Portrait de l’écrivain en saltimbanque

Publié le 2 septembre 2020
Dans quelques jours, comme à chaque fin d’été, le Livre sur les quais va battre son plein à Morges. Encore que, pour cette 11e édition, il ne sera guère question des quais et du spectacle du lac. Covid-19 oblige, pas de tentes aux signatures cette année, une poignée d’écrivains seulement et des rencontres confinées, si l’on peut dire, à quelques salles en ville et sur les bateaux. Fête néanmoins il y aura, à laquelle les élus se prêteront de bonne grâce. Aujourd’hui être écrivain ne consiste en effet plus seulement à publier, mais également à participer à de multiples événements, lectures, tables rondes, performances, créations collectives.

Le plus emblématique des groupe d’écrivaines et d’écrivains pratiquant avec brio cette manière de mettre en scène la littérature, c’est certainement l’AJAR. L’Association des jeunes auteur(e)s romand(e)s qui a vu le jour en 2012. Ils sont une vingtaine, ma foi, tous fort talentueux. Parmi eux, on trouve notamment Fanny Wobmann, à l’origine de l’AJAR; son dernier roman, Nues dans un verre d’eau (2017) a été primé par la Fondation Schiller. Bruno Pellegrino, lauréat l’an dernier du Prix des lecteurs de la Ville de Lausanne pour un roman qui nous emmène sur les pas de Gustave Roud dans le Jorat. On peut citer également Anne-Sophie Subilia, Bourse à l’écriture du Canton de Vaud, ou encore Daniel Vuataz, auteur, avec d’autres, de Stand-by. Saga romanesque s’inspirant des principes des séries TV. Car c’est l’une des caractéristiques de l’AJAR – mais  c’est aussi le cas d’autres collectifs d’auteur(e)s comme Caractères mobiles, par exemple – que de pratiquer une écriture à plusieurs. 
Le premier ouvrage qui en est issu est paru en 2016, Vivre près des tilleuls, remarqué par Flammarion. Texte prétendument autobiographique d’une écrivaine neuchâteloise imaginaire, ou le deuil impossible d’une mère. Un texte qui a donné lieu à plusieurs performances et lectures publiques dans les festivals et les salons littéraires. Ce qui frappe en effet avec l’AJAR, c’est son extraordinaire créativité, qui se déploie dans toutes sortes de directions, mais toujours au service des mots, du récit. Exploration des multiples dimensions de la création littéraire en groupe. Ainsi le collectif a rendu hommage à Corinna Bille à la Maison Rousseau à Genève, est intervenu au Cabaret Voltaire à Zurich, s’est produit au Théâtre 2’21 à Lausanne dans un spectacle intitulé Amours collectives à partir des répon...

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