Ces Suisses qui ont migré et ont été des esclavagistes

Publié le 22 juin 2020
Au Surinam, David de Pury était un esclavagiste. Comme le furent, au Brésil, des migrants parti de Fribourg en 1818 et qui ne se sont pas privé, dans les plantations de café, de faire trimer pour eux des Africains achetés sur le marché aux esclaves de Rio de Janeiro.

Ça ne rate presque jamais. Quand le monde se grippe, quand on ne sait plus trop où donner de la tête, on se met à déboulonner les statues. Souvenez-vous quand Saddam Hussein a chuté de son piédestal à Bagdad en 2003. A la télé, on voyait la foule des Irakiens en liesse qui pensaient que l’Amérique venait de leur apporter la liberté. Ils ont un peu déchanté après, les Irakiens. Bon, là c’était la guerre, pas une juste crise. Ou bien, mais là c’est du cinéma, quand Theo Angelopoulos, dans son film «Le regard d’Ulysse», balade une statue géante de Lénine, couchée sur un chaland qui remonte le Danube en traçant neuf nouvelles frontières dans l’Est de l’Europe. C’était en 1995, le mur de Berlin était tombé il n’y avait pas si longtemps.
Aujourd’hui, on veut déboulonner la statue de David de Pury à Neuchâtel. Ce n’est pas à cause de la crise sanitaire, mais de la vague anti-raciste déclenchée par l’assassinat du citoyen noir Georges Floyd par le policier blanc Derek Chauvin s’est greffée par-dessus. Mais pourquoi diable David de Pury? Ce bienfaiteur qui a payé de sa fortune pour que prospère ensuite l’horlogerie helvétique... Mort en 1786 sans descendance, il a légué à sa ville natale l’équivalent de 30 à 600 millions de nos francs actuels selon le taux de change qu’on applique. Mais David de Pury, c’était un esclavagiste.
Aux USA, on dégomme des effigies de Christophe Colomb
En Amérique, à Minneapolis, là où le policier blanc Derek Chauvin a occis le citoyen noir Georges Floyd, on déboulonne aussi les statues. Des manifestants s’en sont pris à celle de Christophe Colomb. Le «découvreur» du Nouveau Monde, n’a pourtant pas esclavagisé les Africains importés dont les descendants sont aujourd’hui massacrés par la police des States, mais il a ouvert la voie en réduisant les Indie...

Ce contenu est réservé aux abonnés

En vous abonnant, vous soutenez un média indépendant, sans publicité ni sponsor, qui refuse les récits simplistes et les oppositions binaires.

Vous accédez à du contenu exclusif :

  • Articles hebdomadaires pour décrypter l’actualité autrement

  • Masterclass approfondies avec des intervenants de haut niveau

  • Conférences en ligne thématiques, en direct ou en replay

  • Séances de questions-réponses avec les invités de nos entretiens

  • Et bien plus encore… 

Déjà abonné ? Se connecter

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

À lire aussi

Accès libre

Odieux graffitis à Payerne

Lors des Brandons de Payerne, qui se sont déroulés du 7 au 10 mars derniers, des inscriptions racistes et antisémites ont été apposées sur certains commerces. Un municipal payernois fait partie des auteurs de ces inscriptions. Tout ça dans la ville où un ignoble crime antisémite a été commis en (...)

Jacques Pilet

Racisme: l’Histoire bafouée

L’Occident serait-il le mal absolu ? La thèse recueille un succès croissant dans les cénacles intellectuels. Elle vient d’être reprise par une romancière à succès, Léonora Miano, dans un essai où elle réduit l’humanité à une opposition « Blancs-Noirs ». Cette lecture raciste de l’Histoire ne résiste pas au tamis (...)

André Larané

Les profs blancs sont racistes, même s’ils ne le sont pas

Corine Lesnes, correspondante du «Monde» à San Francisco, rapporte une évolution pour le moins étonnante du système éducatif californien. Une nouvelle charte enjoint plus de 60’000 professeurs d’université à adopter une perspective antiraciste dans leurs cours, quelle que soit la discipline, et à admettre leurs propres et prétendus «préjugés» racistes.

Marie Céhère

Tueur raciste à Paris: l’extrémisme est-il responsable?

L’homme qui a tué trois Kurdes à Paris est présenté comme «déséquilibré psychiquement» et déclare vouer «une haine pathologique aux étrangers». La «folie» – si «folie» il y a – d’un tueur raciste exonère-t-elle les boutefeux de l’extrémisme?

