Le nécessaire et le superflu: l’aventure du commentaire

Publié le 7 avril 2023
Jean Galard dans «Conversations avec les choses muettes» qui vient de paraître à L’Atelier contemporain se demande si pour apprécier une œuvre d’art et la comprendre, il faut en connaître la date et l’époque, le nom de l’auteur et sa place dans l’histoire de l’art? Et les intentions de l’artiste, faut-il les connaître aussi? Existe-il des œuvres qui ne requièrent aucune information pour être appréciées? Comprises? Aimées? Qu’est-ce qui est indispensable et qu’est ce qui est superflu?

Comment apprécier une œuvre d'art? Faut-il une formation, une éducation particulière, lire des choses savantes ou se laisser porter par l'étonnement spontané, le mystère de la création? Autant de questions sans aucune réponse vraiment satisfaisante et définitive. La grâce d'une statue, l'éblouissement des couleurs, la virtuosité d’un pinceau ont-elles besoin d’intermédiaire pour émouvoir notre sensibilité? Jonglant avec des anecdotes à foison, l’auteur gambade dans les sentiers de la médiation culturelle si tendance aujourd’hui.
Les musées se multiplient et leurs visiteurs aussi
Oui, les musées se multiplient et n'ont jamais été aussi fréquentés. Le Louvre reste l’institution la plus visitée, suivi par le Vatican, et le British Museum à Londres. Aujourd’hui, visiter une ville, c’est avant tout visiter ses principaux musées et les visiteurs souhaitent transmettre leur goût à leurs enfants. Mais devant les tableaux, les interactions familiales sont courtes et limitées le plus souvent à l’identification de la scène et même cette simple identification nécessite un savoir spécifique. Bref, pour voir, que faut-il savoir?
Pierre Bourdieu affirmait à cet égard que l’importance des cartels (plaque fixée à proximité d'un objet et donnant diverses informations) n’était pas ce qu’il y avait écrit dessus mais le fait qu’ils existaient, car leur existence prouvait qu’il y avait quelque chose à expliquer, que jouir d’une œuvre d’art n’était pas un talent inné mais le résultat d’un savoir acquis. Il disait aussi «le musée est important pour ceux qui y vont dans la mesure où il leur permet de se distinguer de ceux qui n'y vont pas». Affirmation sans doute périmée puisqu’il semble qu’à présent tout le monde y va. Emile Zola, dans L’Assommoir, avait pressentit l’analyse de Pierre Bourdieu...

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