Des Nymphéas au smartphone

Publié le 30 mai 2025
Premier film de Cédric Klapisch présenté à Cannes en 35 ans de carrière, «La Venue de l'avenir» ne marque pas tant un saut qualitatif que la somme d'une œuvre à la fois populaire et exigeante. En faisant dialoguer deux époques, la nôtre et la fin du 19e siècle des impressionnistes, il a su tirer un film aussi amusant que profond sur la rapide évolution de l'humanité

Vous êtes-vous déjà retrouvé à Paris au Musée de l'Orangerie, qui abrite les fameuses Nymphéas de Claude Monet, dans l'impossibilité de vraiment les apprécier pour cause de foule compacte, pour l'essentiel jeune et asiatique, plus soucieuse de s'immortaliser devant avec leurs téléphones portables? Que cela ait été ou non le déclic pour son nouveau film, Cédric Klapisch part de là, prenant le phénomène comme symbole de la terrifiante accélération qu'ont connu nos existences ces deux derniers siècles. Quelles en ont été les conséquences sur notre rapport à la nature, au travail, aux images, et même aux autres, voire à l'amour? Un sacré sujet, que seul un cinéaste expérimenté, sujet au ralentissement qu'impose l'âge, pouvait sans doute espérer pouvoir embrasser.
Depuis le futuriste et passablement loupé Peut-être, La Venue de l'avenir est sans doute le film le plus ambitieux de l'auteur de Chacun cherche son chat, L'Auberge espagnole et En corps. Et cette fois, il nous a comblés. Oh, on ne refera pas Klapisch, expert de l'air du temps, conteur aussi habile qu'imaginatif mais déjà nettement plus limité côté formel! La banalité visuelle de nombre de plans, le manque d'inspiration patent de l'accompagnement musical et la sensibilité middle of the road une fois acceptés, on découvrira pourtant un film formidable. Sans doute stimulé par le génial Minuit à Paris de Woody Allen, notre auteur a concocté cette fois, avec le fidèle Santiago Amigorena, un délicieux dialogue entre présent et passé.
Interpénétration temporelle
Instinct grand public oblige, ce sera la rencontre entre une famille élargie de cousins réunis par un héritage et la France des Impressionnistes de la fin du 19e siècle. Se chargeant d'inspecter les lieux, une maison abandonnée en Normandie, quatre de ces cousins...

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