En Slovaquie, un populiste chasse l’autre

Publié le 10 mars 2020
La sanction était annoncée, elle est tombée. Samedi 29 février, aux élections législatives, le parti au pouvoir depuis 14 ans en Slovaquie, le SMER-SD populiste et classé à gauche, a été balayé par OL’aNO, populiste aussi, mais classé à droite. Le SMER, incarné par l’ancien Premier ministre Robert Fico et le Premier ministre sortant Peter Pellegrini, réalise le plus mauvais score de son histoire: 18,2% et 38 sièges sur 150, 11 de moins qu’à l’issue du scrutin de 2016.

Depuis deux ans, et le double assassinat du jeune journaliste d’investigation Ján Kuciak et de sa fiancée Martina Kušnírová dans leur maison à 65 kilomètres de Bratislava, le paysage politique slovaque est en pleine recomposition. De gigantesques manifestations pacifiques et populaires se sont organisées partout dans le pays pour réclamer la démission du gouvernement, mouillé jusqu’au cou dans des affaires de corruption et de trafics en tous genres avec la mafia calabraise, la ‘Ndrangheta. C’est sur ces affaires qu’enquêtait Ján Kuciak, ce sont ces affaires qui lui ont coûté la vie. 
Robert Fico, poussé à la démission par la rue, avait été remplacé par son alter-ego Peter Pellegrini; cela n’a pas suffit à convaincre. Le SMER-SD («direction» - «sociale-démocratie») a payé ses liens avec la mafia et en particulier avec l’homme d’affaires sulfureux Marian Kocner, actuellement en procès, accusé d’être le commanditaire du double meurtre de février 2018, et condamné dans un autre dossier à 19 ans de prison pour fraude. 
«S’il n’y avait pas eu ce meurtre, je serais aujourd’hui devant vous comme Premier ministre avec un soutien de 30% des électeurs» a amèrement analysé Robert Fico. Malgré des promesses électoralistes en toute fin de campagne, comme le doublement des allocations familiales ou un treizième mois de retraite, il a été forcé de reconnaître sa défaite. 

Hommages à Ján Kuciak et Martina Kušnírová, Bratislava, mars 2018. © M. Céhère
Grand nettoyage
Les Slovaques votent tous les 4 ans pour renouveler le Parlement monocaméral, appelé Conseil national de la République slovaque, composé de 150 sièges. Le pays, de 5 millions d’habitants, indépendant et séparé de la République tchèque en 1993, membre de l’UE depuis 2004, et seul du groupe de Visegrád (Pologne, Tchéquie, Hon...

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