Bertil Galland, témoin d’une Suisse romande en pleine mutation

Publié le 13 décembre 2018

Bertil Galland lors d’une lecture à Delémont, le 19 octobre 2017. – © Twitter @csalvade

Ce n’est pas n’importe quel homme qui publie huit tomes aux Editions Slatkine. Tour à tour journaliste et éditeur, Bertil Galland est avant tout un amoureux des mots. La Suisse romande, il l’a vécue. Il en fut à la fois l’acteur et le spectateur. Dans «Destins d’ici», son dernier tome, Bertil Galland livre le portrait de personnalités romandes de premier plan. Certaines furent ses amis, d’autres de simples connaissances. Toutes nous aident à comprendre le destin de notre petit coin de pays.

La lecture de Destins d’ici: Mémoires d’un journaliste sur la Suisse du XXe siècle est à la fois légère et exigeante. Porté par un certain humour et une bonne humeur certaine, l’ouvrage qui clôt la série de Bertil Galland fait le récit de trois mondes entrelacés – les médias, la littérature et la politique – dessinant le relief de la Suisse romande de la seconde moitié du XXe siècle et du début du XXIe. Ce livre nécessite donc une attention accrue et une curiosité envers une diversité de domaines. En somme, le journaliste s’y sent comme un poisson dans l’eau. Et il en apprend beaucoup sur son activité, qui s’incarne dans une histoire romande.

Journalisme et littérature

Bertil Galland, en bon amoureux des mots, consacre des lignes incroyables au début de son chapitre sur certains périodiques littéraires oubliés par les contemporains. On y (re)découvre, entre autres récits, la destinée de la Gazette littéraire, ayant peu à peu gagné son indépendance de la Gazette de Lausanne, dont elle était le supplément du samedi. Plus que de nous rappeler que la Gazette littéraire était le principal organe d’information culturelle en Suisse romande, l’homme de lettres nous en relate les péripéties. Mais aussi, et surtout, il nous fait sentir l’esprit qui y régnait. Notamment en racontant l’adresse et le courage du critique littéraire Franck Jotterand.

«Il sut résister à la tendance des intellectuels d’après-guerre à une soumission complète aux conformismes parisiens. […] Plus d’une star étrangère, ignorée du...

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