La nouvelle proposition de loi sur les épidémies relance le débat sur les libertés fondamentales

En mars 2020, le Conseil fédéral a déclaré une «situation extraordinaire» et a exhorté la population à «rester chez soi»! © Association des médias suisses
Article publié sur Infosperber du 10 décembre 2025, traduit et adapté par Bon pour la tête
La dernière révision complète de la loi sur les épidémies est entrée en vigueur en 2016. Le Conseil fédéral souhaite maintenant la réviser à nouveau. Pourquoi ?
Le Conseil fédéral avait lancé cette révision durant l’été 2020. Il la justifiait par les enseignements tirés des conséquences de la crise du Covid et la nécessité d’agir.
Nous étions alors en pleine pandémie. Quels problèmes étaient abordés?
Le Conseil fédéral affirme que la crise de la Covid-19 a fait l’objet d’une enquête approfondie. À notre avis, c’est faux. C’est d’ailleurs un point de critique soulevé dans de nombreuses réponses à la consultation sur la révision législative. Avant de réviser cette loi, les erreurs et les dommages causés par la crise de la Covid-19 doivent d’abord faire l’objet d’une enquête approfondie et fondée sur des preuves.
De quels défauts et dommages parlez-vous?
Par exemple, les fermetures d’écoles ou les effets indésirables des vaccins. Les politiciens refusent de reconnaître les victimes des vaccins; à ce jour, très peu de personnes ont reçu une indemnisation.
Le 20 août 2025, le Conseil fédéral et l’Office fédéral de la santé publique ont annoncé que la révision législative apporterait des «améliorations dans la gestion des crises sanitaires». Quels aspects n’ont pas été communiqués à ce moment-là, selon vous?
Dans son communiqué de presse, le Conseil fédéral a présenté son message et son projet de loi, qu’il a soumis au Parlement. Il y est indiqué que la révision «tient compte des observations formulées par de nombreuses parties prenantes lors de la consultation ainsi que des conclusions de plusieurs évaluations sur la gestion de la pandémie de Covid-19». J’ai comparé cette deuxième version révisée du projet de loi avec la première, qui date de novembre 2023: aucune des critiques importantes formulées lors de la consultation n’a été prise en compte!
Pourtant, l’Office fédéral de la santé publique (BAG) a apporté plusieurs modifications au projet…
Je fais référence aux principaux points de critique. Ce sont des aspects fondamentaux.
Par exemple?
Les préoccupations portent notamment sur la concentration des pouvoirs au sein du Conseil fédéral et de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), le risque d’abus — les urgences sanitaires pouvant être instrumentalisées à des fins politiques —, et le risque d’une restriction encore plus rapide des libertés fondamentales. L’OFSP elle-même considère les modifications proposées comme de simples ajustements «sélectifs», tels que la suppression de la formation continue obligatoire des médecins concernant l’utilisation des antibiotiques. De plus, l’OFSP semble principalement mettre en œuvre les critiques formulées par les cantons. Or, une consultation vise également à associer le public à la formation de l’opinion. Si le Conseil fédéral ignore les observations critiques formulées dans le second projet — autrement dit, s’il ne les prend pas au sérieux —, il viole l’objectif de la consultation. Celle-ci devient alors une simple formalité.
Quelle était la critique la plus fréquemment formulée à l’encontre de la première version?
253 organisations et plus de 1500 particuliers ont répondu à la consultation. Le rapport final indique que «la quasi-totalité des particuliers ayant soumis des observations rejettent le projet de loi sur les épidémies.»
Le rapport indique également qu’environ 65 % des organisations ont, sur le principe», approuvé la proposition et que seules 15 % l’ont rejetée.
Les retours d’information débutent souvent par un consensus général — après tout, qui s’opposerait à une meilleure protection de la population? Cependant, au fil des réponses, des critiques diverses, parfois approfondies, ont émergé. Malheureusement, l’OFSP n’a toujours pas précisé la pondération qu’il a appliquée aux réponses lors de son évaluation. Par conséquent, il nous est impossible de déterminer ce que l’OFSP entend par «croyant consensus» ou «évaluation globalement positive».
Selon l’Office fédéral de la santé publique, les particuliers qui ont «largement rejeté» le projet «ont souvent soumis des déclarations identiques».
Les contributions de chaque citoyen — soit plus de 1500 personnes concernées — ont-elles moins de valeur simplement parce qu’elles sont «identiques»? Plus de 1500 déclarations de particuliers représentent un nombre significatif. Ces personnes souhaitaient exprimer leur point de vue, mais contrairement aux partis politiques ou aux associations professionnelles, elles n’ont pas l’habitude de rédiger des réponses aux consultations. Le fait qu’elles aient utilisé des modèles ne diminue en rien la valeur du contenu. Au contraire: ces personnes ont exercé leurs droits civiques! Je trouve une telle déclaration de l’Office fédéral de la santé publique honteuse. L’OFSP et le Conseil fédéral devraient prendre au sérieux le fait que beaucoup s’opposent au projet de loi. La critique la plus fréquente est que le Conseil fédéral et l’OFSP se verraient accorder un pouvoir de décision excessif, sans contrôle démocratique. En cas d’épidémie, le Conseil fédéral prendrait le contrôle. La concentration des pouvoirs serait massive. Des droits fondamentaux, tels que la liberté de réunion ou le droit à l’intégrité physique, pourraient être restreints beaucoup trop rapidement. La participation parlementaire pourrait être supprimée. Cela comporte un risque d’abus.
