Le Tour de France de passage en Suisse, quel impact?

Publié le 8 juillet 2022
Ce week-end, le Tour de France fait escale en Suisse romande pour deux étapes consécutives, une arrivant à Lausanne ce samedi et l’autre partant depuis Aigle le lendemain. Au-delà de l’aspect «événement sportif» et fête populaire pour les habitants qui vont voir passer et accueillir la plus grande course cycliste du monde, quel est l’impact pour une région qui accueille pour quelques étapes le Tour de France?

Ces dernières années, à chaque fois que le Tour de France passe en territoire étranger, c’est un événement, une fête populaire. Dernier exemple en date, le Grand Départ du côté du Danemark pour cette 109ème édition. Des centaines de milliers de personnes au bord des routes lors de chaque étape et un succès considérable pour les organisateurs. Car ne nous y trompons pas, le Tour de France n’est pas une course cycliste comme les autres. Recevoir le Tour de France dans sa région pour une ou deux étapes, c’est comme avoir les Jeux Olympiques le temps d’un week-end en terme d’exposition médiatique! Rendez-vous compte: des images retransmises dans plus de 190 pays dans le monde, des centaines de médias nationaux et internationaux, des milliers de journalistes, des dizaines de millions de vues sur les réseaux sociaux, des hélicoptères qui filment la région pendant des heures, des images des principaux monuments ou ouvrages d’art, etc. 

En terme de publicité à ciel ouvert, difficile de faire mieux que le Tour de France et cela, les organisateurs et les responsables du tourisme des différentes régions l’ont très bien compris. Ce week-end, même si ses sportifs ne brillent pas, la Suisse sera au centre de l’attention médiatique et sportive du monde à l’occasion des deux étapes qui passent par nos régions. La Vallée de Joux, Lausanne comme capitale olympique, Aigle et le siège de l’UCI, le château de Chillon, la Riviera, les vignobles en terrasse du Lavaux, la Gruyère, le Pays d’Enhaut et le Val d’Illiez seront mis en avant dans le monde entier si la météo est au rendez-vous. Une carte de visite exceptionnelle pour une bonne partie de la Romandie, qui peut s’attendre à des retombées économiques substantielles dans le secteur touristique à court et moyen termes.

Cependant, tout cela a un prix et l’entreprise ASO, qui organise le Tour de France, se rentabilise en faisant payer relativement cher aux villes de départ et d’arrivée leur présence sur le parcours. Plus de 65’000 euros pour un départ d’étape, plus de 120’000 pour une arrivée, plus de 160’000 pour être ville départ et arrivée. Tout cela sans compter ce qu’il faut investir dans la logistique d’organisation de l’épreuve phare du mois de juillet. Sécurité, nettoyage, aménagement de la signalisation routière, implantation du village-départ, réfection des routes, locations, etc. Tout cela représente un budget qui, en temps de difficultés économiques, peut faire réfléchir et gronder une partie des élus et représentants municipaux. D’autant plus qu’il n’y pas le droit à l’erreur! En effet, les villes et régions se bousculent chez ASO pour avoir la chance d’accueillir le Tour de France et si l’organisation n’est pas au top, difficile d’imaginer l’organisateur vouloir revenir rapidement dans une province étrangère au territoire tricolore pour y faire passer une ou plusieurs étapes. Pour preuve, bien qu’étant un pays frontalier d’avec la France et possédant un terrain propice à la pratique du cyclisme, il n’y a eu que 33 villes départs et arrivées d’étapes en Suisse depuis 1947 et le premier Tour d’après Seconde guerre mondiale. La dernière fois, c’était en 2016 pour une arrivée spectaculaire en haut du barrage d’Emosson vers Finhaut. Il semble d’ailleurs qu’ASO apprécie de plus en plus la Suisse pour y organiser des étapes car la fréquence des apparitions du Tour en Suisse a sensiblement augmenté depuis la fin des années 2000 (rien entre 2001 et 2008 puis 4 passages entre 2009 et 2022). 

Ne boudons donc pas notre plaisir de voir notre région profiter de l’exposition exceptionnelle qu’offre le passage du Tour de France. Nul besoin d’être fan de sport et encore moins de cyclisme pour profiter d’un événement populaire et «gratuit» (en dehors de l’investissement public pour l’organisation). Même si les temps ont changé, le cyclisme reste un sport très populaire et qui peut être pratiqué par une grande majorité de la population, chacun à son niveau. Et c’est également l’occasion de mettre en valeur, au bord des routes et au village-départ, les spécificités de notre région et de notre mode de vie. A chacun qui souhaite aller au bord des routes encourager les coureurs de se comporter le mieux possible afin que la course et l’image de notre pays restent immaculées après le passage des coureurs et offrir la meilleure vitrine sportive et culturelle possible. 

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

À lire aussi

Santé

Le parlement suisse refuse de faire baisser les coûts de la santé

Chaque année, à l’annonce de l’augmentation des primes d’assurance maladie, on nous sert comme argument l’inévitable explosion des coûts de la santé. Or ce n’est pas la santé qui coûte cher, mais la maladie! Pourtant, depuis des années, une large majorité de parlementaires rejette systématiquement toute initiative en lien avec (...)

Corinne Bloch
Politique

Le déclassement géopolitique de la Suisse est-il irréversible?

Même s’il reste très aléatoire de faire des prévisions, il est légitime de se demander aujourd’hui ce que nos descendants, historiens et citoyens, penseront de nous dans 50 ans. A quoi ressemblera la Suisse dans un demi-siècle? A quoi ressembleront l’Europe, si elle n’a pas été «thermonucléarisée» entre-temps, et le (...)

