Quand le «Tout» abuse par trop des généralités négatives

Publié le 14 mars 2025
Dystopie évoquant l’emprise globale d’un empire numérique à l’américaine, le dernier roman de Dave Eggers, après «Le Cercle», tient de la visite guidée aux enfers suaves du virtuel pavés de bonnes intentions imposées à chacune et chacun par le nouveau Big Brother. Bien vu dans une foison de détails, dont l’accumulation contraste hélas avec le vide des personnages «juste sympas »…

Les grandes contre-utopies de 1984 et du Meilleur des mondes continuent de faire de George Orwell et d’Aldous Huxley nos contemporains, entre autres visionnaires d’un avenir plus ou moins radieux annonçant, après Baudelaire, Dostoïevski ou Nietzsche, poètes-visionnaires, la déshumanisation de l’homme par la Technique, la Machine et la Masse − et le XXe siècle aura vu proliférer le phénomène global, tant par ses réalités que par le développement virtuel de celles-ci, dont l’image céleste du Nuage numérique fait figure de symbole et même plus…
Or cet écosystème apparemment impalpable, et combien réel pourtant, conserve un «visage humain» qui devrait intéresser les écrivains autant que les ingénieurs-entrepreneurs folâtres à la Elon Musk, n’était-ce que pour l’évaluer en termes personnels possiblement non alignés alors même que l’Evaluation devient l’obsession du nouveau système «total», pour ne pas dire «totalisant» ou «totalitaire», ainsi d’ailleurs que le détaille à foison le dernier roman de Dave Eggers, intitulé précisément Le Tout.
Achevé en 2021 par son auteur quinqua, The Every (titre initial signifiant exactement le «chaque» plus que «le tout») constitue la suite directe, cinq ans après quatre autres publications, du roman à succès Le Cercle (Gallimard, 2016) adapté au cinéma par James Ponsoldt (avec Emma Watson et Tom Hanks dans les rôles principaux) dans lequel Dave Eggers brossait une première fresque du même univers médiatico-numérique où l’on suivait une jeune femme du nom de Mae Holland, engagée dans la mégaboîte californienne du Cercle issue de la fusion des géants de la tech (Google, Facebook et Apple) dont elle découvrait, fascinée, le pouvoir de «persuasion clandestine» et d’emprise croissante sur les individus sous prétexte de transparence excluant tout...

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