Respirer une fois sur deux avec Alain Huck

Publié le 15 août 2025
C’est une des plus belles expositions en Suisse cet été, à voir jusqu’au 9 septembre au Musée cantonal des Beaux-Arts (MCBA) de Lausanne. Alain Huck propose une promenade dimensionnelle à travers les mots et la pensée. Miroir d’un état du monde terrifiant, son œuvre est néanmoins traversée de tendresse, histoire de nous rappeler que l’art peut être d’une radicale efficacité pour provoquer la réflexion et l’engagement.

Le parcours sur trente ans d’un des artistes suisses les plus inventifs et protéiformes de sa génération est à découvrir au Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne, dans l’exposition Respirer un fois sur deux. Derrière ce titre énigmatique, l’enfant de Vevey Alain Huck convoque l’universel et nous invite à écouter la respiration du monde.
Il annonce d’emblée: «Le matin je retiens mon souffle pour être prêt à accueillir la dernière information d’un prochain désastre». Il ne se laisse pourtant pas démonter par les tourments de l’actualité qui, au contraire, deviennent l’impulsion de son art. «Je suis traversé par une certaine colère, une révolte. Ce quotidien me provoque une dose d’énergie, puis je pose les choses très calmement», explique-t-il.
«Je revendique une biodiversité de l’art»
Montée au MCBA sous le fin regard de la commissaire Nicole Schweizer, l’installation révèle la multiplicité des expériences plastiques de l’artiste. «Je m’autorise tout. C’est ma liberté d’artiste. Je revendique une biodiversité de l’art, comme dans la vie », sourit-il.
Dans les deux salles du premier étage du musée – un espace somme toute assez restreint –  les trois grands thèmes de la Nature, de l’Histoire et du Contrat social dialoguent dans une mise-en-scène aérée.
L’exposition de Lausanne propose des œuvres de périodes et de natures très différentes, dont les fusains monumentaux qui ont fait la notoriété de l’artiste, des bâches solaires en enfilade qui deviennent des injonctions: «Vite soyons heureux il le faut je le veux», des toiles de jute émaillées de constats poétiques et drôles, des dessins délicats. Le texte avec son rapport à l’image demeure la toile de fond. «Le fil, c’est la parole, le mot, le texte», indique l’artiste.
Qui d’autre que Huck aurait eu l’idée de présenter...

Ce contenu est réservé aux abonnés

En vous abonnant, vous soutenez un média indépendant, sans publicité ni sponsor, qui refuse les récits simplistes et les oppositions binaires.

Vous accédez à du contenu exclusif :

  • Articles hebdomadaires pour décrypter l’actualité autrement

  • Masterclass approfondies avec des intervenants de haut niveau

  • Conférences en ligne thématiques, en direct ou en replay

  • Séances de questions-réponses avec les invités de nos entretiens

  • Et bien plus encore… 

Déjà abonné ? Se connecter

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

À lire aussi

Des Nymphéas au smartphone

Premier film de Cédric Klapisch présenté à Cannes en 35 ans de carrière, «La Venue de l’avenir» ne marque pas tant un saut qualitatif que la somme d’une œuvre à la fois populaire et exigeante. En faisant dialoguer deux époques, la nôtre et la fin du 19e siècle des impressionnistes, (...)

Norbert Creutz

Le chant du monde selon Hodler et la griffe de Vallotton

A voir absolument ces jours en nos régions: deux expositions denses de contenu et de haute volée qualitative, consacrées respectivement à Ferdinand Hodler et quelques «proches», et à Felix Vallotton graveur sur bois. Où la pure peinture et le génie plastique subliment, pour le meilleur, toute forme d’idéologie esthétique ou (...)

Jean-Louis Kuffer

L’art jubilatoire et jaculatoire d’Armand Avril

A 99 ans, l’artiste lyonnais expose ses nouvelles créations à la galerie RichterBuxtorf de Lausanne. Des chats et des chattes, et aussi des palmiers à la forme sans équivoque. Diverses techniques sont utilisées – peinture, collages, encre… – et les supports sont d’anciens sacs de farine ou des pages de (...)

Patrick Morier-Genoud
Accès libre

Hodler, la locomotive suisse de la modernité face à ses émules

Pour montrer la forte influence de Ferdinand Hodler sur plusieurs générations de peintres suisses, le Musée d’art de Pully et le Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel proposent un parcours singulier. Les thèmes iconiques du maître s’y déclinent à travers une cinquantaine d’artistes suisses de la première moitié du 20e (...)

