Eugène Burnand, le peintre vaudois qui peignit les visages de la guerre abominable

Publié le 12 novembre 2017

Rarement hommage n’a été rendu à ces hommes venus de loin, sacrifiés pour une guerre qui leur était plutôt étrangère. Ici, un tirailleur tonkinois de l’armée française. – © Eugène Burnand

Le musée de la Légion d’honneur à Paris n’est pas connu pour sortir des chemins de l’histoire officielle française. Cette maison peu connue des touristes, à deux pas du Musée d’Orsay, est dédiée à la gloire de la Nation et à ses figures honorées, célèbres ou pas. Cette année, une surprise. Le 11 novembre, jour commémoratif de la fin de la Première Guerre mondiale, s’ouvrait en ce lieu une exposition qui indique un changement de regard.

Le peintre vaudois Eugène Burnand (1850-1921) originaire de Moudon qui, après des études à Florence et à Zurich, a partagé sa vie entre la Suisse et la France, a passé beaucoup de temps à Marseille et à Montpellier, en pleine guerre, en 1917.

Autoportrait, Musée Eugène Burnand, Moudon. © Musée Eugène Burnand.

C’est là qu’il a peint des portraits impressionnants. Des visages de soldats rentrés du front, venus du monde entier pour soutenir la France. On peut les voir jusqu’au 18 février 2018.

Le message? Ce ne sont pas que des Français «de souche» qui ont péri dans ce massacre européen. Rarement hommage n’a été rendu à ces hommes venus de loin, sacrifiés pour une guerre qui leur était plutôt étrangère.

Emmanuel Macron a eu raison de célébrer ce 11 novembre avec le président allemand Frank-Walter Steinmeier à Harmannwillerskopf (Haut-Rhin) pour rappeler la tâche pacifique de l’Europe. Un musée de la Première Guerre mondiale s’ouvre dans cette petite localité alsacienne où Français et Allemands s’entretuèrent.

Restera à éclairer les origines de ce conflit suicidaire. En 1914, bien des Français le désiraient, l’état-major prussien aussi, les Russes croyaient pouvoir s’imposer, les Autrichiens espéraient sauver leur empire. Les hommes politiques firent preuve d’un aveuglement inouï. Mais voilà qui heurte l’historiographie officielle des uns et des autres.

Ces portraits de Burnand, toutes ces images, ces films qui remontent à la surface ces temps-ci devraient nous inciter à plonger dans la foule des livres qui enfin racontent la vraie histoire de l’abominable boucherie de 14-18.


«Cent portraits pour un centenaire», jusqu’au 11 février 2018, du mercredi au dimanche, de 13h à 18h. Musée de la Légion d’honneur et des ordres de chevalerie, 2, rue de la Légion d’honneur, 75007 Paris.
Conférences: «La carrière du maréchal Foch à travers ses ordres et décorations», le 18 janvier à 19h et «Usage ethnographique des portraits de soldats de la Grande Guerre», le 30 janvier à 19h

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

À lire aussi

Politique

A confondre le verbe et l’action, on risque de se planter

De tout temps, dans la galerie des puissants, il y eut les taiseux obstinés et les bavards virevoltants. Donald Trump fait mieux. Il se veut le sorcier qui touille dans la marmite brûlante de ses colères et de ses désirs. Il en jaillit toutes sortes de bizarreries. L’occasion de s’interroger: (...)

Jacques Pilet
Philosophie

Notre dernière édition avant la fusion

Dès le vendredi 3 octobre, vous retrouverez les articles de «Bon pour la tête» sur un nouveau site que nous créons avec nos amis d’«Antithèse». Un nouveau site et de nouveaux contenus mais toujours la même foi dans le débat d’idées, l’indépendance d’esprit, la liberté de penser.

Bon pour la tête
Politique

Les fantasmes des chefs de guerre suisses

Il arrive que le verrou des non-dits finisse par sauter. Ainsi on apprend au détour d’une longue interview dans la NZZ que le F-35 a été choisi pas tant pour protéger notre ciel que pour aller bombarder des cibles à des centaines, des milliers de kilomètres de la Suisse. En (...)

Jacques Pilet
PolitiqueAccès libre

PFAS: un risque invisible que la Suisse préfère ignorer

Malgré la présence avérée de substances chimiques éternelles dans les sols, l’eau, la nourriture et le sang de la population, Berne renonce à une étude nationale et reporte l’adoption de mesures contraignantes. Un choix politique qui privilégie l’économie à court terme au détriment de la santé publique.

Politique

L’identité numérique, miracle ou mirage?

