Abus dans l’Eglise: le rôle du secret dans le droit canon

Publié le 1 décembre 2023
Après la publication le 12 septembre du rapport qui a documenté plus de mille cas d’abus sexuels dans l’Eglise catholique romaine en Suisse depuis le milieu du XXème siècle, des hauts prélats ont été inquiétés, et des victimes se sont exprimées. Dans ce climat difficile, l’Eglise a pris différentes initiatives. L’une d’entre elles n’a pas beaucoup attiré l’attention. Elle aurait pourtant le potentiel de révolutionner la tant décriée culture du secret de l’Institution.

Les abus sexuels posent un problème grave. Une étude de 2012 estimait qu’en Suisse 20 à 30% des jeunes de moins de 18 ans ont été victimes d’une agression sexuelle avec contact physique. Ces violences sont le plus souvent commises profitant d’une confiance mal placée. Ce sont des adultes de référence, des enseignants, des médecins, des prélats proches des victimes qui commettent les abus. Pour combattre le problème il est important de le reconnaître et d’en parler. Il faut donc saluer le fait que la Conférence des évêques suisses (CES), la Conférence centrale catholique romaine de Suisse (RKZ), et la Conférence des Unions des Ordres et des autres communautés de vie consacrée en Suisse (KOVOS) aient ensemble décidé de confier le mandat à des historiennes et des historiens de l’Université de Zürich pour une étude qui retrace l’histoire des abus sexuels dans le contexte de l’Eglise catholique depuis la moitié du siècle passé. Il était grand temps que ces organisations, qui servent un peu moins de 3 millions de fidèles, emboîtent le pas de leurs homologues dans d’autres pays, notamment en France et au Portugal.
Un problème complexe
De nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer des responsabilités individuelles, en premier lieu de ceux qui exercent des fonctions importantes dans cette institution très hiérarchisée. Ces hauts responsables, évêques ou administrateurs, auraient permis de couvrir des agissements répréhensibles en déplaçant des prélats, en occultant des preuves, ou en négligeant d’instruire correctement des cas avérés. Il est certain que de tels agissements ont eu lieu; il serait simpliste de penser qu’ils expliquent l’étendue du problème.
Certains pointent des dysfonctionnements plus structurels. On reparle du célibat des prêtres, et du rôle des femmes dans l...

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