Drahi: l’ogre qui se fait dévorer

Publié le 24 novembre 2017
L’histoire du géant français des télécoms, de son ascension, de sa gloire à la déroute récente, est romanesque. Elle est surtout révélatrice des folles errances de la finance. Une leçon de choses. La société de Patrick Drahi, Altice, tremble sur ses bases avec 53 milliards de dettes. Cotée à la bourse d’Amsterdam, l’action a perdu plus de la moitié de sa valeur en quelques semaines. Les investisseurs ont eu longtemps les yeux doux pour cet ambitieux, ils le laissent tomber aujourd’hui. C’est le jeu. Avec sa cavalcade irrationnelle d’emballements et de retournements.

Patrick Drahi, né dans une famille juive marocaine, a fait de brillantes études en France. Il a commencé sa carrière chez UPC à Zurich, et il est resté attaché à la Suisse: son discret état-major se trouve dans le quartier de Rive, à Genève, sa résidence fiscale (au forfait, merci!) à Zermatt. 
Mais ces temps-ci, très présent à Paris, il tente de redresser la compagnie de téléphonie SFR que nombre d’abonnés désertent, déçus par le service et par des contenus coûteux. A-t-il rassuré ses collaborateurs qu’il a enfin rencontrés l’autre jour? Pas sûr. «Maintenant, nous allons mieux nous occuper des clients…», a-t-il déclaré ingénument.
Le fringant quinquagénaire franco-israélien subit une claque comme il n’en a jamais reçue au long de sa fulgurante ascension. Mais sa famille et lui n’ont pas trop à s’en faire. Sa fortune personnelle a certes pris un coup de 6,5 milliards d’euros dans la tourmente, mais elle reste considérable, il possède de nombreux biens immobiliers, à Zermatt donc, à Genève, à Paris, à New York et à Tel Aviv. Sans parler de son yacht de 180 mètres.
Et la machine s'est soudainement grippée...
L’étendue de l’empire Altice (créé en 2001) est vertigineuse. Tout a commencé en France avec le plus grand réseau câblé dans lequel Drahi a vu l'eldorado. Puis le réseau de télécoms SFR, arraché en 2014 au terme d’une homérique bagarre avec Bouygues. Au passage, rachat du quotidien Libération et du groupe L’Express. Mais le virtuose tous azimuths acquiert aussi des opérateurs au Portugal et en Israël où il possède de plus une chaîne TV, i24 News (en hébreu, anglais et français). A Genève, l’oligarque s’est offert la startup de l’entrepreneur français Pierre Chappaz, Teads (leader de pub en vidéo), pour 305 millions. Une paille.
Cet été, à la veille de la descente aux...

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