Monnaie de singe
© Sarah Coulaty
Elle a un porte-monnaie à gousset en cuir vert avec un gros fermoir doré. C’est le cadeau que lui avait offert son patron lorsqu’elle a pris sa retraite. Il y a déjà vingt ans. Ce porte-monnaie démodé, qui fait clic quand elle le ferme, c’est sa dignité.
Elle n’a pas de retraite, pas d’économie, vit avec le minimum AVS et quelque aide de l’Hospice générale. Elle ne se plaint pas et quand elle demande 20 ou 50 francs d’avance, à ses voisins ou aux commerçants, elle rend toujours au sou près, plus quelques biscuits pour remercier.
Venue d’Italie dans les années 60 pour rejoindre sa sœur, elle a travaillé dans une mercerie. Elle aurait bien voulu se marier mais l’homme qui la convoitait l’était déjà. A ce qu’elle dit, elle a toujours été sociable, bavarde et prête à blaguer. Elle l’est restée, et quand elle va chez l’épicier en bas de chez elle pour s’offrir sa petite bouteille de rosé, elle cause pendant des heures. Carlotta, c’est la star du quartier. Elle y vit depuis quarante ans et tutoie tout le monde. Privilège de l’âge.
Mais depuis quelque temps, la rue l’angoisse. Sujette à des crises de panique, elle n’ose plus sortir de chez elle. C’est à peine si elle descend jusqu’à la boîte aux lettres.
Ce jour-là, le 25 du mois, elle attend le facteur. Comme il sait qu’elle aime la visite, il prend le temps de monter au quatrième étage pour lui remettre en mains propres...
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