Lettre ouverte à Roland Jaccard

Les femmes n’ont pas vocation à servir de divertissement aux hommes. – © DR
Je dois avoir l’âge des femmes que vous aimez reluquer au bord des piscines. Je ne suis pas musulmane et encore moins prude, mais je ne peux tout simplement pas vous laisser dire de pareilles énormités totalement surannées sans réagir. Au risque de vous surprendre, sachez que la plupart des femmes n’ont pas vocation à servir de divertissement aux hommes, ni sur les plages, ni ailleurs. Elles ne choisissent pas leur tenue en fonction de ce qui serait le plus agréable aux yeux de ces Messieurs. Elles n’ont pas besoin de la validation des hommes pour ne pas passer inaperçues. Et elles alternent fièrement entre topless et bikini lorsque l’envie leur prend et que le contexte s’y prête.
L’un des problèmes de votre discours est que vous confondez le combat pour les droits des femmes – qui représente une évolution sociétale – avec la moralisation excessive qui sévit effectivement en ce moment et qui transforme n’importe quel réseau social en tribunal de la bienpensance.
Vous prenez l’islam comme bouc émissaire de vos frustrations personnelles…
Puisque vous mélangez tout, la seule chose claire qui ressort de vos propos est votre connivence avec ces hommes qui regrettent qu’on ne puisse plus se livrer impunément au «troussage de bonne», comme au bon vieux temps, et qui considèrent que des mouvements comme «MeToo» sont un obstacle à la libre expression de la lubricité masculine.
De plus, vous prenez l’islam comme bouc émissaire de vos frustrations personnelles. Preuve en est, votre passage particulièrement élégant sur la débandade du narcissisme qui fait que «le boudin n’a plus honte d’être un boudin». Les thons n’auraient désormais plus la décence de se planquer du regard gourmand de tous ces mâles venus à la plage exprès pour se rincer l’oeil. En gros, personne n’est plus suffisamment à poil, sauf les moches. On a rarement fait aussi classe! Ce qui vous dérange avec le burkini – qui représente évidemment un sujet en soi, personne ne le conteste – semble moins être le côté politique de la chose que le fait qu’il s’agisse d’un corps de moins à reluquer.
Contexte historique
La révolution sexuelle nécessaire des années 60, que vous portez aux nues (sans mauvais jeu de mots) s’est produite dans un contexte bien particulier, en réaction à l’ère puritaine qui l’a précédée. On ne pouvait en ignorer le contexte historique à ce moment-là, comme on ne le peut toujours pas à l’heure actuelle. Période que l’on pourrait tout à fait considérer comme un équilibre entre deux extrêmes.
Alors en effet, les piscines publiques ne sont pas l’endroit idéal pour y trouver «l’ambiance frivole et érotique» que vous y recherchez mais, rassurez-vous, d’autres lieux propices à ce genre de plaisirs sont légion.
Peut-être serait-il temps de changer de point de vue sur la société qui vous entoure, ou alors de mettre la main sur le Dr. Emmett Brown, protagoniste de la saga Retour vers le futur, afin qu’il puisse vous renvoyer à une époque qui conviendrait à ceux qui, comme vous, semblent se fier uniquement aux apparences pour juger d’un esprit libertaire. Et cela ne se compte pas en décennies, mais plutôt en millénaires.
Pour relire le texte «Bikini contre Burkini» de Roland Jaccard, c’est par ici!
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