Avis de tempêtes sur l’Europe

Publié le 26 novembre 2021

Lors des émeutes anti-confinement à Rotterdam (archive de janvier 2021). – © NL Mediacentrum Defensie

Phénomène nouveau de météorologie politique. Dans plusieurs pays, ce n’est plus le choc de l’opposition et du pouvoir, ni l’émergence des mouvements sociaux habituels, c’est une considérable vague de colère qui monte. Très diverse. Une partie de la population, qu’elle manifeste dans la rue ou pas, ne supporte plus les restrictions sanitaires, ne croit plus ses dirigeants ni les médias traditionnels. Quoi qu’il arrive, ces soulèvements, pacifiques ou violents, laisseront des traces. Les rebelles ravaleront peut-être leur amertume comme les «gilets jaunes» mais risquent bien de décrocher, de se marginaliser. Terrible secousse pour nos édifices démocratiques. A l’image de la Guadeloupe et de la Martinique (où les trois quarts des jeunes sont au chômage), la révolte du moment peut enflammer, en Europe aussi, les mécontentements et les frustrations latentes. L’escalade des discours furieux, de part et d’autre, ne cesse de faire de monter la tension.

En Autriche, en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, les pouvoirs paraissent devenus fous.

Retour au confinement total comme si le virus allait disparaître pour autant. Répression musclée de manifestations anodines. Et quand celles-ci dégénèrent, ripostes violentes. A Rotterdam, la police a tiré à balles réelles! Si c’était arrivé à Minsk, tout le monde s’égosillerait. Or là, chut, les Hollandais sont si gentils. Quant au ministre allemand de la santé, il perd les pédales en parlant de «la pandémie des non-vaccinés», en affirmant qu’à la fin de l’hiver «tous seront vaccinés, guéris ou morts». Alors que des millions de personnes, vaccinées ou pas, ont porté le virus sans tomber malades, activant leur immunité naturelle. En Suisse, le paysage paraît plus calme. Bien sûr, il y a des allumés qui disent n’importe quoi et perdent les pédales. Chez les opposants, chez les prétendus sages aussi. Un épidémiologiste zurichois qui se prend pour un ministre vient de proposer un impôt spécial pour les non-vaccinés!

Les raisons du trouble

Cependant les manifs ne débordent quasiment pas. Mais la cassure existe. Ne pas la voir, la banaliser, la discréditer, caricaturer et maudire les mécontents, c’est l’approfondir encore. Qu’on leur donne raison ou tort, le fait est là, les récalcitrants aux «mesures» et aux appels incessants à la vaccination posée en «seule issue possible», perdent confiance dans les autorités, dans les partis aussi, unanimes derrière elles (à part une une fraction de l’UDC). Plus on les rabroue, plus ils s’enferrent dans leur méchante humeur. Que le oui ou le non l’emporte le 28 novembre ne changera pas la donne de fond. Il faut dire que les raisons du trouble s’accumulent.

– On nous assurait que le vaccin stoppait la contamination. C’est faux. Qu’il protégeait durablement. Faux encore. Il a ses avantages (l’atténuation de la maladie) mais il n’est pas la planche de salut universelle. Exemple: l’Irlande, avec ses 93% de vaccinés compte un nombre d’infectés par habitants égal à celui de l’Autriche. C’est à l’usage que l’on découvre ses limites, dira-t-on. Compris. Mais alors nous sommes bel et bien des cobayes? Pourquoi ne pas le dire? La plupart des Suisses acceptent les risques présents et futurs mais ce serait en conscience si l’on était franc avec eux. Plus sain que le suivisme aveugle.

– Ce n’est pas être complotiste que d’envisager avec réticence ou effroi, avec des doutes aussi, une 3ème, puis une 4ème dose, un abonnement vaccinal en vue. Pour le grand bénéfice de Pfizer & co qui voient leurs profits exploser et émettent sans cesse de nouvelles recommandations, fort rentables, le plus souvent acceptées par l’autorité. La performance des pharmas a certes son coût. Mais à une telle hauteur de rentabilité, compte tenu des contributions publiques à leurs recherches, devant leur refus de partager leur savoir avec les pays les plus pauvres, ils pourraient bien être considérés un jour comme des profiteurs de guerre. Un exemple? Le test PCR coûte 150 francs en Suisse, 50 euros en Italie. L’OFSP ne s’est manifestement pas inquiété de cet écart choquant.

– Garder secrets les termes de l’accord conclu entre l’OFSP et les fournisseurs, notamment au chapitre des responsabilités, est une atteinte grossière à la transparence exigée par la loi.

– Ne pas faire toute la lumière sur les liens d’intérêt entre les pharmas et les membres de la Task force et les responsables de l’OFSP, c’est donner du grain à moudre à qui nourrit des soupçons d’accointances suspectes.

