La Suisse emboîte le pas à Trump

Publié le 30 novembre 2018
Qui l’eût cru? Pourtant, c’est bien ce qui se passe depuis que Ignazio Cassis mène la diplomatie helvétique et que le Conseil fédéral cède sans le dire aux sirènes nationalistes. Les signes de cette dérive se multiplient ces derniers mois. Comme Trump, la Suisse tourne le dos à l’ONU et en fait, au multilatéralisme. C’est nouveau.

Palestine. Notre ministre des affaires étrangères a repris clairement un argument répandu en Israël et à la Maison blanche: l’aide aux réfugiés palestiniens de l’ONU (UNRWA) aggraverait la situation au Moyen-Orient. L’administration a été priée de réduire ses contributions. En clair: les populations déplacées depuis la création de l’Etat d’Israël n’ont qu’à s’installer dans les pays voisins et laisser la place aux colonisations juives. 
Armes nucléaires. Le traité de l’ONU réclamant leur interdiction a été adopté par l’assemblée générale des Nations Unies en juillet 2017, par 122 pays sur 192. La ratification par chaque Etat est en cours. Or, le Conseil fédéral l’a annoncé: il ne signera pas. Avec une curieuse argumentation: il s’agirait de ne pas gêner les puissances nucléaires qui pourraient nous venir en aide en cas de conflit généralisé. Lire: les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne. Qui ne veulent pas de ce texte comme les autres détenteurs de ce type d’armes, dont la Russie bien sûr, mais également un Etat aussi périlleux que le Pakistan. Ce traité est pourtant un instrument diplomatique puissant pour dissuader ceux qui voudraient se lancer dans cette course.
Pacte sur les migrations. C’est la grande affaire de ces jours. Dans le sillage de Trump, plusieurs pays ont annoncé qu’ils n’iraient pas signer cet engagement le 10 décembre prochain, à Marrakech. Quant au Conseil fédéral, qui avait pourtant jugé que ce texte «correspond aux intérêts de la Suisse en matière migratoire», il s’est défaussé sur le Parlement qui risque bien de le mettre à la poubelle. Ironie du sort: les deux Etats qui avaient été chargés de mener les travaux préparatoires n’étaient autres que le Mexique et la Suisse. Il n’y a rien d’ébouriffant dans ce document, nulle contrainte d’en ap...

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