Coronavirus: le point sur la mortalité

Quel est l’impact du coronavirus sur la mortalité en Suisse? Quelques éléments (chiffrés) de réponse.
Pas d’explosion du nombre de décès, bien que le pic d’épidémie Covid-19 soit passé
L’office fédéral des statistiques (OFS) constitue une base de données importante sur la démographie et la mortalité en Suisse. C’est sur les chiffres officiels publiés par l’OFS et ceux de l’office fédéral de la santé publique (OFSP) que se base notre étude.
Comme représenté dans l’histogramme suivant, le nombre de décès relevé en Suisse durant les dix-huit premières semaines de l’année 2020 n’explose pas, comme on pourrait s’y attendre depuis l’apparition et l’établissement du Covid-19 dans notre pays. Sur la même période, l’année 2015 enregistre le nombre de décès le plus élevé observé, soit 1196 (+4.7%) de plus que 2020.

Dans son communiqué de presse du 14 novembre 2017, l’OFS donne l’explication suivante pour l’année 2015: «L’épidémie de grippe au début de l’année et la canicule en juillet ont causé en 2015 respectivement 2500 et 500 décès de plus environ que prévu. De plus, chaque année, le nombre de décès augmente de quelque 500 en raison du nombre croissant de personnes âgées en Suisse.»
A titre comparatif, l’OFSP a recensé à ce jour 1600 décès liés au Covid-19. Il n’y a pour le moment pas d’indication sur combien de ces décès pourraient aussi être liés à la grippe saisonnière 2019-2020.
Pic de l’épidémie virale de 2020 : «Où se cache Influenza?»
Une représentation graphique des décès hebdomadaires en Suisse pour les années 2015-2020 met en évidence la présence de pics d’épidémie dans les 15 premières semaines de chaque année. Usuellement, de tels pics d’épidémie sont les conséquences des différentes formes de la grippe saisonnière. Selon l’OFSP, (semaine 11 de 2020), les trois principales souches virales de la grippe détectées en Suisse au cours de la saison courante sont les suivantes: A(H1N1)pdm09, B Victoria et A(H3N2).
Pour les années 2015 et 2020, un maximum de 1805 décès hebdomadaires en semaine 7 et respectivement 1816 en semaine 14 ont été relevés. Ces valeurs sont proches l’une de l’autre, mais la durée et l’intensité de l’épidémie grippale de 2015 étaient globalement plus élevées, expliquant un nombre de morts plus important en 2015.

Si le pic d’épidémie observé dans l’année 2020 (1816 décès en semaine 14) représente les conséquences de la vague épidémique du Covid-19, où se situe donc le pic lié à l’épidémie grippale saisonnière? Est-ce que la virulence de cette grippe est comparable à celle de la saison 2015-2016 où l’on n’observe pas de pic d’épidémie dans les 15 premières semaines de l’année?
Y-a-t-il une fusion des pics d’épidémies Influenza et Covid-19?
Ou encore, est-ce que les mesures de confinement apportées il y a deux mois en Suisse ont réduit les conséquences mortelles de la grippe saisonnière, malheureusement rattrapées par la présence du Covid-19, jugé plus virulent dans sa transmission et pour sa plus longue durée d’incubation que la grippe?
Pour l’année 2020, l’OFS ne présente pas d’informations sur les cas annoncés de grippe, au-delà de la semaine 11 (Fig. 3). Cette interruption d’information est probablement due à l’arrivée rapide du Covid-19, ne permettant plus de distinguer les annonces de cas de la grippe saisonnière et du Covid-19.

Décès par classe d’âge: pas de variation par rapports aux cinq années précédentes
La représentation graphique suivante relève que la classe d’âge «0-64 ans» a été épargnée par le Covid-19, en cette année 2020. Il n’y a pas de différence de tendance du nombre de décès par rapport aux cinq années précédentes.
En 2020, la classe d’âge «65ans et +» présente un nombre de décès important, comme lors des épidémies de grippe des années précédentes.

