Conversation avec une femme invisible

Publié le 20 octobre 2023

Publicité pour des services d’escort-girls. Nadia, qui s’exprime dans cet entretien, ne figure pas sur cet échantillon. – © DR

Lors d'une série de discussions sans fausse pudeur, une jeune escort-girl russe de 22 ans explique la réalité cachée de milliers de ses consœurs et compatriotes en Europe, que la guerre en Ukraine a piégées hors de chez elles.

Nous savons tous que Nadia existe. Nous choisissons simplement de l’ignorer, elle et ses collègues, ainsi que les raisons pour lesquelles ces travailleuses du sexe sont à la fois vilipendées et utiles. Nadia n’est que l’une des milliers d’escorts russes qui vivent et travaillent en Europe. Parce que la prostitution demeure souvent illégale, sa véritable identité est protégée. Et comme la prostitution est illégale, des milliers de femmes comme Nadia peuvent être brutalisées ou battues par leurs clients. La plupart sont impitoyablement exploitées par leurs agents et des propriétaires d’appartements véreux. Et les polices corrompues les harcèlent et les maltraitent, avec le pouvoir de les expulser du territoire. Mais Nadia ne se pose pas en victime, elle ne rejette pas la faute sur les autres. Elle a choisi son chemin. Comme la plupart des gens, elle travaille pour gagner sa vie et déteste souvent son travail. Mais il y a des moments où elle y trouve aussi du plaisir. Derrière son corps élancé, son maquillage épais, ses faux cils, ses ongles démesurés et son sourire timide, se cache une jeune femme déterminée et brutalement honnête qui s’est ouverte pour raconter son histoire aussi clairement qu’on pourrait le souhaiter.

David Laufer: Depuis combien de temps exerces-tu ce métier?

Nadia: Cela fait cinq ans maintenant. Au début c’était uniquement à Moscou, mais après quelque temps je me suis aventurée en Europe.

Au début, quelle était ta motivation pour te lancer dans ce métier?

J’avais besoin d’argent. Ma famille n’a pas d’argent...

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