Feux d’artifice: pourvu que le Covid se prolonge

Publié le 3 août 2020

Cette année, pas de feux d’artifice… Mais finalement, ne pourrait-on pas s’en passer définitivement? – Le 1er août à La Tour-de-Peilz, 2015. © Lucas Roubaka Martinez

Et si, une fois pour toutes, on supprimait ces feux d’artifice du 1er août… La question n’est pas nouvelle, mais elle se pose d’autant plus aujourd’hui que les cordons des bourses communales risquent d’être serrés, inutile de préciser pourquoi. Alors posons-nous la question: pourquoi envoyons-nous encore chaque année des dizaines de milliers de francs en l’air?

Cet article est paru le 1er août sur Le Regard Libre


«Par ce que c’est joli», diront certaines et certains. Joli… vraiment? Des lumières de couleurs qui explosent dans le ciel accompagnées de gros bruits. Joli? Tenez-vous devant les néons d’un cabaret vétuste quelques instants et admirez l’effet, votre 1er août se terminera peut-être également avec des papillons dans le ventre.

«Ahhh mademoiselle, ce n’est pas parce que les feux d’artifice ne sont pas utiles qu’ils n’ont pas leur place.» Vous avez raison. Je suis même une fervente défenseuse des choses inutiles. Je vous invite volontiers à rester prostré quelques instants devant ma bibliothèque pour observer l’étendue de mon inutilité. On pourra même boire ensemble un verre de vin inutilement bon, en tenant des théories inutilement longues. Mais pour que le futile ait du sens, il faut encore qu’il soit bien réalisé. Et chers artificiers, on peut parfois se demander dans quelle direction vous avez projeté votre conscience professionnelle.

Justement, à votre tour messieurs-dames les professionnels de la pyrotechnie. Oui, vous vous plaignez d’une baisse drastique des commandes pour cette fête nationale. Les principaux feux ont été annulés un peu partout. Votre chiffre d’affaires a chuté d’environ 80% en Suisse cette année. Ayons s’il vous plaît une seconde réflexive: au plus profond du confinement, un certain nombre d’activités professionnelles ou de loisir avaient été citées comme irremplaçables, bénéfiques à notre société, souhaitables même. Faites la liste. Elle était longue, si je me souviens bien. Que les personnes qui auraient nommé «les feux d’artifice» dans leur choix personnel m’écrivent. Vraiment. «Les feux d’artifice.» Et pas de mauvaise foi rétrospective: j’aimerais bien profiter de quelques activités inutiles ces prochains jours sans répondre à vos mails.

«Les enfants adorent.» Ils adorent aussi taper sur leur petite sœur, sucer leur pouce, miauler lorsqu’ils ont faim, sont fatigués, ont envie de faire pipi, veulent regarder une vidéo pseudo-éducative sur l’iPad de papa ou acheter le même pantalon qu’Angèle. Ce n’est pas pour autant que l’Etat finance leurs caprices. Bien heureusement, certains ont grandi et se rendent compte que le Vésuve est un volcan en Italie et les fusées, un joujou nord-coréen et non une prestation sociale. Et ne me lancez pas sur ces apprentis sorciers qui dépensent leur futur treizième salaire pour épater les copains et les copines entre les noix de cajou-wasabi et la salade d’avocat.

Alors oui, on espère tous garder notre âme d’enfant (l’insouciance qui va avec, la peau douce aussi et les bonbons aux anniversaires). D’ailleurs, maintenant que vous me le dites… c’est vrai, moi aussi ça m’est arrivé d’apprécier un feu d’artifice. Une fois. Je m’en rappelle. C’était un 14 juillet.

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

À lire aussi

PolitiqueAccès libre

Pacifistes, investissez dans l’armement!

Le journal suisse alémanique «SonntagsZeitung» n’a aucun scrupule: dans sa rubrique Argent, il recommande désormais, avec un certain enthousiasme, d’acheter des actions dans le secteur de la défense… lequel contribue à la paix, selon certains financiers.

Marco Diener
Culture

Vallotton l’extrême au feu de glace

A propos de la rétrospective «Vallotton Forver» qui a lieu à Lausanne, dix ans après l’expo déjà mémorable du Grand Palais à Paris, et d’un petit livre d’une pénétrante justesse sensible de Maryline Desbiolles.

Jean-Louis Kuffer
Histoire

La Suisse des années sombres, entre «défense spirituelle» et censure médiatique

En période de conflits armés, la recherche de la vérité est souvent sacrifiée au profit de l’union nationale ou de la défense des intérêts de l’Etat. Exemple en Suisse entre 1930 et 1945 où, par exemple, fut institué un régime de «liberté surveillée» des médias qui demandait au journaliste d’«être (...)

Martin Bernard
PolitiqueAccès libre

Qui a des droits et qui n’en a pas, la démocratie à géométrie variable

Les votations cantonales vaudoises en matière de droits politiques, notamment pour les résidents étrangers, soulèvent des questions allant bien au-delà des frontières cantonales et nationales. Qu’est-ce qu’une communauté? Qui a le droit d’en faire partie? Qui en est exclu? Est-ce la raison et la logique ou bien plutôt les affects (...)

