Maryssa Rachel: «je vous raconte mon instantané»

Publié le 20 février 2020
D’abord portraitiste et plasticienne. Ensuite, écrivaine et photographe. Les chemins qui peuvent mener à la réalisation de nos ambitions sont différents et souvent longs. Et Maryssa Rachel a fait du chemin. «J’ai toujours été attirée par la photo. Il ne s’agit pas que de portraits ou d’images neutres, il s’agit d’aller gratter au fond de chacun pour en sortir le meilleur». Mais dans le monde d'aujourd'hui où tout le monde prend des photos et les publie ensuite sur les réseaux sociaux, cela vaut-il encore la peine de faire ce métier?

La photographie devient échange, restitution, écoute, participation. Dans chacune des photos de Maryssa on perçoit cela, et aussi un abandon poétique du concret pour l'absolu. «J’ai commencé il y a dix ans, mais j'ai toujours aimé la photo. Pour moi, la photographie c'est immortaliser des instants de vie», raconte la brillante quadragénaire qui est aussi la voix de notre rubrique podcast, Quand Maryssa lit. Pour elle, qui est inspirée par l'univers de Diane Arbus, Bettina Rheims, Nan Goldin, la photo, lorsqu'elle est bien faite, raconte une histoire, un sentiment, comme dans un film muet.
«Les publicités, les films, les séries, les magazines n’ont de cesse de montrer des humains quasi parfaits, sans poils, sans vergetures, sans imperfections. Des visages sans marques du temps. Tout y est aseptisé, gommé, pour que les corps ressemblent à des êtres qui n’existeront jamais. Mon travail consiste à montrer aux femmes et aux hommes qui me contactent qu’ils sont beaux, plus que jamais, peu importe leur taille, leur poids, leur âge».

Qui sont les personnes qui posent devant votre appareil photo?
Majoritairement ce sont des femmes. Des femmes qui sortent de moments difficiles, ou qui ont besoin de se réapproprier leur image. Après une séparation, une période de mal-être. Elles cherchent une mise en valeur de leur corps après une prise de poids ou après un accouchement, ou dans le temps difficile de la ménopause. Ces personnes ont besoin d’avoir une autre image d’elle-même.
Les représentations visuelles prolifèrent hors de toute proportion et finissent par des selfies (le réseau social le plus populaire est Instagram). Ce qui manque dans ce paysage semble être le regard. L'attention de l'autre…
A l’époque du selfie, on peut se demander à quoi peut servir une séance photo avec un...

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