L’embarras de nos enterrements

© Balint Miko via Unsplash
Il lui était demandé de célébrer un culte au cours duquel aucune mention ne serait faite de mon père. Autrement dit, celui-ci ne voulait pour son service funèbre – il affectionnait cette appellation – qu’un culte simple avec sainte cène. Pour bien marquer son intention, il avait également souhaité que la mise en terre soit faite avant le culte, et non après. Le résultat fut tout à fait original. Plus de deux cent personnes avaient fait le voyage, certains des coins les plus reculés du continent, pour assister à l’enterrement d’un homme dont ils ne verraient pas le cercueil, et pour lequel aucune évocation ne serait servie par l’officiant. Cette vaste assistance, que l’amour pour mon père et sa famille avaient déplacée jusque dans cette église, n’a eu droit au final qu’à un culte ordinaire. Un culte excellent, grâce à un pasteur inspiré et une organiste hors pair. Mais un culte ordinaire.
Lorsque j’ai pris connaissance des exigences de mon père, j’ai été moins surpris qu’inquiet. Face à une cérémonie si radicalement sobre, certains risqueraient de rester sur leur faim. Au bout de l’expérience, je me suis demandé si mon père n’avait pas eu là une intuition aussi dissidente que salvatrice. Car nos enterrements, libérés des obligations rituelles, semblent s’être quelque peu dispersés en une infinité de variations, aussi stressantes pour les proches que confondantes pour l’assistance. Comme pour les mariages, la disparition de la transcendance ritualisée a pour effet immédiat de reporter toute la cérémonie sur les individus qui se...
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