La crise du coronavirus a démontré la nécessité d’un contrôle centralisé pour que les responsables politiques agissent plus efficacement et plus rapidement. Des retards sont survenus, notamment parce qu’il était difficile de déterminer les responsabilités et qui prendrait en charge les coûts.
Que l’Office fédéral de la santé publique adopte cette position n’est pas surprenant. Les partisans de la révision législative — et l’OFSP en fait clairement partie — sont fermement convaincus qu’un contrôle centralisé est nécessaire pour garantir une action plus rapide, plus efficace et plus performante à l’avenir. En considérant la question avec plus de recul, on constate que, selon les circonstances, des solutions régionales peuvent être mieux adaptées et donc plus appropriées. Finalement, cette révision partielle vise aussi, fondamentalement, à garantir que la liberté, les droits fondamentaux et le fédéralisme ne soient plus jamais sacrifiés aussi négligemment.
Clarifier les responsabilités entre les cantons et le gouvernement fédéral a constitué un défi au début de la pandémie. Prenons l’exemple du traçage des contacts: selon l’OFSP, le système mis en place par la Confédération «n’a pas été utilisé par la plupart des cantons pour diverses raisons, et ils ont développé leurs propres systèmes». La loi révisée sur les épidémies vise à encadrer ces questions en amont. Pourquoi considérez-vous cela comme un problème?
La santé relève de la compétence des cantons. La loi sur les épidémies de 2012, en vigueur depuis 2016, a déjà transféré de nombreuses compétences au gouvernement fédéral. Et ce transfert va encore s’intensifier. En clair, en cas de nouvelle crise sanitaire, les cantons ne seraient que de simples organes d’exécution pour le compte de la Confédération. Les cantons de Suisse centrale et de Berne, par exemple, s’opposent déjà à cette réforme législative.
Le projet de loi stipule que «le Conseil fédéral devra, à l’avenir, après avoir consulté les cantons et le Parlement, définir les objectifs et les principes de la gestion des crises.» Les cantons seront-ils donc consultés?
Écouter ne signifie pas décider. Nous l’avons constaté pendant la pandémie de Covid-19: le Conseil fédéral décide, les cantons appliquent et l’Office fédéral de la santé publique contrôle.
Quelles autres demandes formulées dans les réponses à la consultation n’ont pas été mises en œuvre selon vous?
Outre les critiques concernant la gestion inadéquate de la période Covid, l’éventuelle introduction de tests ou de vaccinations obligatoires figurait parmi les dix points les plus fréquemment mentionnés.
D’après les informations fédérales, la vaccination obligatoire est exclue et ne sera introduite que «dans des cas exceptionnels et extrêmes présentant un danger important, et uniquement pour les groupes de personnes vulnérables ou particulièrement exposés».
Cela est stipulé dans la loi sur les épidémies depuis 2016, mais beaucoup l’ignoraient. La conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider répète sans cesse: «Il n’y a pas de vaccination obligatoire.» C’est pinailler. Si, par exemple, un employé d’hôpital refuse de se faire vacciner, l’employeur doit lui confier une autre tâche. Or, en 2020, on proposait souvent aux employés de choisir entre «vaccination ou licenciement», ce qui revient à les rendre indirectement obligatoires. Par ailleurs, la Constitution fédérale garantit l’intégrité physique.
Oui, mais il s’agit aussi de la sécurité physique des patients. Ils ne veulent pas être contaminés par du personnel hospitalier non vacciné.
Nous savons que la vaccination n’a pas empêché la transmission du virus. Conformément aux recommandations de l’OMS, les taux de vaccination sont en hausse. La vaccination doit être étendue en Suisse et le pourcentage de personnes vaccinées doit augmenter. Je fais référence au plan de vaccination suisse. La révision de la loi sur les épidémies pourrait entraîner un élargissement de la vaccination obligatoire. De plus, les cantons devront veiller, «en cas de danger particulier», à ce que «le plus grand nombre de personnes possible puisse être vacciné dans les plus brefs délais». L’Office fédéral de la santé publique assurera le suivi de la couverture vaccinale.
Selon le projet de loi, une «menace particulière pour la santé publique» existe déjà lorsque «le risque d’infection ou de propagation d’un agent pathogène spécifique est accru». Nous sommes confrontés à de telles situations chaque hiver. Le Conseil fédéral pourrait-il déclarer une «menace particulière» chaque année?
Oui, cela pourrait effectivement s’appliquer chaque hiver. Cet article de loi est formulé en termes très généraux. Ce sont le Conseil fédéral et l’OFSP qui déterminent l’existence d’une «menace particulière». Cette détermination sert ensuite de base à de nombreuses mesures que le Conseil fédéral pourrait ordonner en vertu de la loi révisée — un élargissement considérable de ses pouvoirs. De nombreux articles de loi font référence à cette section. Il s’agit donc d’un levier ayant un impact significatif. Par ailleurs, le Règlement sanitaire international (RSI) de l’OMS est tout aussi vague. Pour déclarer une «urgence pandémique», un «risque élevé» de propagation géographique étendue ou un «risque élevé» de dépassement des capacités de réponse du système de santé suffisent.
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© zVg
Andrea Staubli est avocate, médiatrice et coach. Elle a été juge présidente au tribunal d’instance de Bade pendant plus de 20 ans. Ses domaines d’expertise comprennent le droit civil, le droit de la famille et le droit de la protection de l’enfance et des adultes. Elle est également responsable bénévole du département juridique de l’«Alliance pour une Suisse libre», qui a lancé une pétition en ligne et annoncé la tenue d’un référendum.
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