Pourquoi personne ne veut la paix en Ukraine

Publié le 29 avril 2022

Le président des chefs d’état-major interarmées, Mark Milley, le secrétaire américain à la Défense, Lloyd J. Austin, et le ministre ukrainien de la Défense, Oleksii Reznikov, rencontrent leurs homologues de l’OTAN lors de la réunion du Groupe consultatif sur la défense de l’Ukraine à la base aérienne de Ramstein (Allemagne), le mardi 26 avril.

On le devinait depuis le début du conflit mais c’est désormais avéré, la paix n’aura pas lieu en Ukraine avant longtemps. Au lendemain de leur voyage confidentiel à Kiev le 24 avril, le Secrétaire à la Défense et le Secrétaire d’Etat américains ont annoncé la couleur à leur retour en Pologne: ils veulent «voir la Russie si affaiblie qu’elle ne pourra plus faire des choses telles qu’une invasion de l’Ukraine.» Un porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain a renchéri: nous voulons transformer «cette invasion en échec stratégique pour la Russie» et en «victoire pour l’Ukraine».

Joignant la parole aux actes, les Etats-Unis ont immédiatement annoncé un supplément de 700 millions de dollars de livraisons d’armes à l’Ukraine, portant l’effort de guerre américain à 3,7 milliards de dollars depuis le 24 février, auxquels il convient de rajouter les 4,6 milliards accordés en 2021 et les milliards d’euros d’armements livrés ou promis par les Européens. La folie guerrière que l’on avait reprochée à Poutine en février semble s’être désormais emparée de l’Occident, rendant toute perspective de paix, et même de simple cessez-le-feu, hautement improbable, et faisant de ce conflit de loin le plus dangereux depuis 1945. L’Ouest et l’OTAN paraissent décidés à se battre jusqu’au dernier Ukrainien, et si possible, jusqu’au dernier Russe.

Les deux camps sont désormais murés dans leurs certitudes jusqu’au-boutistes: en dégainant la première, la Russie a indirectement donné raison aux Etats-Unis qui dénonçaient le bellicisme de Poutine. Mais en transformant ce qui était un conflit de voisinage et un problème régional de sécurité en guerre globale d’anéantissement de l’ennemi russe, les Etats-Unis sont en train de donner raison à Poutine qui voyait dans l’attitude hostile de l’OTAN depuis les années 2000 une menace existentielle pour l’existence de son pays.

A partir de là, on ne voit pas très bien comment une paix, même précaire, pourrait advenir. 

De ce point de vue, l’affaire des présumés crimes de guerre de Boutcha aura constitué un tournant décisif, en rendant toute conciliation entre l’Ukraine et la Russie impossible et les négociations entre les deux parties vaines. Ce n’est donc pas un hasard si, depuis un mois, sur le plan militaire, les opérations ont changé de nature en se transformant en guerre d’usure et de grignotages territoriaux, et non plus en guerre de mouvement pour reprendre le langage de 14-18, la Russie revendiquant désormais la «libération» de l’Est et du Sud ukrainiens.

Mais examinons d’abord les caractéristiques de cette confrontation armée inédite entre les deux grandes superpuissances nucléaires. Dès fin février, il est apparu évident que les opérations militaires dépassaient largement le cadre de l’Ukraine et que l’OTAN était massivement mobilisée tant en matière de fournitures d’armes et d’entrainement que de commandement des troupes, de renseignements, de surveillance radar et satellitaire, de cyberguerre, de propagande et d’information et de sanctions économiques. Comme l’a révélé Radio Canada, cela fait des années que des instructeurs canadiens sont présents en Ukraine, formant même des extrémistes des bataillons Azov en dépit d’une loi nationale qui le leur interdisait. Voir aussi le témoignage du reporter français Régis Le Sommier qui s’est retrouvé pris en charge par un officier américain alors qu’il accompagnait des volontaires partis au front.

De fait, de nombreux pays de l’OTAN sont activement engagés contre la Russie dans tous les domaines. On peut donc bien parler d’une «guerre hors limites» ou mieux, d’une guerre illimitée. En proclamant qu’il s’agissait désormais de «battre la Russie», les Etats-Unis ont encore fait monter la tension d’un cran.

