«The Irishman», le temps des adieux

Publié le 25 novembre 2019
Produit par Netfix, le nouvel opus de Martin Scorsese avec Robert De Niro, Al Pacino et consorts «rajeunis», est finalement sorti dans un réseau limité de salles. Ce film de mafia centré sur l'homme qui savait tout de la disparition du syndicaliste Jimmy Hoffa, en 1975, arrive malheureusement 20 ans trop tard.

Toute la planète cinéphile en salivait déjà, mais une partie enrageait. Quoi, le dernier Scorsese serait produit par Netflix, qui a pour politique de garder jalousement ses films en exclusivité pour les abonnés de son service de Streaming VOD? Scandaleux! Et comment «Monsieur cinéma» avait-il donc pu cautionner cette politique, lui qui ne jure que par le grand écran? Pour finir, The Irishman profite de la brèche percée par Roma et sort dans un réseau de salles très exclusif agréé par Netflix, dont le Cinerama Empire de Genève et le Bellevaux de Lausanne, pour la modeste somme de... 25 francs. Apparemment, c'était, et c'est, le prix à payer pour voir une dernière fois Robert De Niro, Al Pacino et Joe Pesci dans un film «monstre» de 3h30 qu'aucun autre studio n'était prêt à produire. Le chef-d'oeuvre de toute une vie?
N'y allons pas par quatre chemins: à part pour les fans indécrottables, la déception est à la mesure de l'attente. Il y a d'abord ce pacte faustien, qui prétendait révolutionner le cinéma en offrant à tout ce beau monde une nouvelle jeunesse. A l'arrivée, tous les miracle numériques n'y peuvent rien: même ainsi «reliftés», on devine constamment qu'il s'agit de septuagénaires avancés qui tentent vaillamment de donner le change. Sans parler du réalisateur, lui aussi en panne manifeste d'inspiration. Bien sûr, d'autres grands cinéastes ont plus ou mois réussi ce genre de films «somme» d'une ampleur inhabituelle (Ludwig, 1900, Il était une fois en Amérique, La Porte du Paradis). Sauf que Scorsese, lui, tente de le refaire (après Gangs of New York) tardivement dans sa carrière, en revenant sur le film de mafia, genre qui a assis sa renommée (Mean Streets, GoodFellas, Casino, The Departed).
Le muet qui parle
Le sujet choisi ne manquait pourtant pas d'atouts. Longt...

Ce contenu est réservé aux abonnés

En vous abonnant, vous soutenez un média indépendant, sans publicité ni sponsor, qui refuse les récits simplistes et les oppositions binaires.

Vous accédez à du contenu exclusif :

  • Articles hebdomadaires pour décrypter l’actualité autrement

  • Masterclass approfondies avec des intervenants de haut niveau

  • Conférences en ligne thématiques, en direct ou en replay

  • Séances de questions-réponses avec les invités de nos entretiens

  • Et bien plus encore… 

Déjà abonné ? Se connecter

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

À lire aussi

A Iquitos avec Claudia Cardinale

On peut l’admirer dans «Il était une fois dans l’Ouest». On peut la trouver sublime dans le «Guépard». Mais pour moi Claudia Cardinale, décédée le 23 septembre, restera toujours attachée à la ville péruvienne où j’ai assisté, par hasard et assis près d’elle, à la présentation du film «Fitzcarraldo».

Guy Mettan

Quand notre culture revendique le «populaire de qualité»

Du club FipFop aux mémorables albums à vignettes des firmes chocolatières NPCK, ou à ceux des éditions Silva, en passant par les pages culturelles des hebdos de la grande distribution, une forme de culture assez typiquement suisse a marqué la deuxième décennie du XXe siècle et jusque dans la relance (...)

Jean-Louis Kuffer

Locarno à l’heure anglaise: de belles retrouvailles

La rétrospective «Great Expectations – Le cinéma britannique de l’après-guerre (1945-1960)» du 78e Festival de Locarno n’a pas déçu. Dans un contexte de réadaptation à une économie de paix, le caractère britannique y révèle ses qualités et faiblesses entre comédies grinçantes et récits criminels. Grands cinéastes et petits maîtres ont (...)

Norbert Creutz

Jean-Stéphane Bron plaide pour une diplomatie «de rêve»

Plus de vingt ans après «Le Génie helvétique» (2003), puis avec l’implication politique élargie de «Cleveland contre Wall Street» (2010), le réalisateur romand aborde le genre de la série avec une maestria impressionnante. Au cœur de l’actualité, «The Deal» développe une réflexion incarnée, pure de toute idéologie partisane ou flatteuse, (...)