Patrick Morier-Genoud
SantéAccès libre

PFAS: la Confédération coupe dans la recherche au moment le plus critique

Malgré des premiers résultats alarmants sur l’exposition de la population aux substances chimiques éternelles, le Conseil fédéral a interrompu en secret les travaux préparatoires d’une étude nationale sur la santé. Une décision dictée par les économies budgétaires — au risque de laisser la Suisse dans l’angle mort scientifique.

Pascal Sigg
Politique

La neutralité fantôme de la Suisse

En 1996, la Suisse signait avec l’OTAN le Partenariat pour la paix, en infraction à sa Constitution: ni le Parlement ni le peuple ne furent consultés! Ce document, mensongèrement présenté comme une simple «offre politique», impose à notre pays des obligations militaires et diplomatiques le contraignant à aligner sa politique (...)

Arnaud Dotézac
Politique

Honte aux haineux

Sept enfants de Gaza grièvement blessés sont soignés en Suisse. Mais leur arrivée a déclenché une tempête politique: plusieurs cantons alémaniques ont refusé de les accueillir, cédant à la peur et à des préjugés indignes d’un pays qui se veut humanitaire.

Jacques Pilet
Economie

Le secret bancaire, un mythe helvétique

Le secret bancaire a longtemps été l’un des piliers de l’économie suisse, au point de devenir partie intégrante de l’identité du pays. Histoire de cette institution helvétique, qui vaut son pesant d’or.

Martin Bernard
Sciences & Technologies

Des risques structurels liés à l’e-ID incompatibles avec des promesses de sécurité

La Confédération propose des conditions d’utilisation de l’application Swiyu liée à l’e-ID qui semblent éloignées des promesses d’«exigences les plus élevées en matière de sécurité, de protection des données et de fiabilité» avancées par l’Administration fédérale.

Solange Ghernaouti
Santé

L’histoire des épidémies reste entourée de mystères et de fantasmes

Les virus n’ont pas attendu la modernité pour bouleverser les sociétés humaines. Dans un livre récent, les professeurs Didier Raoult et Michel Drancourt démontrent comment la paléomicrobiologie éclaire d’un jour nouveau l’histoire des grandes épidémies. De la peste à la grippe, du coronavirus à la lèpre, leurs recherches révèlent combien (...)

Martin Bernard
Sciences & Technologies

Identité numérique: souveraineté promise, réalité compromise?

Le 28 septembre 2025, la Suisse a donné – de justesse – son feu vert à la nouvelle identité numérique étatique baptisée «swiyu». Présentée par le Conseil fédéral comme garantissant la souveraineté des données, cette e-ID suscite pourtant de vives inquiétudes et laisse planner la crainte de copinages et pots (...)

Lena Rey
Politique

Les poisons qui minent la démocratie

L’actuel chaos politique français donne un triste aperçu des maux qui menacent la démocratie: querelles partisanes, déconnexion avec les citoyens, manque de réflexion et de courage, stratégies de diversion, tensions… Il est prévisible que le trouble débouchera, tôt ou tard, sous une forme ou une autre, vers des pouvoirs autoritaires.

Jacques Pilet
Santé

Le parlement suisse refuse de faire baisser les coûts de la santé

Chaque année, à l’annonce de l’augmentation des primes d’assurance maladie, on nous sert comme argument l’inévitable explosion des coûts de la santé. Or ce n’est pas la santé qui coûte cher, mais la maladie! Pourtant, depuis des années, une large majorité de parlementaires rejette systématiquement toute initiative en lien avec (...)

Corinne Bloch
Politique

Le déclassement géopolitique de la Suisse est-il irréversible?

Même s’il reste très aléatoire de faire des prévisions, il est légitime de se demander aujourd’hui ce que nos descendants, historiens et citoyens, penseront de nous dans 50 ans. A quoi ressemblera la Suisse dans un demi-siècle? A quoi ressembleront l’Europe, si elle n’a pas été «thermonucléarisée» entre-temps, et le (...)

Georges Martin
Politique

A confondre le verbe et l’action, on risque de se planter

De tout temps, dans la galerie des puissants, il y eut les taiseux obstinés et les bavards virevoltants. Donald Trump fait mieux. Il se veut le sorcier qui touille dans la marmite brûlante de ses colères et de ses désirs. Il en jaillit toutes sortes de bizarreries. L’occasion de s’interroger: (...)

Jacques Pilet
Philosophie

Notre dernière édition avant la fusion

Dès le vendredi 3 octobre, vous retrouverez les articles de «Bon pour la tête» sur un nouveau site que nous créons avec nos amis d’«Antithèse». Un nouveau site et de nouveaux contenus mais toujours la même foi dans le débat d’idées, l’indépendance d’esprit, la liberté de penser.

Bon pour la tête