La guerre est illimitée dans le temps – elle est faite pour durer le plus longtemps et avec la plus haute intensité possible, la seule limite étant le seuil nucléaire. Elle se distingue donc des guerres d’Afghanistan contre les Soviétiques et de Syrie entre 2015 et 2018 par un degré plus élevé d’agressivité, tout en n’étant pas totale, puisque le niveau nucléaire n’est pas (encore) engagé. Elle est aussi illimitée dans l’espace dans la mesure où le conflit dépasse les seules limites territoriales de l’Ukraine et cherche à déstabiliser – voire à démanteler la Russie et à renverser son gouvernement – la Russie et son voisinage proche, de la Finlande à l’Asie centrale, tout en l’isolant du reste du monde par des trains continus de sanctions économiques et des pressions énormes contre les Etats qui refusent de se joindre à cette curée. Et enfin elle est illimitée dans son spectre d’activités puisqu’elle se déploie dans tous les domaines de l’activité humaine, militaire, cognitive, culturelle, économique, politique, informationnelle, spatiale, scientifique, etc. 

Ce sont donc bien deux mondes qui s’affrontent dans une lutte sans merci: l’un qui prétend se battre pour préserver ses «valeurs démocratiques, libérales et progressistes», et l’autre qui se bat pour préserver son droit à exister de façon différente et pour qui ces valeurs ne sont qu’un manteau d’hypocrisie destiné à masquer une irrépressible ambition d’hégémonie mondiale. Le choc oppose, grosso modo, les 37 pays qui forment l’Occident aux 150 pays qui doutent, hésitent ou s’y opposent, et qui l’ont exprimé en refusant de prendre des sanctions économiques contre la Russie.

En plus de ces obstacles géopolitiques et civilisationnels, un facteur circonstanciel empêche la paix: les élections de mi-mandat qui doivent avoir lieu cet automne aux Etats-Unis. On en parle très peu en Europe. A tort, car il pèse très lourd. Avec un président Biden peu populaire et qui passe pour sénile, les Démocrates misent sur une escalade du conflit pour mobiliser leurs troupes et surtout pour contrer leurs adversaires républicains. C’est d’autant plus facile que les Etats-Unis peuvent mener la guerre par procuration, que la vie de leurs soldats est épargnée, que les sanctions économiques n’affectent que leurs alliés européens et que la haine des Démocrates contre la Russie depuis l’élection manquée d’Hillary Clinton en 2016 ne demande qu’à s’épancher. Malgré le résultat négatif des enquêtes menées par les deux procureurs spéciaux nommés pour investiguer le Russiagate, ils persistent à affirmer que la Russie a truqué les élections de 2016. A Washington, la paix est tout sauf souhaitée, du moins jusqu’à la fin novembre.

Le troisième obstacle à la paix est encore plus décisif, tout en restant tabou en Europe: ce sont les conséquences de l’affaire de Boutcha. Pour l’Occident la messe est dite: c’est un massacre, un crime de guerre, un crime contre l’humanité, un génocide même, commis par les soldats russes. Or le déroulement des faits pose nombre de questions sans réponse: pourquoi le maire de la ville n’a pas parlé de ces massacres lors de sa première intervention le 30 mars? Pourquoi a-t-il fallu attendre trois jours, dont deux pendant lesquels les milices d’Azov et de Safari ont «nettoyé la ville des saboteurs et des complices des Russes», pour voir apparaitre les premières photos de massacre? Pourquoi les images satellites dudit massacre proviennent-elles exclusivement d’une société américaine travaillant pour le Pentagone? Comment se fait-il que la totalité des victimes civiles de Boutcha ait été attribuée aux «exactions» russes alors que la ville, occupée par les Russes, a subi des bombardements très intenses de l’armée ukrainienne pendant quatre semaines? On peut multiplier les interrogations et seul l’avenir dira ce qu’il en a vraiment été. 

