L’Iran juste avant le point de bascule

Publié le 31 mars 2023
Quand on lui demande quelques indications biographiques, l’auteur des «Chroniques persanes» mentionne son ascension du sommet du Huascaran qui culmine à 6'768 mètres dans les Andes péruviennes, en précisant tout de suite qu’on ne l’y reprendra plus. Le Vaudois Patrick Didisheim indique aussi n’a pas besoin de perdre du temps à se coiffer le matin et qu’il se trouve beaucoup plus jeune que les vieux de son âge, bien qu’il lui arrive de faire des Sudokus.

Cet ancien professeur de maths, d’économie et de droit, membre du collectif d’auteurs les Dissidents de la pleine lune et joueur compulsif de poker, tennis et backgammon a précédemment publié un roman intitulé Poker Blues, prétexte à un regard décalé sur la société américaine, ainsi que de nombreuses nouvelles. Mais il est surtout connu dans le milieu du backgammon pour son titre de champion du monde. C’est avec le même humour qu’il retrace, presque dans l’ordre chronologique, deux semaines de voyage organisé de Shiraz à Téhéran.
Les Chroniques persanes nous parlent donc de l’Iran. Pas l’Iran de la Révolution de 1979 contre le régime autoritaire du Shah, ni l’Iran des récentes émeutes, mais l’Iran de 2022 tel qu’il s’est présenté aux yeux de l’auteur lors d’un voyage organisé. Elles en parlent le plus souvent avec la légèreté et l’insouciance du touriste en goguette, guidé vers les plus beaux vestiges du passé ou vers les spécialités que tout visiteur se doit d’acquérir, comme les tapis d’Orient par exemple. Mais aussi avec le regard plus critique et aiguisé d’un auteur conscient des réalités sociales. 
Si les anecdotes suivent le fil du voyage, le premier chapitre échappe à cette logique. Inspiré par la photo de couverture, l’auteur se glisse dans la tête d’un gardien de la Révolution embarrassé par la présence d’une jeune femme à la tête trop dénudée en train de se recueillir sur la tombe d’un poète du XIIIe siècle vénéré par les Iraniens comme une star ou un sportif d’élite le serait chez nous. Cette brève tranche donc avec les suivantes par le ton et par le point de vue narratif. On comprend que le gardien de la Révolution incarne et subit en même temps l’autorité et que la jeune femme « rebelle » risque de lui attirer des ennuis quoi qu’il fasse, puisqu’il est cens...

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