«Je ne sais rien sur les impôts, le loyer ou les assurances»

Publié le 19 février 2019
Les journaux ont annoncé que les étudiants seraient bientôt majoritaires en Suisse. Milosz Matuschek critique les «moutons orientables».


Un article original de Jürg Müller-Muralt, pour Infosperber

Une traduction de Jonas Follonier


Generation Chillstand est le titre du dernier livre de l’avocat et publiciste Milosz Matuschek. Celui-ci cite un tweet partagé à des milliers de reprises et émanant de l’étudiante de 17 ans de l’époque, Naina: «J’ai presque 18 ans et je n’ai aucune idée des impôts, du loyer ou des assurances. Mais je peux écrire une analyse de poème. En quatre langues.» Il en va de même pour la plupart des diplômés des collèges et universités. Pour Matuschek, qui a passé 17 ans à l’université en tant qu’étudiant et professeur, les écoles et les collèges sont un cadre pour produire les rouages de l’Etat, de l’économie et de la société.

«D’où vient l’argent?»

«As-tu déjà appris à l’école d’où vient l’argent?», demande Matuschek de façon rhétorique. Les puissants voudraient que le système monétaire reste un mystère pour la plupart des gens. La vérité de base est simple: notre système monétaire se compose de plus de 90% d’argent créé dans des ordinateurs à partir de rien. Il n’est soutenu ou garanti par aucune valeur telle que l’or ou l’argent. Ni un empire mondial ni un Etat n’ont pu survivre dans l’histoire à un système de monnaie de pur papier: «Avec 1 milliard de Reichsmarks, vous pouvez boucher un trou dans le mur aujourd’hui. Par contre, avec une petite pièce d’or de l’époque d’Alexandre le Grand, vous pouvez aujourd’hui encore payer le loyer de votre chambre d’étudiant pour six mois.»

La question de l’origine de l’argent est aujourd’hui considérée comme hérétique, du fait que cette question affecte la stabilité et la légitimité de l’Etat: «Nous faisons partie d’une expérience globale dont la fin approche lentement mais sûrement.»

Depuis 1971, le dollar n’est plus couvert par l’or; l’euro ne l’a jamais été. Notre système financier est aujourd’hui un système de croyances: «Celui-ci fonctionne tant qu’il y a assez de croyants.»

«Les contrats d’assurances-vie sont des ramassis de conneries»

Il vaudrait mieux pour les personnes qui sont au pouvoir que même les «étudiants» ne comprennent pas grand-chose à l’argent et aux assurances. Car qui investirait dans des assurances-vie ou des caisses de pension qui financent l’Etat par l’achat d’obligations d’Etat mais qui subissent des pertes? C’est le cas aujourd’hui en Allemagne avec un taux d’inflation de 2% et un taux d’intérêt inférieur à 1%.

Les citoyens ne seraient prêts à perdre de l’argent avec de telles assurances que parce qu’on leur a fait passer la pilule avec les slogans «prévoyance vieillesse», «écart de pension» ou «pauvreté vieillesse». La peur inculque les comportements. La meilleure publicité, c’est la peur.

Les épargnants ne gagnent de toute façon rien d’une assurance-vie, parce que le risque de la vie, c’est la mort. La prévoyance n’a rien à y gagner. Mais des millions de personnes achètent de telles «assurances», qui sont en fait selon l’auteur des «ramassis de conneries» (Schrottpläne).

En Allemagne, la moitié de toutes les assurances-vie sont résiliées au fil des ans avec une perte garantie. Car la valeur de rachat est inférieure au montant versé.

En Allemagne, les compagnies d’assurance investissent la majeure partie des primes qu’elles reçoivent dans des obligations d’Etat. «Du point de vue de l’Etat, le pire serait un revenu de base inconditionnel.» Celui-ci ôterait aux citoyens la peur de la pauvreté et de la vieillesse.

Matuschek conclut cette partie du livre par une citation d’Henry Ford: «Si les citoyens savaient comment fonctionne notre système monétaire et économique, nous aurions une révolution avant le lever du jour.»

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