Georges Martin

Une claque aux Romands… et au journalisme international

Au moment où le Conseil fédéral tente de dissuader les cantons alémaniques d’abandonner l’apprentissage du français au primaire, ces Sages ignorants lancent un signal contraire. Il est prévu, dès 2027, de couper la modeste contribution fédérale de 4 millions à la chaîne internationale TV5Monde qui diffuse des programmes francophones, suisses (...)

Jacques Pilet

Les fantasmes des chefs de guerre suisses

Il arrive que le verrou des non-dits finisse par sauter. Ainsi on apprend au détour d’une longue interview dans la NZZ que le F-35 a été choisi pas tant pour protéger notre ciel que pour aller bombarder des cibles à des centaines, des milliers de kilomètres de la Suisse. En (...)

Jacques Pilet

Quand les PTT ont privatisé leurs services les plus rentables

En 1998, la Confédération séparait en deux les activités des Postes, téléphones et télégraphes. La télécommunication, qui s’annonçait lucrative, était transférée à une société anonyme, Swisscom SA, tandis que le courrier physique, peu à peu délaissé, restait aux mains de l’Etat via La Poste. Il est utile de le savoir (...)

Patrick Morier-Genoud

L’identité numérique, miracle ou mirage?

Le 28 septembre, les Suisses se prononceront à nouveau sur l’identité numérique (e-ID). Cette fois, le Conseil fédéral revient avec une version révisée, baptisée «swiyu», présentée comme une solution étatique garantissant la souveraineté des données. Mais ce projet, déjà bien avancé, suscite des inquiétudes quant à son coût, sa gestion, (...)

Anne Voeffray

Les délires d’Apertus

Cocorico! On aimerait se joindre aux clameurs admiratives qui ont accueilli le système d’intelligence artificielle des hautes écoles fédérales, à la barbe des géants américains et chinois. Mais voilà, ce site ouvert au public il y a peu est catastrophique. Chacun peut le tester. Vous vous amuserez beaucoup. Ou alors (...)

Jacques Pilet

Tchüss Switzerland?

Pour la troisième fois en 20 ans, le canton de Zurich envisage de repousser au secondaire l’apprentissage du français à l’école. Il n’est pas le seul. De quoi faire trembler la Suisse romande qui y voit une «attaque contre le français» et «la fin de la cohésion nationale». Est-ce vraiment (...)

Corinne Bloch
Accès libre

Nos médicaments encore plus chers? La faute à Trump!

En Suisse, les médicaments sont 50 à 100 % plus coûteux que dans le reste de l’Europe. Pourtant, malgré des bénéfices records, les géants suisses de la pharmaceutique font pression sur le Conseil fédéral pour répercuter sur le marché suisse ce qu’ils risquent de perdre aux Etats-Unis en raison des (...)

Christof Leisinger

Jean-Stéphane Bron plaide pour une diplomatie «de rêve»

Plus de vingt ans après «Le Génie helvétique» (2003), puis avec l’implication politique élargie de «Cleveland contre Wall Street» (2010), le réalisateur romand aborde le genre de la série avec une maestria impressionnante. Au cœur de l’actualité, «The Deal» développe une réflexion incarnée, pure de toute idéologie partisane ou flatteuse, (...)

Jean-Louis Kuffer

Un tunnel bizarroïde à 134 millions

Dès le mois prochain, un tunnel au bout du Léman permettra de contourner le hameau des Evouettes mais pas le village du Bouveret, pourtant bien plus peuplé. Un choix qui interroge.

Jacques Pilet

Cachez ces mendiants que je ne saurais voir!

Après une phase que l’on dira «pédagogique», la Ville de Lausanne fait entrer en vigueur la nouvelle loi cantonale sur la mendicité. Celle-ci ne peut désormais avoir lieu que là où elle ne risque pas de déranger la bonne conscience des «braves gens».

Patrick Morier-Genoud

Droits de douane américains: une diplomatie de carnotzet et de youtse

Le déplacement de Karin Keller-Sutter et de Guy Parmelin aux Etats-Unis, pour tenter d’infléchir la décision d’une taxe supplémentaire de 39 % pour les exportations suisses, a été un aller-retour aussi furtif qu’inutile, la honte en rabe. L’image de nos représentants à Washington, l’air perdu, penauds et bafouillants, fixe définitivement (...)

Jamal Reddani

La Suisse ne dit pas non aux armes nucléaires

Hiroshima, qui commémorait le 6 août les 80 ans de la bombe atomique, appelle le monde à abandonner les armes nucléaires. Mais les Etats sont de moins en moins enclins à y renoncer.

Jacques Pilet

Quentin Mouron ressaisit le bruit du temps que nous vivons

Avec «La Fin de la tristesse», son onzième opus, le romancier-poète-essayiste en impose par sa formidable absorption des thèmes qui font mal en notre drôle d’époque (amours en vrille, violence sociale et domestique, confrontation des genres exacerbée, racisme latent et dérives fascisantes, méli-mélo des idéologies déconnectées, confusion mondialisée, etc.) et (...)

Jean-Louis Kuffer

Trouver le juste cap dans la tempête

La tornade qui, en Europe, s’est concentrée sur la Suisse nous laisse ébaubis. Le gros temps durera. Ou s’éclaircira, ou empirera, selon les caprices du grand manitou américain. Les plaies seront douloureuses, la solidarité nécessaire. Il s’agira surtout de définir le cap à suivre à long terme, à dix, à (...)

Jacques Pilet