Le «Sursis» de Pierre De Grandi est aussi celui de nous tous

Publié le 7 juillet 2023
Récit clinique et poétique à la fois, mêlant témoignage au jour le jour et réflexions de haute volée, inquiétude et colère, reconnaissance déclarée à la vie et questions éternelles de l’humain confronté à ses fins, le livre du médecin octogénaire rattrapé par le cancer est d’un humaniste éclairé dont la lucidité stoïque, frottée d’humour et de tendresse, devrait parler à tout un chacun.

Ce que l’on aimerait dire évidemment, histoire de rassurer le club des bien-portants, c’est que le nouveau livre de Pierre De Grandi ne concerne ni les trentenaires fringants de tous genres, ni les quadras en forme rutilante, ni même les quinquas ou les sexas qui ont échappé jusque-là aux atteintes diverses de la maladie ou de l’accident, et pourtant non: cela ne serait pas du jeu, vu que le seul fait de naître, la seule condition de mortels qui nous caractérise, djeunes ou vioques, nous place, à brève ou plus longue échéance, dans la situation de vivants en sursis qu’un seul examen suffirait à placer au pied du mur. 
La situation n’est pas nouvelle, maintes fois évoquée en littérature ou au cinéma, notamment avec  La Mort d’Ivan Illitch de Tolstoï, avant le chef-d’œuvre cinématographique que représente Vivre d’Akira Kurosawa, qui expriment le saisissement, la stupeur de qui apprend soudain que ses jours sont comptés. Et que dire alors, que faire avec «ça»?
Mais déjà vous vous récriez: la barbe! Encore un récit de vie! Et quoi: un vieux médecin qui raconte son cancer? Plus banal tu meurs, même si le sarcome en question est du genre rarissime, au point de faire du patient De Grandi un sujet de recherche thérapeutique, pour ainsi dire un cobaye. Or la curiosité médicale à valeur scientifique ajoutée justifie-t-elle la lecture de Sursis? Absolument pas. Car ce livre vous prend à la gorge pour d’autres raisons plus profondes ou confuses et plus persos:  vous tient par la gueule en vous ramenant à votre miroir, toi et moi, vous et elles et toute la bande!
Le cancer, rien que le mot, puis la chose…
Pierre De Grandi raconte qu’il a eu un cancer une première fois, traité et en rémission depuis des années. Ce qui tombe bien, parce que vous aussi: nous sommes des tas, comme ça, a...

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