– Ne pas recueillir sérieusement les constats d’effets secondaires et ne pas les communiquer officiellement, c’est donner le sentiment que des réalités sont cachées. D’autant que les dernières données de l’OMS à ce sujet ne sont pas rassurantes du tout.

– Répéter sans cesse que le pass sanitaire permet un retour à la vie normale est une tromperie, car montrer son téléphone et sa carte d’identité pour aller boire et manger au café du coin, ce n’est pas «normal». Sans compter que cette mesure donne une illusion de sécurité, puisque les double-piqués peuvent transmettre le virus et que les précautions élémentaires restent nécessaires.

– L’idée loufoque, vite abandonnée, de rémunérer qui persuade quelqu’un de se faire vacciner, puis celle de la semaine spéciale à cette fin, avec des spectacles gratuits et une profusion d’annonces publicitaires, font penser que les responsables ne réfléchissent pas à deux fois et qu’ils font tomber l’argent du ciel. Coût de l’opération: près de 100 millions! Alors que les hôpitaux manquent de moyens et de personnel… Alors que le nombre de lits pour soins intensifs a été fortement réduit depuis le printemps 2020. Sans explication convaincante. A noter aussi que toutes les campagnes officielles, depuis le début, sont confiées à une seule agence zurichoise, retenue sans appel d’offres. Illégal.

– L’autorité sanitaire, par sa fixation exclusive sur le vaccin manque à son devoir. Elle n’évoque jamais l’importance de la prévention. Il y a des moyens simples de renforcer son immunité. Jamais rappelés. Silence aussi sur les possibilités de traitement dès le début des symptômes. Il en existe. Tant de médecins généralistes soignent souvent avec succès leurs patients grâce des médicaments usuels (doses massives de vitamines D, de zinc et d’antibiotiques, etc.), leur évitant ainsi l’hospitalisation. Or lorsqu’une personne infectée et malade appelle le service cantonal, on lui dit de rester chez elle et d’aller à l’hôpital si cela tourne mal. C’est incompréhensible et choquant.

Et en prenant un peu de recul, sans parti pris, on peut songer à plus préoccupant encore.

Chacun a le droit de juger par soi-même de la gravité — indéniable! — de la pandémie. Or la communication officielle ne lui donne pas les éléments raisonnables pour cela. Elle n’établit jamais le contexte. Le chiffre des morts de ou avec le covid, plutôt bas d’ailleurs, est affiché tous les jours, sans indication de l’âge ou de l’éventuelle comorbidité. Il n’est jamais rapporté aux décès, infiniment plus nombreux, dus aux cancers, aux problèmes de cœur et autres. Cela donnerait un tableau de la situation plus réaliste.

L’omniprésence du sujet envahit nos têtes. A faire de nous, des enfants aux vieillards, des hypocondriaques à vie, des nombrilistes tétanisés. A croire que la santé est devenue la nouvelle religion de l’Occident. Signe annonciateur de son déclin? Enfin cette dramatisation extrême finit par suggérer que le but ultime de la société est de vaincre la mort. Si l’on y pense, si l’on se compare à d’autres peuples moins nantis et plus stoïques, cette obsession frénétique, ce refus d’admettre que la vie a une fin apparaissent absurdes. Indécents.

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

À lire aussi

Santé

L’histoire des épidémies reste entourée de mystères et de fantasmes

Les virus n’ont pas attendu la modernité pour bouleverser les sociétés humaines. Dans un livre récent, les professeurs Didier Raoult et Michel Drancourt démontrent comment la paléomicrobiologie éclaire d’un jour nouveau l’histoire des grandes épidémies. De la peste à la grippe, du coronavirus à la lèpre, leurs recherches révèlent combien (...)

Martin Bernard
Philosophie

Notre dernière édition avant la fusion

Dès le vendredi 3 octobre, vous retrouverez les articles de «Bon pour la tête» sur un nouveau site que nous créons avec nos amis d’«Antithèse». Un nouveau site et de nouveaux contenus mais toujours la même foi dans le débat d’idées, l’indépendance d’esprit, la liberté de penser.

Bon pour la tête
Politique

A confondre le verbe et l’action, on risque de se planter

De tout temps, dans la galerie des puissants, il y eut les taiseux obstinés et les bavards virevoltants. Donald Trump fait mieux. Il se veut le sorcier qui touille dans la marmite brûlante de ses colères et de ses désirs. Il en jaillit toutes sortes de bizarreries. L’occasion de s’interroger: (...)

Jacques Pilet
Politique

Les fantasmes des chefs de guerre suisses

Il arrive que le verrou des non-dits finisse par sauter. Ainsi on apprend au détour d’une longue interview dans la NZZ que le F-35 a été choisi pas tant pour protéger notre ciel que pour aller bombarder des cibles à des centaines, des milliers de kilomètres de la Suisse. En (...)

