Les mots pour ne pas le dire

Publié le 27 juin 2017

Raymond Soubie, sur le Plateau de «C dans l’air».

Emmanuel Macron va s’attaquer à la réforme du code du travail. Cela promet quelques affrontements, politiques et dans la rue. Pour expliquer les subtilités de certains des changements prévus, «C dans l’air» a réuni, comme d’habitude, des experts. On ne comprend pas toujours très bien ce qu’ils veulent dire.

«Code du travail, la réforme sans la révolte?», s’interrogeait hier C dans l’air. Sur le plateau de Caroline Roux, les experts du jour ont tenté de répondre à cette question. Commençant par expliquer qu’Emmanuel Macron avait besoin d’un affrontement avec la rue pour asseoir sa figure présidentielle, selon Christophe Barbier, directeur de L’Express. Qu’il avait surtout besoin du mécontentement des syndicats comme preuve qu’il menait bien les réformes promises pendant la campagne électorale, à modéré Raymond Soubie, «expert en gestion des ressources humaines et des politiques sociales, président des sociétés de conseil Alixio et Taddeo, conseiller social à l’Elysée auprès de Nicolas Sazkozy de 2007 à 2010». Un expert, un vrai de vrai.

CDI ou CDD ? C’est surtout flou…

Ensuite est arrivé le moment d’aborder les modifications qui vont concerner le CDI, le contrat de travail à durée illimité auquel tiennent particulièrement la CGT et Jean-Luc Mélanchon. Emmanuel Macron  veut autoriser un «contrat de projet», qui sera «un CDI s’arrêtant avec la fin de la mission pour laquelle le salarié a été engagé», une disposition soutenue par le MEDEF, le syndicat patronal.

«Le CDI de projet n’est-il pas plutôt un CDD (contrat à durée déterminée, ndlr.) de projet?», demande alors Caroline Roux. Voilà la réponse que lui a faite Raymond Soubise: «Le CDI de projet est à la fois plus souple que le CDI et plus protecteur que le CDD. Le CDI de projet est une forme de CDD qui peut durer aussi longtemps que le projet et donc qui sort du cadre juridique du CDD. C’est un CDD, certes, mais sans les contraintes du CDD. Donc à la fois c’est plus souple pour le chef d’entreprise et c’est quand même plus protecteur pour le salarié. Pas autant que le CDI, mais plus que le CDD.»

Parole d’expert, donc, qui lui-même ne semble plus savoir faire la distinction entre CDI et CDD. Beaucoup de mots pour ne pas dire grand-chose. Parce que, jusqu’à preuve du contraire, un contrat dont la durée est limitée dans le temps par la durée d’un projet, ce ne peut pas être un contrat à durée illimitée.

Le CDI de projet est donc un oxymore macronien, censé agir comme la vaseline.

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