Michèle Laird
Accès libre

L’art au service de la paix: la collection Ghez à l’Hermitage

La Fondation de l’Hermitage accueille une rareté dans le monde des collections privées: les trésors du Petit Palais de Genève proviennent de la collection d’Oscar Ghez, un collectionneur sensible au destin de l’humanité et aux artistes femmes. Privilégiant l’art français de la fin du 19e et du début du 20e, (...)

Michèle Laird
Accès libre

Le Titanic redonne vie à une part de notre histoire

A Lausanne, l’exposition «Titanic – De vrais objets, de vraies histoires» invite les visiteurs à embarquer sur le paquebot légendaire, depuis le 27 septembre 2024. On peut y découvrir 200 objets remontés du site de l’épave, accompagnés de reconstitutions d’espaces emblématiques comme le Grand Escalier ou les cabines. Sur les (...)

Lena Rey

D’Edouard Manet à Robert Ryman et vice-versa

Remarquable et passionnant, «Atopiques. De Manet à Ryman», de Jean Clay, qui vient de paraître à L’Atelier contemporain, nous fait revivre le rapport de la génération mai 68 avec les pratiques artistiques les plus avancées de l’époque.

Yves Tenret

Vivent les mauvais artistes

Peu de groupes socio-professionnels sont sujets à une compétition aussi brutale que les artistes. Des millions d’appelés et quelques élus. On ne se souvient donc que des supposés génies. Mais que seraient ces artistes géniaux sans tous ceux qui, pense-t-on, ne le sont pas.

David Laufer

La sélection, clé de voûte de l’art

Une visite à Gand et ses merveilles de la Renaissance offre une occasion de se demander comment on sélectionnait les artistes alors, et comment on s’y prend aujourd’hui. Et pourquoi cette sélection détermine en grande partie notre perception de la scène artistique.

David Laufer
Accès libre

Vevey Images, images de Vevey

Au café «Le Bout-du-Monde», il ne reste plus qu’un croque-monsieur à la carte. Va pour le croque jambon-fromage-oignon, et une bière blonde. Une dame visiblement solitaire cherche à entamer la conversation. «Vous êtes architecte? Médecin?» Rien de tout cela, madame: retraité. «Oui, mais avant?» J’hésite à décliner mon état d’ex-journaliste, (...)

Jean-Claude Péclet
Accès libre

Jean Frémon, vendeur d’art

«Probité de l’image», recueil de vingt-huit textes rédigés entre 1991 et 2022 pour des catalogues par le directeur de la galerie Lelong, sise rue de Téhéran à Paris, c’est-à-dire l’ancienne et fameuse galerie Maeght, nous livre un riche et précieux témoignage des rencontres infiniment variées de Jean Frémon (1946) avec (...)

Yves Tenret

A Venise, l’art contemporain exténué

Depuis 1895, la Biennale de Venise, la plus ancienne et la plus prestigieuse foire d’art contemporain, présente les dernières tendances. Or depuis quelques années, une vérité s’y affirme peu à peu: dans l’art, comme dans nos société en général, il n’existe plus, ni tendances, ni projet.

David Laufer

L’enfance célébrée

Si la Fondation Gianadda nous a habitués depuis plus de quarante ans à des expositions magnifiques, celle-ci est exceptionnelle. «Anker et l’enfance» met en scène les œuvres majeures du peintre suisse à travers un hymne aux enfants. Bel hommage à Léonard Gianadda, décédé en fin d’année dernière, qui a préservé (...)

Loris Salvatore Musumeci

La mise à mort sacrificielle de Damien Hirst

Imaginez les femmes de Downton Abbey, ou celles du Swinging London des années 60. Eblouissantes d’élégance, de style et de sous-entendus. Sautez jusqu’en 2020 et voyez ces jeunes Londoniennes, leurs corps flasques débordant de leurs robes trop courtes, ivres mortes, visages botoxés à peine visibles derrière des couches de maquillage (...)

David Laufer

L’économie est trop importante pour la laisser aux économistes

Des voix se sont élevées pour dire que les manifestations dans les universités de ces dernières semaines étaient déplacées, car dans nos hautes-écoles on ne devrait pas prendre position. Or cette idée est à la fois utopique et stérile. D’une part, les recherches universitaires sont forcément le fruit d’un positionnement, (...)

Boas Erez

Oskar Kokoschka: apologie du dessin

Aglaja Kempf, conservatrice de la Fondation Oskar Kokoschka, présente dans un splendide nouvel ouvrage publié ces jours-ci aux Cahiers dessinés,150 dessins du maitre. Tous sont issus de la collection de la Fondation, riche de 2’300 œuvres aux techniques variées.

Yves Tenret