Jacques Pilet
PolitiqueAccès libre

PFAS: un risque invisible que la Suisse préfère ignorer

Malgré la présence avérée de substances chimiques éternelles dans les sols, l’eau, la nourriture et le sang de la population, Berne renonce à une étude nationale et reporte l’adoption de mesures contraignantes. Un choix politique qui privilégie l’économie à court terme au détriment de la santé publique.

Philosophie

Les biais de pensée de la police, et les nôtres

Pourquoi, à Lausanne, un policier a-t-il aimablement serré la main du chauffard qui avait foncé délibérément dans une manifestation propalestinienne? Au-delà des polémiques politiques, il s’agit sans doute avant tout d’un de ces biais cognitifs comme nous en avons tous.

Patrick Morier-Genoud
Politique

L’identité numérique, miracle ou mirage?

Le 28 septembre, les Suisses se prononceront à nouveau sur l’identité numérique (e-ID). Cette fois, le Conseil fédéral revient avec une version révisée, baptisée «swiyu», présentée comme une solution étatique garantissant la souveraineté des données. Mais ce projet, déjà bien avancé, suscite des inquiétudes quant à son coût, sa gestion, (...)

Anne Voeffray
Politique

Démocratie en panne, colère en marche

En France, ce n’est pas tant le tourniquet des premiers ministres et la détestation de Macron qui inquiètent, c’est le fossé qui se creuse entre la société et le cirque politicien, avec son jeu d’ambitions qui paralyse le pays. Le tableau n’est guère plus réjouissant en Allemagne, en Grande-Bretagne, en (...)

Jacques Pilet
Politique

Le voyage chahuté d’Ursula

Il est fait grand bruit autour d’une fable alarmiste, d’un incident minuscule lors du vol de la présidente de la Commission européenne entre la Pologne et la Bulgarie: la perturbation du GPS attribuée à la Russie et facilement surmontée comme cela est possible sur tous les avions. Quasiment rien en (...)

Jacques Pilet
EconomieAccès libre

Nos médicaments encore plus chers? La faute à Trump!

En Suisse, les médicaments sont 50 à 100 % plus coûteux que dans le reste de l’Europe. Pourtant, malgré des bénéfices records, les géants suisses de la pharmaceutique font pression sur le Conseil fédéral pour répercuter sur le marché suisse ce qu’ils risquent de perdre aux Etats-Unis en raison des (...)

Christof Leisinger
Politique

Le trio des va-t-en-guerre aux poches trouées

L’Allemand Merz, le Français Macron et le Britannique Starmer ont trois points communs. Chez eux, ils font face à une situation politique, économique et sociale dramatique. Ils donnent le ton chez les partisans d’affaiblir la Russie par tous les moyens au nom de la défense de l’Ukraine et marginalisent les (...)

Jacques Pilet
PolitiqueAccès libre

Microsoft s’enrichit sur le dos des Palestiniens

Selon des révélations étayées par des sources issues de la multinationale américaine et des services secrets israéliens, un cloud spécial a été mis en place pour intercepter les communications de millions de Palestiniens. Des données qu’Israël utilise pour mener sa guerre de représailles ethniques dans la bande de Gaza et (...)

Bon pour la tête
Politique

La géopolitique en mode messianique

Fascinés par le grand jeu mené à Anchorage et Washington, nous avons quelque peu détourné nos regards du Moyen-Orient. Où les tragédies n’en finissent pas, à Gaza et dans le voisinage d’Israël. Où, malgré divers pourparlers, aucun sursis, aucun accord de paix ne sont en vue. Où un nouvel assaut (...)

Jacques Pilet
PolitiqueAccès libre

Pourquoi les Etats-Unis n’ont-ils pas encore interdit TikTok?

L’an passé, le congrès américain a décidé que le réseau social devait être interdit s’il restait en mains chinoises, ceci afin d’éviter que les données des étatsuniens soient récupérées par Pekin. Il s’agissait prétendument d’une question de «sécurité nationale». Mais le président Trump a pour la troisième fois reporté l’interdiction, (...)

Urs P. Gasche
Politique

Les Européens devant l’immense défi ukrainien

On peut rêver. Imaginons que Trump et Poutine tombent d’accord sur un cessez-le-feu, sur les grandes lignes d’un accord finalement approuvé par Zelensky. Que feraient alors les Européens, si fâchés de ne pas avoir été invités en Alaska? Que cette hypothèse se confirme ou pas, plusieurs défis controversés les attendent. (...)

Jacques Pilet
Culture

Des nouvelles de la fusion de «Bon pour la tête» avec «Antithèse»

Le nouveau site sera opérationnel au début du mois d’octobre. Voici quelques explications pour nos abonnés, notamment concernant le prix de l’abonnement qui pour eux ne changera pas.

Bon pour la tête