Ce qui ne souffre aucune contestation en revanche, c’est l’exposition médiatique des cadavres, dont les photos ont inondé les médias occidentaux pendant des jours et donné lieu aux pèlerinages macabres de tout ce que l’Occident compte de politiciens et de journalistes. Ces hordes de journalistes soigneusement filtrés, encadrés et conduits en bus sur la «scène de crime» pour la filmer n’inspirent rien de bon. Elles transpirent la mise en scène. On les a trop souvent vues, et pour ma part vécues, à Sarajevo ou ailleurs, pour croire tout à fait à leur innocente spontanéité. De même qu’on doit prendre les témoignages recueillis par les micros avec des pincettes, sachant que les habitants vivent dans la terreur des bataillons Azov et des divers escadrons de la mort ukrainiens qui ont récemment liquidé des maires et des négociateurs jugés trop conciliants avec les Russes, mitraillé des soldats russes prisonniers, décapité un soldat russe avec une faucille, etc. Toutes images qu’on peut trouver sur les réseaux sociaux mais dont on a très peu parlé dans nos journaux. 

Dans tous les cas, l’effet Boutcha aura été dévastateur pour la paix. On oublie que la médiatisation du massacre a eu lieu après une avancée des négociations en Turquie, au terme desquelles les Russes avaient annoncé le retrait de leurs troupes du nord de l’Ukraine. Résultat: les Russes ont perdu toute confiance dans la partie ukrainienne et dans le processus de négociation. Ils savent désormais, tout comme les Ukrainiens de l’Est, que s’ils cèdent un pouce du terrain conquis, il sera procédé au même déferlement médiatique et qu’on assimilera la totalité des victimes à des «crimes de guerre» odieux. Quant aux Ukrainiens de l’Est et du Sud, ils ont aussi compris la leçon: ils seront impitoyablement massacrés par les troupes d’Azov, kidnappés ou torturés par le SBU si les Russes les abandonnent, à la manière du blogueur américano-chilien Gonzalo Lira à Kharkov.

De même, la diffusion en boucle de ces images a fait bouillir la haine de la Russie et exacerbé la russophobie chez les Ukrainiens de l’Ouest comme dans les opinions publiques occidentales. Désormais, sur l’ensemble du continent européen à l’ouest du Dniepr, on assiste à une surenchère politique et médiatique pour réclamer plus d’armes, plus de sanctions, plus d’argent pour l’Ukraine et s’opposer à toute tentative sérieuse de dialogue avec la Russie, tandis que les partisans de la paix sont décrits comme des traitres ou des amis du «criminel» Poutine. 

Même pour Zelensky, la négociation est devenue impossible, car il serait aussitôt accusé de pactiser avec le «boucher du Kremlin» par les nationalistes extrémistes de son camp. Sa survie politique, et même physique, serait en jeu. Il est d’ailleurs frappant de constater à quel point le régime ukrainien s’est radicalisé ces dernières semaines avec la surveillance et l’expulsion des journalistes non conformes, mais surtout la dissolution et l’interdiction des partis d’opposition (les partis du bloc de gauche et jugés pro-russes, dont le leader du principal d’entre eux, Viktor Medvedchuk, a été enlevé, mis au secret et proposé d’être libéré en échange de prisonniers russes). On rappellera que les chaines de télévision et les médias considérés comme «hostiles» avaient déjà été fermés. Cette dérive vers l’autoritarisme affecte donc aussi l’Ukraine. 

On ne voit donc pas comment la paix pourrait être rétablie dans un tel climat d’hystérie. On se demande même si l’Occident, qui ne semble plus que parler le langage des armes, n’est pas saisi d’une sorte de folie suicidaire. Dans ces conditions, on peut au mieux espérer un cessez-le-feu et un conflit plus ou moins gelé avec une Ukraine coupée en deux. Mais même de cela on est encore loin! Dans les semaines et les mois qui viennent, avec les livraisons d’armes en cours, les espoirs de victoire proclamés par la coalition occidentale, la résilience d’une économie russe loin de s’effondrer, le soutien confirmé de la Chine et de l’Inde, il faut plutôt s’attendre à une escalade des combats, des tensions internationales… et des propagandes qui les accompagnent!

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