L'Espace de Jacques Pilet

Pierre Jeanneret ou «l’honnête homme» voyageur
«Enseignant, historien et voyageur», Pierre Jeanneret, Editions de l’Aire, 244 pages.

L’Ukraine autrement racontée
«L’internat», Serihy Jadan, Editions Noir sur Blanc, 272 pages.

Corruption à Bruxelles. Possible en Suisse? Ah! non! Et pourtant…
Le Parlement européen a désormais une star déchue célébrissime dont il se serait bien passé. L’eurodéputée grecque Eva Kaili qui, avec ses copains, a reçu des valises bourrées d’euros en provenance du Qatar. Ce qui lui a valu de faire la Une des journaux, d’autant plus qu’il s’agit d’une fort belle femme. Que la corruption dans cette enceinte soit un problème grave qui appelle des mesures fortes, c’est l’évidence. Mais les hauts cris d’indignation ne seraient-ils pas quelque peu hypocrites? Dans nos belles démocraties, on sait aussi fermer les yeux sur le pouvoir de l’argent en politique.

Droit de réponse
A la suite d’un article dans «Le Temps» qui travestissait mon regard sur la Russie et la Syrie, j’ai publié une réponse dans ce journal. Je la livre ici pour dissiper toute ambiguïté.

Fièvres en Turquie. Ce pays-clé entre deux mondes mérite plus d’attention
Bombardements sur les Kurdes de Syrie. Pressions sur la Suède. Loi en vue sur le voile. Menaces sur la Grèce. L'autoritaire Président turc fait parler de lui tous les jours. Il vient de faire condamner le maire d’Istanbul pour écarter ce rival avant les élections. Un danger pour les Européens, ébahis devant l’action tous azimuts d'Erdogan? Sujet compliqué qui mérite l’attention. Hors des stéréotypes. Le livre d’une personnalité romande, Zeynep Ersan Berdoz, nous aide à mieux comprendre.

Le Grand Ralentissement
Nos voisins français ont beaucoup parlé du «grand remplacement» de la population par l’afflux des migrants. Vrai ou faux? A eux d’en juger. Mais ils feraient bien de s’interroger aussi sur «le grand ralentissement». Et pas eux seulement, en Allemagne, en Suisse, on assiste aussi à une tendance profonde: ralentir notre vie quotidienne, si possible travailler moins, s’enfoncer dans notre cocon, fuir le bruit.

Les magouilles de M. et Mme Van der Leyen font honte à la Commission européenne
Mais comment se fait-il que cette affaire ne fasse pas plus de bruit? L’eurodéputée française Michèle Rivasi a dit sa stupéfaction devant le Parlement européen. On sait maintenant que l’époux de Ursula van der Leyen, membre de la direction de la société américaine Orgenesis, spécialisée dans les thérapies génétiques et cellulaires, a largement profité des plans d’urgence anti-Covid.

Les lobbies entrent au gouvernement
Selon toute probabilité les deux nouveaux au Conseil fédéral seront Albert Rösti, l’UDC bernois, conseiller national, et Eva Herzog, conseillère aux Etats bâloise, du PS. Or ces deux personnalités posent un sérieux problème politique, peu soulevé: l’influence des lobbies sur le pouvoir.

La majorité des Suisses veulent être neutres face à la Russie et à l’Ukraine
Sondage surprenant de TA-Media. «La Suisse doit être neutre face à la Russie et à l’Ukraine». D’accord? Plutôt d’accord? Pas d’accord? 64% des 1'200 personnes interrogées se déclarent très ou plutôt favorables à la neutralité dans ce conflit. Ce qui contraste fort avec les propos tenus mercredi à la radio romande par l’ambassadeur de Suisse à Kyiv qui a repris mot pour mot, sur tout, sans nuances, l’argumentation du Président Zelensky. Tensions politiques en vue.

La course illogique aux armements
Chaque pays a le droit et le devoir de se défendre. Le pacifisme intégral n’est plus de mise. Mais jusqu’à quel point s’armer? Avec quels moyens? Face à quelles menaces? Là, ça se corse. La guerre en Ukraine a provoqué une frénésie d’achats d’armements dans les pays européens, Suisse comprise. Est-ce bien raisonnable au vu de l’état lamentable de l’armée russe?

L’horreur de la guerre en face
L’alllocution en visionconférence du Président Zelensky lors du récent sommet du G20 a été résumée par les agences de presse. Mais un passage est resté dans l’ombre. Il aurait pourtant de quoi faire sursauter à Genève. Le CICR y était attaqué sans ménagements.

Comment un ex-président de la Confédération, proche du Reich, obtint la libération de 1’500 Juifs
Ce chapitre de l’histoire suisse, longtemps ignoré, reste enfoui dans la mémoire collective. Un livre qui vient de paraître, signé du journaliste gruérien Jacques Allaman, nous le rappelle: «La Liste de Musy». Cette curieuse péripétie apparaît par bribes dans une trame romanesque compliquée où le narrateur et son ami passent du conservatisme catholique, de la prêtrise, à l’engagement en faveur du judaïsme ou de la cause palestinienne. En prolongement de douloureux mystères familiaux, ancrés dans des milieux fribourgeois sympathisants du fascisme.

Cuba 62: quand la Suisse œuvrait pour la paix
En octobre 1962, le monde s’est vu au bord de la guerre nucléaire entre les Etats-Unis et l’URSS. Titres et commentaires des journaux de l’époque attestent d’un véritable affolement. Les Soviétiques avaient installé des missiles sur l’île communiste, si proche de la Floride. Un accord fut trouvé en deux semaines. Avec l’aide active des diplomates suisses. A la différence de ce qui se passe aujourd’hui, en ces moments de tensions, de menaces terrifiantes entre l’Est et l’Ouest.

