Monsieur Macron, ceci n’est pas un référendum!

Publié le 21 décembre 2020
Le président de la République française veut consulter ses concitoyens pour intégrer la défense du climat et la préservation de l’environnement dans l’article 1er de la Constitution. Une manœuvre politique habile mais qui pourrait se retourner contre son initiateur.

«Ceci n’est pas une pipe», titrait René Magritte au bas de son tableau représentant une bouffarde des plus classiques. «Ceci n’est pas un référendum», est-on tenté d’ajouter à la suite de l’annonce émise par Emmanuel Macron qui veut consulter les Français pour intégrer la défense du climat et la préservation de l’environnement dans l’article 1er de la Constitution.
Si ce n’est pas un référendum que veut lancer le président français, alors de quoi s’agit-il? D’un plébiscite, procédure qui permet au chef de l’Etat de consulter le corps électoral pour légitimer ou relégitimer son pouvoir. Mais depuis son usage des plus abusifs par les deux Bonaparte, le plébiscite n’a plus bonne presse en France. On a donc banni le mot – pour le remplacer par «référendum» ­– mais gardé la chose.
Pas un «vrai» référendum
A la décharge d’Emmanuel Macron, il faut admettre que la Ve République ne connaît pas de véritable référendum au sens que lui donnent les pays où il est pratiqué: en Suisse, très largement; aux USA, au sein de plusieurs Etats; voire en Italie, en moindre mesure. Dans ce contexte, le référendum, c’est même l’inverse du plébiscite: c’est le peuple qui se saisit d’un objet pour changer une norme au sommet. Et non le sommet qui saisit le peuple pour changer une norme *.
En lançant son pseudo-référendum, le président Macron veut introduire au sein de l’article 1er de la Constitution française cette norme: La République garantit la préservation de la biodiversité, de l'environnement et la lutte contre le dérèglement climatique.
Voilà qui ne mange pas de pain, même bio, et qui n’engage pas à grand-chose. Certes, après avoir dénoncé le caractère politicien de la manœuvre, nombre d’élus verts estiment que cet ajout constitutionnel permettrait de mieux étayer les nombreux procès qui ...

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