Le beau roman qui ressaisit un accompagnement vital

Publié le 24 mai 2024
Un voisinage banal que la maladie transforme en relation aussi profonde que superficielle en apparence: c’est la trame du nouveau livre de Catherine Lovey, intitulé «histoire de l'homme qui ne voulait pas mourir» et gratifié du Prix Dentan 2024. Un roman-miroir qui nous renvoie à chaque page à nos vies et aux liens se tissant avec notre trop souvent lointain prochain.

Nous sommes entourés de gens auxquels rien ne semble devoir nous attacher, et pourtant nous nous attachons à eux sans trop savoir pourquoi, comme la narratrice de l’histoire de l'homme qui ne voulait pas mourir s’attache à son voisin de palier, ce Monsieur Sándor à la fois présent et distant, apparemment consentant à tous les accommodements sociaux, pas vraiment sympathique au premier abord quoique courtois, platement ouvert au monde en sa situation de conseiller financier voyageant beaucoup même en temps de pandémie et qui, en sa qualité de personnage de roman, nous intrigue et nous attire à notre tour, lecteurs, par les surprises constantes qu’il nous ménage autant qu’à la narratrice.
De celle-ci, nous ne saurons pas grand-chose, sinon par ce qu’elle raconte de cet homme dont elle apprend bientôt qu’il est d’origine hongroise, que son expérience juvénile du communisme l’a blindé contre certaines illusions «idéalistes» et autres mensonges de l’idéologie «politiquement correcte», mais on verra que rien n’est vraiment si convenu que ça chez lui, pas plus que chez la narratrice dont les préjugés plutôt progressistes n’excluent pas une plasticité d’adaptation relevant de l’empathie, voire d’une croissante affection dont on ne saurait dire qu’elle relève de la pitié inspirée par le délabrement physique et l’affaiblissement réel de celui-là même qui, crânement, voudrait faire comme si de rien n'était.
Comme une sismographie romanesque
De quoi parle exactement l’histoire de l’homme qui ne voulait pas mourir, qu’introduisent deux exergues éclairants: le premier tiré du mémorable Journal de l’auteur hongrois Sándor Márai, et l’autre d’une des plus belles nouvelles de Tolstoï, La Mort d’Ivan Illitch? 
De notre façon de réagir à l’annonce de notre disparition prochaine, telle que...

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