Forte disparité de la variation du nombre de décès entre cantons
Durant la période du Covid-19, il existe une forte disparité de la variation du nombre de décès entre cantons. Par exemple, le canton de Genève présente l’une des plus fortes hausses du nombre de décès durant les 18 premières semaines de l’année. Cette hausse est de 20.3% par rapport au nombre moyen de décès enregistré lors des cinq années précédentes.

Au contraire, le canton de Zurich présente une diminution de 5.5% du nombre de décès en période du Covid-19, par rapport au cinq années précédentes.

Cette variation du nombre de décès en 2020 par rapport à la moyenne des décès des cinq années précédentes est représentée pour chaque canton dans l’histogramme suivant. La distribution donne une hausse des décès en 2020 pour 13 cantons et une baisse des décès pour 13 cantons. Les cantons romands et le Tessin présentent la plus forte hausse de décès, tandis que Zurich et Berne la plus faible. Tous les cantons de la Romandie présentent une hausse de décès.

Pour comparaison, la même représentation graphique a été complétée avec le nombre de décès liés au Coronavirus confirmés en laboratoire (OFSP, 17.05.2020). Dans la majeure partie de la Romandie et le canton du Tessin, il y a corrélation entre l’augmentation du nombre de décès en 2020 et les chiffres de décès liés au Covid-19 publiés par l’OFSP.
En revanche, pour les cantons de Zurich et Berne, il y a une baisse du nombre de décès en 2020, malgré un nombre non négligeable de décès liés au Covid-19 confirmés en laboratoire (124 et respectivement 83).

Où est l’évidence de la virulence du Covid-19 face à Influenza?
A la vue de ces données statistiques, il n’y a pas d’évidence que l’épidémie du Covid-19 que nous traversons soit plus virulente pour l’être humain que les grippes saisonnières que nous connaissons ces dernières années dans notre pays.
En effet, le nombre de décès en Suisse n’a globalement pas varié durant les 18 premières semaines de l’année 2020 par rapport aux années précédentes, alors que la population augmente et vieillit.
Il existe cependant des disparités sur la tendance du nombre de décès enregistrés par canton durant les 18 premières semaines de 2020, par rapport aux années précédentes sur la même période. La Romandie qui présente le plus de décès liés au Covid-19 montre également une plus forte hausse de décès toutes causes confondues, tandis que les cantons de Zurich et Berne également touchés par le Covid-19 présentent une baisse du nombre global de décès.
De nombreux facteurs sont à prendre en compte, comme par exemple une probable réduction du nombre d’accidents du fait du confinement de notre société ou encore les mesures de protection imposées par nos autorités, réduisant la transmission d’épidémies.
Qui peut objectivement mesurer l’efficacité ou encore juger de l’impérative nécessité des mesures prises dans notre pays? Sont-elles proportionnées d’un point de vue humain, éthique, démocratique et scientifique? Ne suffisait-il pas de protéger les groupes à risques identifiés au début de l’épidémie Covid-19?
Les statistiques de l’OFS indiquent clairement que la classe d’âge «65ans et plus» est la plus touchée de toutes par l’épidémie virale en 2020, comme lors des années précédentes. Sachant que les mesures de confinement ont été prises plus tôt dans les EMS de plusieurs cantons (Berne, par exemple), les personnes âgées ont été davantage mises à l’abri. Comment expliquer que ce soit tout de même ces personnes qui ont payé le plus lourd tribut?
Un élément d’explication peut être repris du rapport de janvier 2019 de l’OFS (Statistique des causes de décès, La mortalité en Suisse et les principales causes de décès, en 2016): «… les personnes affaiblies par une maladie grave contractent fréquemment une pneumonie et en décèdent. Les pneumonies constituent une part importante des maladies respiratoires».
Le focus de ces derniers mois étant le Covid-19, il manque à ce jour des informations quant à la présence et à la virulence de l’épidémie de grippe saisonnière vis-à-vis du Covid-19. Une question du domaine de nos autorités sanitaires.
Deux mois après l’instauration de mesures d’urgence, nos autorités sont priées de prendre position quant à l’évidence scientifique de la virulence du Covid-19 pour l’être humain, de justifier la nécessité des mesures de sécurité épidémique en vigueur sur l’ensemble de notre territoire et de justifier les raisons du maintien de l’état d’urgence.
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