Accès libre

Jacques-André découvre qu’il est cocu de plusieurs manières

Les tragi-comiques péripéties de la famille Schinken Pochon ///// L’infidélité de Nadège plonge Jacques-André dans le désespoir. Du coup, même ses convictions politiques s’en trouvent ébranlées. Comment va-t-il surmonter cette crise tout à la fois idéologique et conjugale? En votant comme la droite? En étudiant le Kamasutra? Il n’est décidément (...)

Accès libre

Selon les woke, les woke n’existent pas. Spoiler alerte: ils existent!

Vous en avez sûrement déjà entendu parler, de ces personnes – souvent jeunes, mais pas que – qui militent contre le «racisme systémique», la «culture du viol» ou encore le «pouvoir de l’Homme blanc occidental hétérosexuel». Arf, vous dites-vous peut-être, c’est un phénomène risible. Et vous avez raison. En revanche, considérer (...)

Accès libre

Qui autorise qui à rire de quoi?

Un sketch de la comédienne Claude Inga-Barbey crée la polémique. Est-elle une vilaine raciste anti-Asiatiques et anti-transsexuels ou au contraire une sainte martyre de la liberté d’expression? Et chacun, selon sa posture, de nous expliquer ce qu’est l’humour et ce qu’il n’est pas. La principale intéressée, elle, a décidé de (...)

Accès libre

«Chocolat foncé» et «mulâtre»: entre colorisme et colonialisme

Des hébergeurs AirBnb discriminants? Pas si vite…

Un certain nombre de personnes – 1,4 millions, nous dit un article récent de siecledigital.fr – louant leurs logements sur la plateforme Airbnb seraient discriminantes, refusant d’héberger des clients noirs, asiatiques ou encore transgenres. Mais, minute: sont-ils refusés pour ces motifs-là?

Les Pieds nickelés chez Nestlé, le petit Noir qui disait «merci» et ce qu’est vraiment Facebook

Un comptable a piqué dans la caisse de la multinationale veveysanne pour tout claquer en produits de luxe avant de se faire alpaguer et condamner. Enfant, il m’arrivait de garder pour moi l’argent de la quête et de le dépenser en bonbons. Tandis que Facebook capte les données numériques d’utilisateurs (...)

Flic, ce métier impossible

Le meurtre de Georges Floyd à Minneapolis et les brutalités occasionnelles de la police française contre les gilets jaunes ont rouvert le débat sur le rôle de la police dans nos sociétés. Dans une démocratie, le métier de flic est difficile. Mais quand ces démocraties sont sous tension, il devient (...)

Brûlons aussi Charles Trenet

Par curiosité, afin de voir quelles seraient pour moi les conséquences d’une application stricte de l’hygiénisme mémoriel ambiant, j’ai ouvert l’armoire où j’entasse mes nombreux vinyles et CD afin de savoir lesquels je devrai cacher le jour prochain où la nouvelle Milice débarquera pour savoir si je suis un bon (...)

Bonnie and Clyde afro-américains

Sorti en catimini au début de l’année, même pas distribué en Suisse romande, «Queen & Slim» de Melina Matsoukas entre aujourd’hui fortement en résonance avec les mobilisations antiracistes qui ont suivi l’affaire George Floyd. Du coup, le voilà à l’affiche à Genève et à Lausanne. Partant d’un contrôle policier qui (...)

«Vos héros sont nos bourreaux!», l’antiracisme renverse les hiérarchies

Après la mort tragique de George Floyd aux Etats-Unis, le mouvement décolonial, idéologiquement solide dans la lutte contre le racisme, entend accélérer la marche vers une société nouvelle. L’«Occident» est sa cible principale, qui, bien qu’antiraciste, entretiendrait des rapports de domination perpétuant son avantage. La preuve? Ses statues d’«esclavagistes» encore (...)

Accès libre

Pour la première fois, le Mexique compte sa population noire

Les enquêtes de l’Institut national de statistique et de géographie (INEGI) qui seront utilisées pour le recensement mexicain ont commencé en mars. Le journal espagnol El País rapporte que pour la première fois dans l’histoire, des questions ont été posées au peuple au sujet d’un groupe qui a été rendu (...)

Accès libre

La couleur des ressentiments

Le film «No apologies», plébiscité lors du Festival Cinémas d’Afrique et actuellement diffusé au cinéma Bellevaux, propose les témoignages exclusifs de migrants africains qui se confient en toute intimité sur un quotidien lausannois entre emmerdements et débrouillardise.