Le 28 septembre, les Suisses se prononceront à nouveau sur l’identité numérique (e-ID). Cette fois, le Conseil fédéral revient avec une version révisée, baptisée «swiyu», présentée comme une solution étatique garantissant la souveraineté des données. Mais ce projet, déjà bien avancé, suscite des inquiétudes quant à son coût, sa gestion, (...)

Anne Voeffray
Politique

Démocratie en panne, colère en marche

En France, ce n’est pas tant le tourniquet des premiers ministres et la détestation de Macron qui inquiètent, c’est le fossé qui se creuse entre la société et le cirque politicien, avec son jeu d’ambitions qui paralyse le pays. Le tableau n’est guère plus réjouissant en Allemagne, en Grande-Bretagne, en (...)

Jacques Pilet
Politique

Le voyage chahuté d’Ursula

Il est fait grand bruit autour d’une fable alarmiste, d’un incident minuscule lors du vol de la présidente de la Commission européenne entre la Pologne et la Bulgarie: la perturbation du GPS attribuée à la Russie et facilement surmontée comme cela est possible sur tous les avions. Quasiment rien en (...)

Jacques Pilet
EconomieAccès libre

Nos médicaments encore plus chers? La faute à Trump!

En Suisse, les médicaments sont 50 à 100 % plus coûteux que dans le reste de l’Europe. Pourtant, malgré des bénéfices records, les géants suisses de la pharmaceutique font pression sur le Conseil fédéral pour répercuter sur le marché suisse ce qu’ils risquent de perdre aux Etats-Unis en raison des (...)

Christof Leisinger
Politique

Le trio des va-t-en-guerre aux poches trouées

L’Allemand Merz, le Français Macron et le Britannique Starmer ont trois points communs. Chez eux, ils font face à une situation politique, économique et sociale dramatique. Ils donnent le ton chez les partisans d’affaiblir la Russie par tous les moyens au nom de la défense de l’Ukraine et marginalisent les (...)

Jacques Pilet
PolitiqueAccès libre

Microsoft s’enrichit sur le dos des Palestiniens

Selon des révélations étayées par des sources issues de la multinationale américaine et des services secrets israéliens, un cloud spécial a été mis en place pour intercepter les communications de millions de Palestiniens. Des données qu’Israël utilise pour mener sa guerre de représailles ethniques dans la bande de Gaza et (...)

Bon pour la tête
Politique

La géopolitique en mode messianique

Fascinés par le grand jeu mené à Anchorage et Washington, nous avons quelque peu détourné nos regards du Moyen-Orient. Où les tragédies n’en finissent pas, à Gaza et dans le voisinage d’Israël. Où, malgré divers pourparlers, aucun sursis, aucun accord de paix ne sont en vue. Où un nouvel assaut (...)

Jacques Pilet
PolitiqueAccès libre

Pourquoi les Etats-Unis n’ont-ils pas encore interdit TikTok?

L’an passé, le congrès américain a décidé que le réseau social devait être interdit s’il restait en mains chinoises, ceci afin d’éviter que les données des étatsuniens soient récupérées par Pekin. Il s’agissait prétendument d’une question de «sécurité nationale». Mais le président Trump a pour la troisième fois reporté l’interdiction, (...)

Urs P. Gasche
Politique

Les Européens devant l’immense défi ukrainien

On peut rêver. Imaginons que Trump et Poutine tombent d’accord sur un cessez-le-feu, sur les grandes lignes d’un accord finalement approuvé par Zelensky. Que feraient alors les Européens, si fâchés de ne pas avoir été invités en Alaska? Que cette hypothèse se confirme ou pas, plusieurs défis controversés les attendent. (...)

Jacques Pilet
Culture

Des nouvelles de la fusion de «Bon pour la tête» avec «Antithèse»

Le nouveau site sera opérationnel au début du mois d’octobre. Voici quelques explications pour nos abonnés, notamment concernant le prix de l’abonnement qui pour eux ne changera pas.

Bon pour la tête
EconomieAccès libre

Comment la famille Trump s’enrichit de manière éhontée

Les deux fils du président américain viennent de créer une entreprise destinée à être introduite en bourse afin de profiter de subventions et de contrats publics de la part du gouvernement fédéral dirigé par leur père.

Urs P. Gasche
Politique

Trouver le juste cap dans la tempête

La tornade qui, en Europe, s’est concentrée sur la Suisse nous laisse ébaubis. Le gros temps durera. Ou s’éclaircira, ou empirera, selon les caprices du grand manitou américain. Les plaies seront douloureuses, la solidarité nécessaire. Il s’agira surtout de définir le cap à suivre à long terme, à dix, à (...)

Jacques Pilet