Anonymes contre Identifiés: nouvelle lutte des classes

Publié le 18 novembre 2022
Les médias se font volontiers les défenseurs de l’égalité et les contempteurs de la discrimination. Tout en en créant de nouvelles. Notamment, celle entre les «anonymes», «gens de rien», et les «identifiés», «gens de bien». La médiacratie invente des catégories sociales pour son propre usage.

La médiacratie1 considère la masse des gens comme une nébuleuse indistincte qu’elle recouvre sous le terme d’«anonymes». Qui pleurent Johnny Hallyday et autres pipoles décédés? «La foule des anonymes». Ce ne sera jamais «La foule des Parisiens» (ou des Lyonnais ou des Pétrocoriens, voire des Réginaburgiens, sans oublier dans nos contrées les Staviacois ou les Octoduriens, entre autres). Ce serait donner aux individus qui la composent une forme d’identité, un embryon de statut, même réduits à l’appartenance municipale. Inconcevable pour les médiacrates! L’anonyme doit rester tel, sans autre visage que celui qui brouillarde dans le flou de la caméra. 
Dès que vous lui concédez un statut personnel, l’anonyme n’en est plus un, comme vous le confirmerait La Palice, et de sujet, il risque de devenir citoyen. C’est l’écueil à éviter. La «foule des anonymes» ne saurait se muer en «peuple des citoyens». Trop périlleux pour tous les pouvoirs.
On leur vole même leur quart d’heure de célébrité!
Toutefois, les besoins de la narration radiophonique ou télévisuelle, exigent que l’on extirpe un ou deux spécimens de cette nébuleuse des «anonymes». Une séquence d’un téléjournal quelconque est-elle consacrée à la Toussaint? Aussitôt, une équipe investit le magasin d’une fleuriste pour l’interviewer. Mais vous ne connaîtrez jamais son nom de famille. Elle est uniquement présentée sous son prénom.
«Merci, Geneviève, de nous avoir apporté votre témoignage!» Et Geneviève rejoint bien vite l’anonymat, comme Paul le boucher, Kevin le serrurier, Octavine l’aide-soignante… Tous ces prénoms qui sont ainsi précipités dans le puits de l’oubli médiacrate. La médiacratie leur a même volé leur quart d’heure de célébrité puisque jamais leur nom de famille sera prononcé.
Les damnés de l’audiovisuel
Ce ph...

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