Les insondables dégâts de la bureaucratie

Publié le 28 septembre 2020
Le bureaucrate, par définition, a pour un univers un écran d’ordinateur. Et les tableaux qu’on lui a mis sous le nez. Mesure-t-il les vastes conséquences des décisions qu’il tire de ces données? Pas sûr. On peut les juger pertinentes ou pas. Mais les a-t-on considérées au regard de leurs effets? L’OFSP donne plutôt l’image d’une machine lourde, attardée, hésitante, qui tourne sur elle-même.

L’excellent Michel Guillaume en donne une vision détaillée et accablante dans Le Temps, journal peu porté à la polémique. Cet organe, avec ses 600 collaborateurs, ses 160 millions de budget annuel, a notamment pour mission de rapporter l’état du système de santé en Suisse. Or ce dernier patauge avec un appareil informatique désuet. Il accumule les erreurs. Dirigé depuis vingt ans par un homme affable mais dépourvu de vision, apparemment atteint d’un mal courant dans l’administration fédérale: la procrastination. Il prend enfin sa retraite et sera remplacé par une Bâloise que l’on dit énergique. Mais il faudra des années pour mettre la machine sur des rails performants.
On est ici bien au-delà de la polémique sur les masques, bien que celle-ci devienne hypersensible. Les mesures d’isolement du pays le frappent au coeur de sa fonction vitale: les échanges internationaux. Imposer la quarantaine aux voyageurs en provenance de Paris, de la Belgique, de la Grande-Bretagne et d’autres régions, est-ce vraiment une nécessité sanitaire au moment où la pandémie ne fait quasiment plus de morts chez nous? Les avis sont partagés, même chez les experts. Ce qui est sûr, c’est qu’il s’agit d’un coup de poignard de plus à une économie touristique déjà exsangue.
Prenez le cas de Genève. Déjà privée d’hôtes asiatiques et américains, la voilà coupée des Parisiens, des Londoniens, des Bruxellois! Sans le brassage international, elle est condamnée à l’asphyxie. Certes lente, non moins nocive. Bizarrement, les Genevois semblent peu s’en préoccuper et ne vont pas sonner les cloches à Berne. Déni peut-être explicable par le nombrilisme, le regard à court-terme. Ou alors par l’ampleur du mal qui fait peur et reculer. Au bout du lac, on préfère s’échauffer sur les pistes cyclables ou sur le tour...

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