Salvini, cet «accident de l’histoire»

Publié le 30 janvier 2019
L’extrême droite est désormais en bonne place à la tête de l’Italie en la personne du ministre de l’Intérieur, Matteo Salvini. Le centre de réfugiés de Castelnuovo di Porto, visité par le pape en 2016, a été brutalement fermé le 22 janvier et le responsable de la politique nationale républicaine souhaite infliger le même sort à tous les ports du pays, afin d’empêcher l’arrivée des migrants. Mais certains maires du sud de la Botte ne l’entendent pas de cette oreille et appellent à la «désobéissance civile». Rencontre, en direct des Pouilles, avec l’un de ces élus qui n’a pas l’intention de se laisser dicter sa conduite.

Traduction de l’interview: Florence Perret

Riccardo Rossi a accédé, en juin 2018, à la mairie de Brindisi (ville de plus de 88'000 habitants située dans la région des Pouilles, sur la côte adriatique, ndlr). Début janvier, ce politicien socialiste de 54 ans s’est révolté avec virulence contre la position de Matteo Salvini, qui veut fermer les ports italiens aux arrivées de migrants récupérés en mer par les bateaux de sauvetage. Evoquant un «devoir moral», l’élu a appelé à la «désobéissance civile».

Dans son lumineux bureau au parquet reluisant, c’est un homme affable et souriant qui nous accueille avec bonhomie. Mais derrière cette apparence calme et détendue, le discours est convaincu, les mots sont percutants et la position est claire: «L’Italie a des responsabilités lourdes au sein de l’Europe, commence Riccardo Rossi. C’est un pays de frontières et il n’est bien sûr pas question pour lui d’assumer cela seul de son côté, mais engager un tel bras de fer avec des personnes sauvées en mer n’est pas acceptable. La dernière fois, c’était en pleine période de Noël alors que le Sea Watch arrivait avec 49 migrants, dont des femmes et des enfants. Le navire n’a pas été autorisé à accoster en Italie. Cela n’est pas le comportement d’un pays civilisé et démocratique (les migrants ont finalement été accueillis par Malte après deux semaines d’errance maritime, ndlr). C’est pourquoi, comme d’autres maires, j’ai riposté en disant qu’au contraire nous garderons nos ports ouverts. Un acte politique pour rappeler qu’historiquement le port de Brindisi est ouvert depuis des millénaires et qu’il le restera. Et que l’on peut aussi considérer Salvini comme un accident de l’Histoire.»

Prochainement: rencontre avec ces migrants qui comprennent Salvini

A Brindisi – où la communauté alb...

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