«Le peuple contre la démocratie»: comprendre le populisme

Publié le 10 octobre 2018

On ne peut pas rester indifférent à la lecture du dernier livre d’un jeune maître de conférences en sciences politiques à l’université de Harvard, aux Etats-Unis, Yascha Mounk. – © DR

Dans son dernier livre qui vient de sortir en français et qui est en passe d'être un succès mondial, Yascha Mounk, jeune enseignant à Harvard d'origine allemande, cherche à en finir avec certaines idées reçues sur le populisme. Pour mieux le combattre. Son essai montre comment le pouvoir dans les démocraties modernes s'est éloigné du citoyen, comment la promesse d'une prospérité toujours mieux partagée a été rompue par la mondialisation, et comment la nation reste et restera probablement pour longtemps le seul espace dans lequel la démocratie peut vraiment se déployer. Appelant à «réparer l'économie» et à retrouver un «patriotisme inclusif», l'auteur ne cache pas que la lutte contre le populisme risque d'être ardue et n'est pas gagnée d'avance. Yascha Mounk se refuse néanmoins à désespérer de la démocratie libérale héritée des Lumières.

On ne peut pas rester indifférent à la lecture du dernier livre d’un jeune maître de conférences en sciences politiques à l’université de Harvard, aux Etats-Unis, Yascha Mounk. Le peule contre la démocratie, c’est le titre de son ouvrage qui vient de paraître en traduction française aux Editions de L’Observatoire*, peut sembler de prime abord rabâcher un thème connu. Celui du désarroi des élites libérales, politiques, académiques et médiatiques, devant ces élections qui, les unes après les autres, sur les deux rives de l’Atlantique, donnent l’avantage à des politiques nationalistes, isolationnistes et xénophobes dont le programme passe par le rabotage de l’Etat de droit patiemment développé au sortir de la Seconde Guerre mondiale – et par-là même, font craindre le pire.

Sauf que Yascha Mounk, lui, ne se contente pas d’une dénonciation éplorée mais lassante à force d’être répétée partout. Son analyse des causes du populisme et des maux qui, selon de nombreux observateurs, rongeraient nos démocraties, est d’une lucidité désenchantée jusqu’à en être implacable. Mais la manière, directe et très «grand public», dont l’auteur démonte nombre d’idées reçues et esquisse des pistes de solution se révèle finalement roborative.

La force de son livre vient du fait qu’au fil des pages, on sent bien que l’auteur nous raconte en réalité ses propres déconvenues intellectuelles. Ce n’est pas pour rien que son chapitre introductif s’intitule Perdre ses illusions. Tout paraissait en effet prédestiner le jeune chercheur à épouser les vues de ces élites libérales, progressistes et mondialisées dont il dénonce...

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