La propagande de guerre, des principes bien rodés depuis un siècle

Publié le 15 mars 2024
Dans toutes les guerres modernes, d’énormes moyens de communication sont déployés par les gouvernements pour convaincre leurs populations du bien-fondé de leur engagement belliqueux. Je me suis entretenu récemment sur ANTITHÈSE avec l’historienne belge Anne Morelli, qui a recensé dix principes élémentaires de propagande toujours utilisés par les gouvernements.

Bien sûr, la propagande a toujours existé. Dans l’Antiquité, les empereurs romains n’hésitaient pas à l’employer au sujet des guerres avec les peuples «barbares» d’Europe. Dans ses Commentaires sur la guerre des Gaules, par exemple, Jules César enjolive ou minimise certains faits à son avantage. On peut considérer que tout l'art de César à cet égard a été de parvenir à un équilibre subtil en présentant les choses à son avantage sans perdre sa crédibilité par des manipulations excessives de la réalité.
La propagande moderne, cependant, est née lors de la Première Guerre mondiale. Des services dédiés ont alors inventé la plupart des techniques utilisées aujourd’hui. Edward Bernays, le père des relations publiques, a travaillé dans l’un de ces services: la «Commission Creel». Cette dernière a été créée le 14 avril 1917 (après l'entrée en guerre des USA le 6 avril) par le président Wilson pour mettre sur pied un arsenal mental, une machinerie destinée à retourner l'opinion publique américaine et à accompagner l'effort de guerre, faisant de la propagande durant la Première Guerre mondiale les prémices d'une «science». Les techniques modernes de communication et le développement des nouvelles technologies n’ont fait que rendre cette propagande plus efficace et raffinée. Elle est élaborée par des officines opaques ou de grands groupes de RP, tels Hill & Knowlton, qui a orchestré l’affaire des couveuses koweïtiennes en 1990.
Les grandes lignes de cette science ont été identifiées dès la fin de la guerre de 1914-1918 par un Britannique et militant pacifique, fils du secrétaire particulier de la reine Victoria: Arthur Ponsonby (1871-1946). En 1929, il publie un ouvrage de référence peu connu: Falsehood in Wartime, dans lequel il identifie certains principes clés de la propagande ...

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