Œuvre cherche auteur

Publié le 15 août 2019

Jugé «racoleur» par le principal intéressé, L’œuvre sans auteur est un joli film formel, pédagogique, esthétisant par moments. – © DR

En 1937, à Dresde, le jeune Kurt Barnet visite, avec sa tante Elisabeth, l’exposition Entartete Kunst, «art dégénéré». Le guide, en uniforme et casquette, explique que «ce genre de troubles psychiques et visuels» n’a pas sa place dans l’art – lequel doit, évidemment, célébrer la beauté, la pureté, la vérité, la force (etc.) de la race allemande. Elisabeth s’attarde devant un Kandinsky, apprécie, le confie à son neveu sous le sceau du secret. Presque tout est (déjà) dit. Un peu plus tard, Elisabeth, sorte de muse du jeune garçon, se voit contrainte de remettre un bouquet de fleurs à Hitler lors de sa visite officielle à Dresde. Ç’en est trop: elle pique une violente crise de nerfs, une sorte d’épiphanie musicale et esthétique, à laquelle assiste le jeune Kurt, et qui s’achève par l’internement de la jeune femme dans une clinique. Clinique dirigée par le médecin SS Carl Seeband, qui procède à sa stérilisation, puis à son euthanasie, moyen d’éviter la «contamination». Et ainsi de suite.

L’œuvre sans auteur, film en deux parties de Florian Henckel von Donnersmarck (La Vie des Autres) inspiré de la vie et de l’œuvre – mais surtout de la vie – du peintre Gerhard Richter est incontestablement un excellent documentaire artistique et historique. La nazification progressive et plus ou moins forcée de la famille Barnet, qui fait porter au petit Kurt un uniforme de SA miniature, le bombardement de Dresde, l’arrivée des Soviétiques, la fuite vers l’ouest par la gare de Friedrichstrasse après la...

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