Le cauchemar brésilien et nous
Le duel Lula-Bolsonaro, au coude à coude, va bien au-delà d’une péripétie électorale. L’avenir du Brésil aura des répercussions écologiques, économiques et politiques dans le monde. Si la gauche alliée au centre et à la droite raisonnable gagne, on peut espérer que cessent la déforestation massive de l’Amazonie, la paupérisation galopante du sous-continent et la violence mafieuse. Rien n’est moins sûr. Bolsonaro a proclamé qu’il n’accepterait pas sa défaite. Il s’attaque à la démocratie. Et le fera aussi s’il est élu. Une tentation que l’on trouve jusqu’en Europe.

Sur les traces de Bertil Galland, «le vagabond des savoirs»
Il y a d’interminables chantiers sur les routes et les rails qui nous irritent. Il y en a d’autres que l’on se réjouit de voir sans fin. Telle la collection du «Savoir suisse», lancée par l’infatigable Galland il y a vingt ans, célébrée à Lausanne dans la pompeuse aula du Palais de Rumine. Hommage mérité. Evocation qui donne confiance dans ce pays.

L’Europe poignardée
Quels que soient les auteurs du sabotage des deux gazoducs entre la Russie et l’Allemagne, ils ont porté un coup historique à l’Europe. Le sujet n’est pas resté longtemps à la une. Comme si l’on ne voulait pas en voir les conséquences à long terme. La principale puissance économique de l’UE est blessée au cœur. Des centaines d’entreprises ferment ou envisagent de le faire, des dizaines de milliers d’emplois sont menacés. Mais au fait, qui avait intérêt à un tel grabuge? Etonnamment – ou pas – les médias s’attardent peu sur cet évènement de portée historique.

Cingria le vagabond et les mots qui trépignent
Les esprits cultivés, chez nous, se doivent de prononcer son nom de temps en temps avec un soupir admiratif. Mais Charles-Albert Cingria (1883-1954), soyons francs, n’est plus guère lu. L’occasion se présente avec la nouvelle et bienvenue collection «Florides helvètes» qui ressort des auteurs indispensables tombés dans l’ombre. Dénomination qui est en fait le titre d’un ouvrage du dit Cingria. Un délice.

A la chinoise. En version soft
Ainsi donc pour s’assurer que nos logements ne seront pas chauffés à plus de 19 degrés cet hiver, le Conseil fédéral s’essaie à la méthode chinoise. Avec de doucereuses précautions. Il explique qu’il s’agirait d’une atteinte à la loi sur l’approvisionnement du pays. Le Conseiller fédéral Parmelin explique, patelin: «La Suisse n’est pas un Etat policier. Mais il pourra y avoir des contrôles ponctuels.»

Dürrenmatt palabre avec Rousseau
Mais qu’ont-ils donc à se dire? C’est ce que s’est demandé Gerhard Seel, professeur de philosophie à l’université de Berne, résidant à Neuchâtel. Comme Friedrich Dürrenmatt, de 1952 jusqu’à sa mort en 1990. Comme Jean-Jacques Rousseau, à Môtiers plus précisément, entre 1762 et 1765. Il en résulte un spectacle savoureux.

Allez comprendre!
Les journalistes ont pour tâche d’expliquer le comment et le pourquoi de ce qui se passe. Mais là, pardon, nous sommes dépassés. Sur tant de sujets, c’est à n’y rien comprendre. La logique de la guerre n’est guère logique. Elle affole la raison. Du plus grand évènement aux lointaines conséquences, on n’arrive plus à démêler les contradictions. Exemples...

Cajoler Pinochet, briser Assange
Cet article du «Monde diplomatique» (août 2022) ne plaira pas aux Britanniques et aux Américains. Il est signé d’un poids lourd du droit humanitaire, Nils Mezler, récemment appelé auprès de la direction du CICR, qui a enquêté sur le sort réservé à Julian Assange et trouvé «des preuves irréfutables de persécution politique et d’arbitraire judiciaire, ainsi que de torture et de mauvais traitements délibérés».

Voir la guerre en face
Le rapport de Amnesty international sur la mise en danger des civils par les combattants ukrainiens passe mal à Kiev et chez les Occidentaux, trop bien à Moscou. Sur le fond il n’est pas contesté. Mais on entend qu’il ne fallait rien dire de ces agissements pour ne pas jeter une ombre sur le pouvoir ukrainien. Plusieurs journaux n’ont d’ailleurs pas publié le communiqué dérangeant à sa sortie et n’ont fait place qu’aux protestations. Problème: les pays occidentaux affirment qu’en soutenant l’Ukraine, ils soutiennent la démocratie en Europe. Très bien, mais si cette croisade pour la liberté amène à faire taire des faits… quelque chose cloche.

Une voix allemande pour la paix
La nouvelle est passée inaperçue. Qu’on la juge importante ou pas, cet embarras des médias est significatif. Il y a quelques jours, un poids lourd de la politique allemande est allé à contre-courant. Michael Kretschmer est ministre-président (CDU) du Land de Saxe (4 millions d’habitants). Il a déclaré que la guerre en Ukraine devait maintenant être «congelée».

Comment se brouiller avec ses amis, la recette suisse
Il y a parfois des voisins qui semblent prendre plaisir à semer la bisbille entre eux. Pour un oui ou pour un non. La Suisse en est là. Elle accumule les faux pas, les maladresses et même les provocations dans sa politique étrangère. Face à la France dans l’affaire de l’avion de combat − on en sait plus aujourd’hui −, face à l’UE, face maintenant aux amis de l’Ukraine qui voulaient faire soigner ici des blessés, ce que le DFAE refuse. Comment diable sortir d’une telle pétaudière diplomatique?