Entre Zermatt et l’île de Pâques, la mondialisation nous guette…

Publié le 30 mai 2019
La globalisation ne nous aura pas: de la plus haute cafète du monde, au sommet du Petit Cervin, aux îles paradisiaques plus ou moins protégées des funestes tours operators, l’humanité lucide – à savoir nous, Européens ou citoyens du monde insoumis –, se réveille et n’ira pas «dans le mur». Avec «Demain l’Europe», le sinologue Jean-François Billeter indique des pistes. Cela au moment même où, aux Journées de Soleure, nos «autrices et auteurs» vont seriner leurs vieilles rengaines… 

Cette chronique, dédiée à l’Oxymore universel que symbolise la splendeur atroce du monde actuel, s’est amorcée mentalement dans le chaos high-tech du restau le plus haut du monde – dixit la pub – à l’enseigne du Matterhorn Glacier Paradise, altitude: 3883 mètres au-dessus des déchets de la mer, au milieu d’une foule de Japonais et d’Américains, d’Indiens et de Chinois, de têtes blanches russes et de têtes «blondes» indo-pakistanaises, et je venais de m’incliner devant Notre Seigneur crucifié tout caparaçonné de neige glacée qui domine la terrasse sommitale où mes sœurs et frères humains s’immortalisaient à grand renfort de selfies, quand je me dis, une fois de plus, que l’homme est capable de tout ça: capable du Christ et capable des génocides – et la femme suit avec la trousse de secours...

© JLK
C’était la veille des élections européennes, dont je n’attendais rien que d’indicatif, et l’avant-veille de la grève des femmes du 14 juin – coïncidant avec le jour de ma naissance, sous le signe des Gémeaux,  et celle d’Ernesto Guevara dit Le Che –, dont je ne savais à vrai dire trop que penser tant j’ai appris, dès mes vingt ans, à me méfier des gesticulations collectives et des opinions proclamées sans suite.
En slurpant mon bol de goulache européenne à douze balles face aux Géants des Alpes – du Cervin à la Dent Blanche et, de l’autre côté, du Dôme des Mischabel au Mont Rose et au tout proche Breithorn –, je nous revoyais, plus de cinquante printemps plus tôt, brassant la poudreuse de Saas-Fee à Chamonix, via Zermatt et Arolla, suivant la mythique Haute Route, et deux petits fiancés pakistanais, maintenant, tournant le dos à l’imprenable panorama, se régalaient de noodle-chicken en gobelets de carton tout en baragouinant une langue proche du patois zermattois, avant de re...

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