Toutes les cartes rebattues

Publié le 28 octobre 2019

Vladimir Poutine aux côtés de Bachar el-Assad, sur la base syrienne de Khmeimim, 2017. – © Wikimedia Commons

Rien n’est plus comme avant. La décision de Donald Trump de se retirer de Syrie, de lâcher les alliés kurdes, est un acte de plus – il y en eut tant d’autres – qui marginalise Américains et Européens au Moyen-Orient. C’est la Russie qui maintenant tente de tirer les ficelles, avec son protégé syrien, la Turquie et l’Iran pas loin. L’Europe? Hors jeu, malgré une soudaine et étonnante initiative allemande.

On peut ne pas suivre au jour le jour les événements qui se précipitent et essayer néanmoins de comprendre le bouleversement géostratégique en cours. Compatir avec les Kurdes isolés et martyrisés ne suffit pas.

Le pacha Erdogan a donc deux projets. Créer une zone tampon qui isolerait les forces kurdes en Syrie, les empêchant d’aider le PKK dans son pays, une obsession. Et élargir cet espace pour y envoyer jusqu’à 3 millions de réfugiés sur sol turc. Les Etats-Unis et les Européens laissent faire, protestant juste pour la forme. L’idée soudain lancée par Annegret Kramp-Karrenbauer, Ministre de la défense allemande, d’envoyer des troupes (jusqu’à 40 000 hommes!) pour apaiser le nord de la Syrie n’a aucune chance d’aboutir. Faute de soutien en Allemagne, faute de préparation diplomatique, faute d’avoir informé les alliés européens. Ce sont donc les Russes qui agissent sur le terrain et tentent de trouver une issue négociée. Ils approuvent une zone de sécurité à la frontière turque mais pas davantage, car ils souhaitent que l’Etat syrien contrôle à nouveau la plus grande partie possible de son territoire. Poutine a un atout: il a su établir des liens avec tous les acteurs en présence. Et ses troupes sont présentes sur place: elles patrouillent déjà avec les Turcs ou avec les Syriens pour maintenir le calme dans le nord de la Syrie. Avec un certain succès, semble-t-il.

Les Européens sont mal placés pour s’en désoler. Pendant des années, ils ont soutenu, la France en tête, les mouvances islamistes...

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