur la chaîne «Thinkeview» à partir de 1h12’37.
2Voir le rapport de l’agence européenne sur l’environnement.
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