Jean-Louis Kuffer

Le sexe au cinéma: un siècle d’échecs

L’histoire du cinéma témoigne qu’il est souvent plus efficace de suggérer les rapports érotiques entre protagonistes plutôt que de les montrer crûment. D’autant qu’ils n’apportent souvent rien à la compréhension du scénario ni à la profondeur des personnages. Moins on en fait, plus on en dit.

David Laufer

Des Nymphéas au smartphone

Premier film de Cédric Klapisch présenté à Cannes en 35 ans de carrière, «La Venue de l’avenir» ne marque pas tant un saut qualitatif que la somme d’une œuvre à la fois populaire et exigeante. En faisant dialoguer deux époques, la nôtre et la fin du 19e siècle des impressionnistes, (...)

Norbert Creutz
Accès libre

Jean-Louis Porchet ou la passion créatrice

Le Lausannois et producteur de films est décédé à 76 ans. Il laisse derrière lui, outre de nombreux films renommés, le souvenir d’un homme audacieux et passionné dont la force de conviction venait à bout de tous les défis. Un exemple inspirant pour la culture suisse.

Jacques Pilet

Passer le flambeau de l’insoumission

Documentaire primé au dernier Festival de Soleure, «Autour du feu» de Laura Cazador et Amanda Cortés, réunit les anciens membres de la dite «Bande à Fasel» et des jeunes militantes anticapitalistes d’aujourd’hui pour comparer leurs idées et leurs expériences. Au-delà de son dispositif minimaliste, un film qui pose des questions (...)

Norbert Creutz

Quand la lettre et l’esprit de grands livres sont magnifiés sur les écrans

Deux chefs-d’œuvre de la littérature contemporaine, «Expiation» d’Ian McEwan, et «Cent ans de solitude» de Gabriel Garcia Marquez, passent au grand et au petit écran avec un rare bonheur. L’occasion de se poser quelques questions sur les transits souvent hasardeux des adaptations de toute sorte…

Jean-Louis Kuffer

Notre inavouable nostalgie du sacré

Des films et des séries à gros budget ont récemment mis en scène et dramatisé des institutions qui, dans un passé encore proche, étaient entourées d’un sacre absolu, comme la papauté ou la monarchie anglaise. Ils masquent mal notre nostalgie collective.

David Laufer

Leni Riefenstahl, mise au point

Son simple nom suscite des réactions épidermiques chez les uns mais ne dira sans doute plus rien aux autres. D’où l’intérêt de ce «Leni Riefenstahl – la lumière et les ombres», documentaire exemplaire signé Andres Veiel, qui récapitule à travers un magnifique travail sur archives le parcours de «la cinéaste (...)

Norbert Creutz

En quête d’un terroriste suisse

Le documentaire «La Disparition de Bruno Bréguet» du Tessinois Olmo Cerri tire de l’oubli une figure un peu gênante de notre histoire récente. D’une jeunesse à Locarno aux geôles israéliennes et du terrorisme international dans la nébuleuse Carlos à une mystérieuse disparition en Grèce, la dérive de Bréguet pose la (...)

Norbert Creutz

Et pourtant…

Avant-première à Lausanne. «Monsieur Aznavour» a su réunir jeunes et vieux. La salle est pleine. L’émotion grandit dans l’attente de la projection. Et puis le film commence. A la fin, échange avec l’équipe du film, fort sympathique au demeurant. Biopic à la hauteur? Certainement pas. Et pourtant, pourtant… Critique et (...)

Loris Salvatore Musumeci
Accès libre

Quand le cinéma se fait trans

«Close to You» enregistre la transformation de l’actrice hollywoodienne Ellen Page («Juno») en l’acteur Elliot Page. Après sept ans de silence, le revoici donc dans l’histoire d’un trans canadien qui retourne dans sa famille après une longue absence. Mais malgré cette plus-value d’authenticité, ce petit film indépendant, sensible et bien (...)

Norbert Creutz
Accès libre

Un clown peut en cacher un autre

Film d’une noirceur radicale, «Joker – Folie à deux» anime les conversations cinéphiles depuis sa sortie. En déjouant toutes les attentes après son brillant «Joker» de 2019, Lion d’Or surprise à Venise, Todd Phillips a frappé fort. Jamais sans doute film hollywoodien n’était allé aussi loin dans la déconstruction du (...)

Norbert Creutz

«Emmanuelle» 2024, le désir en question

Réinterprétation plutôt que remake, l’«Emmanuelle» d’Audrey Diwan avec Noémie Merlant surfe sur le vague souvenir du film-phénomène d’il y a 50 ans. Entre porno soft et discours féministe, ce film réimaginé à Hong Kong plutôt qu’en Thaïlande n’est pas sans intérêt. Mais son exploration d’un désir féminin enfin délivré du (...)

Norbert Creutz