«Autrices», «membresses» et «apprentisses»: voici le «féminin ostentatoire»

«Cosmonautrice» , «pilotesse», «journaleuse»? Mais n’est-ce pas une manière d’exacerber une différenciation de genre elle-même déjà ringarde? Photo: Depuis sa création en 1959, la poupée Barbie a déjà endossé les habits de plus de 200 métiers. – © DR
«Déléguée générale du Québec à Paris»: lorsqu’en 1981, Louise Beaudoin a pris ses fonctions dans la capitale française en insistant sur cette féminisation de son titre, ces deux petits «e» finaux ont fait sensation. Maurice Druon, gardien du temple de l’Académie française, a failli en avaler son épée.
La femme politique québécoise portait haut le drapeau d’un mouvement en phase avec l’évolution des mœurs: celui de la féminisation des titres et des fonctions. Il s’est rapidement étendu à la Belgique et à la Suisse romande: à l’aube des années 1990, on a commencé à dire «syndique» et «préfète» à Genève et à Bruxelles. Mais le berceau de cette avant-garde est indéniablement la Belle province. Le premier «Avis officiel de féminisation des titres» à l’Office québécois de la langue française (OQLF) date de 1977. Il est signé par la linguiste et lexicologue Marie-Eva de Villers.
Depuis, les linguistes francophones ─ même les Français ont fini par s’y mettre ─ n’ont cessé d’affiner leurs guides de féminisation et de langue épicène, faisant appel à toute leur science pour conjuguer innovation, usage et cohérence linguistique. Il se trouve que, nombre de noms français se terminant par un «e» muet, une bonne proportion des féminisations proposées ne s’entendent pas à l’oral, ou seulement dans le déterminant: «une auteure», «une docteure», «une membre», «une apprentie», «une peintre».
Mais ces pionniers sont aujourd’hui ringardisés. Le temps est venu des «peintresses», des «apprentisses», des «doctrices», des «membresses» et des «autrices». Autrement dit: du «féminin ostentatoire», celui qui doit s’entendre...
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